Le droit congolais et le regime des poursuites d'un ancien premier ministrepar Gulain KASONGO Université de Likasi (UNILI) - Licence en droit privé et judiciaire 2022 |
CHAPITRE PREMIER : LES GENERALITESAfin de bien cadrer notre étude et éviter de nous perdre dans de longues discussions sur le plan de la sémantique qui nous éloignerait des problèmes de fond, nous nous proposons d'exposer d'abord dans ce chapitre de : L'aperçu général sur la justice constitutionnelle (section1), notion relative aurégime juridique (section2), et nous abordons la question sur le Premier Ministre et mode de désignation de celui-ci (section3). Section. 1 : L'aperçu général sur la justice constitutionnelleDans cette section, nous examinons : La Naissance de la justice constitutionnelle dans le monde (paragraphe1) Naissance de la justice constitutionnelle en Europe (paragraphe2) Naissance de la justice constitutionnelle en Afrique (paraphe 3). §.1 : La Naissance de la justice constitutionnelle dans le mondeL'idée de justice constitutionnelle est intimement liée au développement du constitutionnalisme entendu comme un mouvement tendant à soumettre le fonctionnement des pouvoirs publics à un ensemble de règles établies une fois pour toute, dont le respect s'impose à tous, qui ont une force juridique supérieure à toutes les autres règles et qui sont réunies normalement dans un texte unique appelé précisément constitution21(*). Dans le monde, La justice constitutionnelle est née en premier lieu dans les Etats fédéraux comme les Etats-Unis ou la Suisse, car la structure fédérale rend nécessaire un règlement pacifique des conflits de compétences entre l'Etat fédéral et l'un des Etats fédérés22(*). On peut considérer que le modèle américain est inspiré du modèle anglais car c'est en Angleterre que pour la première fois un juge avait refusé d'appliqué une loi qui serait contraire à une règle supérieure23(*), le juge Anglais considère qu'il y a une hiérarchisation des normes : le Common Law est supérieur à la loi royale. Le juge imposer une hiérarchie entre les règles écrites et impose un contrôle judiciaire du respect de cette hiérarchie, sera abouti par la naissance du fédéralisme et du contrôle constitutionnelle24(*). Voilà pourquoi nous analysons dans ce paragraphe la justice constitutionnelle aux Etats-Unis(point1), En Europe(point2), En Afrique (Point4) et En république Démocratique du Congo(point4). A. La justice constitutionnelle aux États-Unis La constitution américaine ne dit pas un mot sur la justice constitutionnelle, elle n'est prévue ni dans la constitution des Etats fédérés ni dans la constitution fédérale. Aux Etats-Unis, le contrôle constitutionnel s'est mis en place grâce aux habitudes coloniales et à l'influence philosophique de la séparation des pouvoirs qui explique que le juge est compétent pour apprécier la constitutionalité des actes des autorités publiques25(*). De l'avis de nombreux auteurs, les Etats-Unis d'Amérique constituent le modèle premier de la justice constitutionnelle. Louis Favoreu indique cependant, que des traces persistantes marquent les origines lointaines dans l'arrêt Bonhamrendu en 1610 par le juge anglais Eduard Coke qui applique la notion de loi supérieure à une loi du parlement qu'il juge déraisonnable et contraire au droit de Common Law en ce qu'elle a fondé la sanction contre sieur Bonham poursuivi par le collège des médecins de Londres pour exercice de la médecine sans autorisation.26(*)L'exemple du juge Coke n'ayant pas fait tache d'huile, il ne peut être tenu pour précurseur du contrôle de constitutionnalité aux Etats-Unis d'Amérique. Ce pourquoi s'agissant des Etats-Unis d'Amérique, il faut noter que, de prime abord, la constitution de ce pays du 17 septembre 1787 ne consacre pas expressément un mécanisme de contrôle juridictionnel. C'est l'oeuvre de la jurisprudence éclairée par la doctrine de James Ottis et John Adams qui, déjà, en 1761, firent entrer le principe politique du contrôle juridictionnel des lois dans les revendications d'indépendance des colonies de Nouvelle Angleterre et proclamant à leur tour qu'une loi contraire à la constitution est nulle et non avenue.27(*) La Cour suprême elle-même dans son célèbre arrêt Marbury v. Madison de 1803 ou plutôt de la volonté du Chief Justice John Marshall, Président de la Cour, qui revendiqua, pour le pouvoir judiciaire, le rôle de gardien de la constitution. Déjà, l'article 3, section 1 de la Constitution des Etats-Unis d'Amérique dispose que « le pouvoir judiciaire des Etats-Unis est dévolu à une cour suprême et à telles cours inférieures dont le Congrès peut, au fur et à mesure des besoins, ordonner l'établissement .28(*) Dominique Turpin nous apprend qu'à la Convention de Philadelphie déjà, la plupart des Pères fondateurs souhaitèrent transposer au niveau de l'Union cette « subordination de la Législature à l'autorité de la Constitution. C'est pour ne pas effaroucher les représentants de certains nouveaux Etats souverains et faire passer la Constitution fédérale que les Pères fondateurs s'en tinrent à l'affirmation de l'existence d'un pouvoir judiciaire mais non celle d'un contrôle de constitutionnalité ».29(*) L'article 6 section 2 de la même Constitution qui dispose que « cette constitution et les lois des Etats-Unis qui seront prises, en conformité avec elle, ainsi que les traités, seront la loi suprême du pays, et les juges de chaque Etat seront liés par eux nonobstant toute disposition contraire des constitutions ou lois étatiques ».30(*) Il importe dès lors de dire, tout en nuance, que le principe du contrôle de constitutionnalité est inscrit dans la Constitution de 1787 même si l'organe chargé de sanctionner cette non-conformité n'était pas indiqué. Le rôle capital de l'arrêt Marbury v. Madison de 1803 est d'avoir transformé l'essai en une victoire éclatante du plus vieux des rêves des fédéralistes convaincus que furent le Chief Justice John Marshall et le Président John Adams qui l'avait nommé au lendemain de la victoire de Thomas Jefferson. L'arrêt de 1803 reproduit ce raisonnement mot pour mot en adoptant le syllogisme suivant : Ø La constitution est supérieure à toute autre norme ; Ø La loi sur l'organisation judiciaire de 1789 est contraire à la constitution ; Ø La loi doit être dès lors invalidée pour inconstitutionnalité. Le juge Marshall concluait ainsi son opinion en affirmant que le « langage de la Constitution des Etats-Unis confirme et renforce le principe considéré comme essentiel pour toute constitution écrite, qu'une loi contraire à la Constitution est nulle et que les tribunaux ainsi que les autres pouvoirs sont liés par un tel instrument »31(*) Pour y parvenir aux Etats-Unis, plusieurs étapes doivent être observées : - Le contrôle porte sur le respect des constitutions des Etas fédérés par les lois des Etats, le respect des constitutions fédérées par les lois fédérées. Le juge accepte que les constitutions fédérées limitent les pouvoirs des autorités fédérées. - Au niveau fédéral : le respect de la constitution fédérale par les lois, constitutions des Etats fédérés, le droit de ces derniers doit respecter la constitution fédérale. Ici c'est la suprématie de la constitution fédérale, donc la norme constitutionnelle qui s'impose aux Etats fédérés. Avec JEFFERSON et HAMILTON nous comprenons que les deux auteurs donnent une interprétation de la subordination, pour eux la constitution est la loi suprême, elle est une loi fondamentale, le juge doit regarder s'il y a une contrariété avec un acte émanant du législateur, en effet le juge doit faire prévaloir le texte dont la valeur est supérieure32(*). - Le respect de constitution fédérale par les lois fédérales. Car la constitution c'est la volonté du peuple alors que la loi c'est la volonté des représentants du peuple. Ici le juge fait prévaloir la norme supérieure mais il ne prétend pas supérieur au pourvoir législatif33(*), on demande au juge de faire prévaloir la volonté du constituant. * 21 Michel FROMONT, La justice constitutionnelle dans le monde, cité par Jean-Pierre MAVUNGU, La justice constitutionnelle en République Démocratique du Congo Aperçu sur la compétence de la cour constitutionnelle et la procédure devant cette Haute Juridiction, Ed. Universitaires Africaines,2017,P.2. * 22 https://cours-de-droit.net/histoire-de-la-justice-constitutionnelle-dans-le-monde-a128211628/, consulté le 28 Avril 2023. * 23 Idem. * 24 https://cours-de-droit.net/histoire-de-la-justice-constitutionnelle-dans-le-monde-a128211628/, consulté le 28 Avril 2023. * 25Le système autrichien de justice constitutionnelle, https://cours-de-droit.net/histoire-de-la-justice-constitutionnelle-dans-le-monde-a128211628/. Consulté le 28 Avril 2023. * 26 FAVOREU (L.), Droit constitutionnel cité par Dieudonné KALUBA DIBWA, Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, https://www.memoireonline.com/, consulté le 28 Mai 2023.* 27 FAVOREU (L.), Droit constitutionnel cité par Dieudonné KALUBA DIBWA, Op.cit. * 28 Constitution des Etats-Unis d'Amérique, du 17 septembre 1787, article III, section 1. * 29TURPIN (D.), Droit constitutionnel, cité par Dieudonné KALUBA DIBWA, Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, https://www.memoireonline.com/, consulté le 28 Avril 2023.* 30 Idem. * 31 TURPIN (D.), Droit constitutionnel, cité par Dieudonné KALUBA DIBWA, Op.cit. . * 32 JEFFERSON et HAMILTON, https://cours-de-droit.net/histoire-de-la-justice-constitutionnelle-dans-le-monde-a128211628/. Consulté le 28 Avril 2023. * 33Cour suprême des Etats-Unis Arrêt JP MARBURY contre MADISON,14 Février 1803. |
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