La responsabilité financière des gestionnaires publics au beninpar Faustin SOGADJI Université d'Abomey-Calavi - Master 2 Droit Public Fondamental 2023 |
B. Vers un véritable procès pénalLa Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) est créée par la loi n° 2018-13 du 02 juillet 2018, modifiant et complétant la loi n° 2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin. La création de la CRIET instaure dans le système de répression en droit public financier, un véritable procès pénal. La lutte contre l'impunité et la difficulté de mise en oeuvre des procédures ordinaires à raison soit des justiciables qui peuvent être des politiques ou autorités publiques soit de «?l'émergence des infractions?»207(*) ont conduit le gouvernement de la rupture à l'installation d'une juridiction pénale spéciale. Comme l'affirme François AWOUDO et Al., « la philosophie générale de la réforme sous la rupture traduit une volonté de consolidation de l'État de droit avec un accent mis sur la contribution de la justice à travers d'une part, le renforcement de la sécurité juridique et judiciaire et d'autre part, à la moralisation de la gestion du bien public?»208(*).À cet effet, la CRIET s'est vu attribuer des compétences dans la répression des infractions d'ordre économique d'une manière générale. La loi n° 2020-07 du 17 février 2020 vient mettre plus de précision sur la compétence de la CRIET sur les infractions économiques qui concernent aussi les finances publiques. Elle définit en effet une infraction économique comme «?celle qui vise les finances de l'État ou dont la réalisation produit des effets sur l'ordre public économique ainsi que celles qui constituent une atteinte grave et massive à la santé publique et à l'environnement?»209(*). Ces lois constituent le cadre juridique du véritable procès pénal du droit public financier au Bénin. La compétence de la CRIET étant clairement définie dans ces textes législatifs, la consécration de la répression financière n'est plus discutable. L'article 5 alinéa 5 de loi n° 2020-07 du 17 février 2020 prévoit les infractions «?- le terrorisme et les infractions connexes?; Les crimes et délits contre la sûreté de l'État?; Les soustractions et détournements commis par les agents publics lorsque la valeur de la chose soustraite ou détournée est égale ou supérieure à dix millions (10 000 000)?; La corruption des agents publics nationaux et internationaux?; La corruption dans la passation des marchés publics?; La corruption dans le secteur privé?; Les infractions relatives à la direction, à l'administration et au contrôle des entreprises publiques ou semi-publiques?; Le trafic d'influence?; L'abus de fonction?; L'enrichissement illicite?; Le délit d'initié?; Les délits des fonctionnaires qui se sont ingérés dans les affaires ou activités incompatibles avec leurs fonctions?; Les vols, extorsions, abus de confiance ou escroqueries lorsque la valeur des biens soustraits, dissipés ou détournés est égale ou supérieure à cent millions (100 000 000)?; Les infractions au contrôle des changes?; Les infractions aux règlements sur les maisons de jeux?; Le détournement des prêts consentis ou garantis par l'État?; Le trafic de drogues et précurseurs?; Les infractions commises par des moyens de communication électronique portant gravement atteintes à l'ordre public, à la sécurité nationale, au moral des troupes et au patrimoine de l'État ou des particuliers?; Le blanchiment des capitaux et les infractions assimilées?; La piraterie maritime?; Les enlèvements de personnes avec ou sans demande de rançon?»210(*).La compétence de la juridiction pénale spéciale (CRIET) est organisée pour connaître des infractions économiques faisant d'elle une véritable Cour de répression financière. La loi portant renforcement juridique et judiciaire de la bonne gouvernance publique au Bénin, en son article 4, est plus explicite sur les infractions d'ordre économique qui concerne uniquement la gouvernance publique. Cette loi s'inscrit dans le renforcement de la responsabilité des gestionnaires publics au Bénin par une mise place d'un système de qualité pour la répression financière. Au Bénin, la répression financière n'est plus de la généralité où le juge des comptes est seul juge financier, mais plutôt une évolution vers l'institution de véritable procès pénal où les juges pénaux exercent un véritable office. Le système de responsabilité financière des gestionnaires publics au Bénin est mis à l'épreuve dans la pratique. DEUXIEME PARTIE : UNE RESPONSABILITE FINANCIERE A L'EPREUVE DE LAPRATIQUE
* 207 «?De nos jours, le droit pénal est confronté à la complexité des infractions dites émergentes?» précise ÉDOUARD Cyriaque Dossa, le président de la CRIET. * 208 François K. AWOUDO et Al, op. cit., p. 105. * 209 Article 5 alinéa 5 de la loi N.° 2020-07 du 17 février 2020 modifiant et complétant la loi n° 2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en république du Bénin, telle que modifiée par la loi N.° 2018-13 du 02 juillet 2018 relative à la création de la cour de répression des infractions économiques et du terrorisme. * 210 Article 5 alinéa 5 de la loi modifiant et complétant la loi n° 2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin, telle que modifiée par la loi n° 2018-13 du 2 juillet 2018 relative à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme. |
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