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Le droit congolais et le regime des poursuites d'un ancien premier ministre


par Gulain KASONGO
Université de Likasi (UNILI) - Licence en droit privé et judiciaire 2022
  

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CONCLUSION PARTIELLE

Dans l'analyse du premier chapitre, en ce qui concerne les généralités, trois sections ont été élucidée pour expliquer ce chapitre.

La première a parlé sur L'aperçu général sur la justice constitutionnelle, Dans cette section, nous avons examiné : La Naissance de la justice constitutionnelle dans le monde, En Europe et En Afrique.

Pour ce qui est de la naissance de la justice constitutionnelle dans le monde, l'histoire démontre que l'idée de justice constitutionnelle est intimement liée au développement du constitutionnalisme

Dans le monde, La justice constitutionnelle est née en premier lieu dans les Etats fédéraux comme les Etats-Unis ou la Suisse, avant de se reprendre dans d'autres Etats Européen et Africains, car la structure fédérale rend nécessaire un règlement pacifique des conflits de compétences entre l'Etat fédéral et l'un des Etats fédérés.

Dans la deuxième section, il a été question d'élucidée sur les Notions relative au régime juridique et ceux des poursuites d'un Premier ministre, cependant, nous comprenons que toutes les questions relatives aux poursuites d'un premier ministre sont réglées par la constitution et la loi organisant la cour constitutionnelle.

Et la troisième section s'est étalée sur le Premier Ministre et le mode de sa désignation, il a été question de comprendre quedans un régimeparlementaire dans lequel le pouvoirexécutif est confié à un gouvernement constitué des ministres, lePremier ministre est généralement le chef du gouvernement dont il coordonne et conduit la politique du gouvernement.

Après avoir démontré l'aperçu général sur la justice constitutionnelle, le régime juridique et la notion sur un premier ministre, il revient de parler des infractions et faits permettant les poursuites d'un premier ministre, ce qui constitue la problématique du deuxième chapitre.

CHAPITRE DEUXIEME : LES INFRACTIONS ET FAITS PERMETTANT LES POURSUITES D'UN PREMIER MINISTRE

Il est de plus en plus admis que le régime pénal des plus hautes autorités du pays soit fixé dans la Constitution. C'est une tradition en République Démocratique du Congo même si Auguste Mampuya Kanunk'a Tshiabo s'inquiète que le constituant congolais du 18 février 2006 ait exercé un oeil plus qu'averti sur le Chef de l'Etat et le Premier ministre considéré ainsi comme un malpropre83(*). Pour cette raison nous analysons dans ce chapitre des : infractions donnant lieu aux poursuites d'un premier ministre en fonction(section1), de la Mise en mouvement de l'action publique contre un premier ministre en fonction (section2), de la Cour constitutionnelle (section3), du juge pénal des anciens premiers ministres en droit pénal congolais (section 4) et la Problématique sur les immunités des poursuites et privilèges de juridiction (section 5).

Section 1 : Les infractions donnant lieu aux poursuites d'un premier ministre en fonction

L'une des particularités de la Constitution de la République démocratique du Congo (RDC) promulguée le 18 février 2006 est d'avoir aligné le statut pénal du Premier ministre (PM), non pas sur celui des membres du gouvernement dont il est le chef, mais sur celui du président de la République (ci-après, le « président ») qui le nomme.

En effet, en matière pénale, cette Constitution prévoit, en faveur de ces deux hautes personnalités, un privilège de juridiction devant la Cour constitutionnelle. Elle prévoit aussi que les poursuites et la mise en accusation contre elles soient « décidées » par un vote des deux tiers des membres du Parlement réuni en Congrès (Assemblée nationale et le Sénat)84(*).

A cet effet, la constitution de la RDC du 18 Février 2006 rend pénalement responsable le Premier Ministre même pendant l'exercice de ses fonctions pour quatre infractions politiques énumérées comme ci-après : 1) haute trahison, 2) délits d'initié, 3) atteinte à l'honneur ou à la probité ainsi que, 4) l'infraction d'outrage au Parlement85(*),et d'autres infractions de droit commun, c'est-à-dire toutes les autres, même celles de droit international, prévues dans les lois pénales et non énumérées parmi les quatre infractions politiques ci-dessus ou n'en constituant pas un des éléments constitutifs, commises dans ou en dehors de l'exercice de ses fonctions du premier ministre ne sont poursuivies qu'après la fin de son mandat.

La question qui se pose alors est celle de savoir si ce régime spécial est aussi applicable à un ancien Premier ministre pour des infractions qu'il aurait commises dans l'exercice de sa fonction (actes de la fonction) alors même qu'il a déjà cessé d'exercer ladite fonction ?Cette question est au centre même de notre sujet et qui était, parmi d'autres, au coeur de l'arrêt rendu le 15 novembre 2021 et l'arrêt du 18 Novembre 2022 rendu par la Cour constitutionnelle dans le cadre de l'affaire Matata et consorts. L'affaire tire son origine des allégations de détournement des fonds publics imputés à un ancien Premier ministre, Monsieur Matata Ponyo, dans l'exercice de ses fonctions qui du reste laisse la doctrine déchainée. Et le présent travail se réserve le droit de répondre à toutes ces questions et trouver les voies et moyens pour faire sortir la société dans une crise juridique en rapport avec les poursuites d'un ancien Premier ministre dès lors qu'il est poursuivi pour des faits qu'ils auraient commis à l'occasion de l'exercice de ses fonctions.

§1. Les infractions Politiques

Procédons par l'énumération avant d'en trouver la justification. Avec Raphael Nyabirungu Mwene Songa retenons qu'est politique l'infraction dont l'auteur ou le but recherché est politique86(*).

Ainsi donc, serait politique par nature une infraction comme l'attentat à la vie du chef de l'Etat car le but recherché est manifestement politique : le renversement des institutions politiques. En effet, l'on ne tue pas un chef de l'Etat pour prendre sa femme ou sa voiture. Le but recherché est donc un critère d'une simplicité quasi biblique ; cependant, lors de la commission de tels actes il est toujours possible que le ou les infracteurs soient des politiques ou de simples sujets.

Selon le critère objectif, l'infraction politique est considérée comme une infraction créée par le législateur pour protéger les droits politiques des citoyens ainsi que l'existence, l'organisation et le fonctionnement de l'Etat, tandis que selon le critère subjectif, on s'attache au mobile du coupable. Toute infraction de droit commun est alors susceptible de revêtir une qualification politique du moment qu'elle a été commise dans un but politique87(*).

Contrairement aux autres infractions qui sont souvent définies par le code pénal, les infractions politiques sont définies par la constitution elle-même, en son article 165, qui donne le contenu de ces infractions88(*). Cet article définit les concepts comme la haute trahison (a), l'atteinte à l'honneur ou à la probité (b), le délit d'initié (c) et l'outrage au Parlement (d) :

a. La haute trahison

La Constitution de 2006 définit la haute trahison comme : le fait pour le (Président de la République) ou le Premier ministre d'avoir violé intentionnellement la Constitution ou lorsque lui ou le Premier ministre est reconnu auteur, co-auteur ou complice de violations graves et caractérisées des Droits de l'Homme, de cession d'une partie du territoire national89(*). Cette haute trahison se matérialisera par la consommation de diverses infractions dont la cour constitutionnelle prononcera les peines90(*). A cette définition légale, il faudra ajouter le cas de haute trahison prévu notamment par les articles 7, 188 et 190 de la même constitution91(*). Aux termes de l'article 7 par exemple, il est dit : « Nul ne peut instituer, sous quelques formes que ce soit, de parti unique sur tout ou partie du territoire national. L'institution d'un parti unique constitue une infraction imprescriptible de haute trahison punie par la loi ». Quant au second article cité, il dispose que : les forces armées sont républicaines. Elles sont au service de la nation toute entière. Nul ne peut sous peine de haute trahison, les détourner à ses fins propres... »92(*) .

Le crime de haute trahison est cependant, un crime politique c'est-à-dire un agissement qui porte directement atteinte à un intérêt ou une prérogative de nature politique, telle une atteinte à l'existence de ou à l'organisation de l'Etat.

Comme l'enseigne Gérard CORNU, la haute trahison est une forme grave d'infraction contre la sûreté extérieure de l'Etat93(*). Selon notre compréhension, elle est donc une infraction politique à contenue variable (soustraite aux principes de la détermination légale des incriminations et des peines) consistant à un manquement grave du Président de la République ou du premier ministre à ses devoirs et engageant sa responsabilité devant la haute cour (cour constitutionnelle).

Pour sa matérialisation l'infraction de haute Trahison appelle la réunion des éléments constitutifs notamment : L'Elément matériel ; Elément moral et l'élément légal

- L'élément matériel : A la différence de l'élément moral ; qui scrute les consciences et sanctionne les mauvaises pensées et les intentions coupables, le droit pénal qui protège la société ne réprime pas les simples idées et l'intention criminelle, non plus que la résolution de commettre un délit, car elle ne trouble pas l'ordre social. Il ne les punit que lorsqu'elles se sont manifestées extérieurement par un fait ou un acte.

Ce fait ou l'acte extérieur par quoi se révèle l'intention criminelle ou la faute pénale constitue l'élément matériel de l'infraction94(*).

Georges LEVASSEUR nous renseigne que, pour qu'une poursuite soit possible, il faut que l'infraction se soit relevée à l'extérieur par un fait matériel objectivement constatable95(*), cela nous pousse à relever l'élément du crime de haute trahison qui est la caractérisation de l'acte incriminé, c'est-à-dire la pose de l'acte matériel prohibé par la loi ou la constitution. Dans le cas de la haute trahison, c'est par exemple la violation de la constitution, c'est par exemple la violation d'un droit ou d'une liberté constitutionnellement consacrée(e), c'est par exemple aussi l'acte de cession de territoire, l'entretien d'une milice ou d'instauration d'un parti unique. A l'opposé de l'élément moral, l'élément matériel, lui est palpable et presque facilement décelable au moyen des faits et des preuves.

Pour ce qui est du premier, le fait pour lui d'agir contrairement à la volonté de la constitution, cet acte constituera pour lui l'infraction de haute trahison.

- Elément moral ou intentionnel : Pour que l'agent réponde de l'infraction, il ne suffit pas seulement d'établir l'élément légal et matériel, faut-il encore prouver l'élément moral. Celui-ci est la faute, l'état d'âme, la tournure d'esprit, socialement et même moralement répréhensible, qui aura accompagné et caractérisé l'activité délictueuse de l'agent.

Toute infraction comporte un élément moral. Cet élément est nécessaire pour que l'agissement reproché puisse être imputé à son auteur. Il faut qu'en agissant ainsi l'auteur ait commis une faute, c'est la condition indispensable de sa culpabilité.

L'élément moral n'est pas le même pour toutes les infractions ; il appartient au législateur de préciser sa nature et son degré d'où pour le crime de haute trahison, l'élément moral transparaît par exemple lorsque la constitution dit que le (Président de la République) ou le Premier Ministre viole intentionnellement la constitution. Dans ce cas, la violation de la constitution est caractérisée à partir du moment où l'acte du (Président de la République) ou du Premier Ministre est commis de propos délibéré c'est-à-dire en ayant la conscience du caractère inconstitutionnel de l'acte posé. Cette conception est fondée, non seulement sur le souci de la protection des droits de l'homme, mais aussi sur la logique répressive propre à la discipline du droit pénal96(*).

- Elément légal : c'est la violation intentionnelle de la loi pénale, ici donc la violation intentionnelle de la constitution de la République par le premier ministre.

L'élément légal n'est rien d'autre que la violation d'un texte constitutionnel ou législatif.

b. L'atteinte à l'honneur ou à la probité

Il y a atteinte à l'honneur ou à la probité notamment lorsque le comportement personnel du Président de la République ou du Premier ministre est contraire aux bonnes moeurs ou qu'ils sont reconnus auteurs, co-auteurs ou complices de malversations, de corruption ou d'enrichissement illicite97(*). Cette infraction se réalise en deux temps : primo, lorsqu'il y a comportement contraire aux bonnes moeurs ; secundo, lorsque les autorités publiques visées sont reconnues responsables de malversations, de corruption ou d'enrichissement illicite, Ces deux éléments constitutifs posent problème tant l'énoncé incriminateur est trop général. En effet, le comportement personnel du chef de l'Etat ou du premier Ministre doit être contraire aux bonnes moeurs. La notion de bonnes moeurs est d'une relativité qui est à la fois contextuelle, historique et géographique. L'incrimination n'étant pas précise dans son énoncé, elle pose en effet le problème précis de sa rationalité praxéologique. Telle disposition perd en efficacité normative tant elle ne règle pas de manière claire les questions de son contenu98(*).

La seconde modalité de commission de cette infraction pose problème également car elle postule en effet que les auteurs présumés doivent avoir été au préalable convaincu de malversations, de corruption ou d'enrichissement illicite pour être ensuite poursuivis et jugés pour atteinte à l'honneur99(*).

Comprenons dans cette incrimination il existe d'autres sous infractions ceux qui concernent d'une part la pudeur et la moralité du chef de l'état ou le premier ministre, infraction bien définie dans le code pénal livre II100(*)et, d'autre part, les infractions liées aux finances et à l'économie nationale. Cette infraction est constatée à travers l'obligation à la quelle est soumis le Président de la République et d'autres membres du gouvernement101(*).

Telle formulation fait double emploi : un chef de l'Etat ou un Premier Ministre convaincus des infractions visées à l'alinéa 2 de l'article 165 ne peut plus être chef de l'Etat ou Premier Ministre car aux termes de l'article 167 alinéa 1er, il aura été déchu de ses fonctions empêchant ainsi la réalisation de cette infraction qui exige que son auteur soit chef de l'Etat ou Premier Ministre102(*).

* 83 MAMPUYA KANUNK'a-TSHIABO (A.), Espoirs et déception de la quête constitutionnelle congolaise. Clés pour comprendre le processus constitutionnel du Congo-Kinshasa, Kinshasa, Nancy, AMA.Ed-BNC, 2005 p 191.

* 84 Jacques B. Mbokani, La Cour constitutionnelle congolaise face au statut pénal d'un ancien Premier ministre

devenu sénateur, op. Cite, P. 54.

* 85 Article 164 de la constitution du 18 Février 2006.

* 86NYABIRUNGU mwene SONGA, citépar : Deogratias BYAMUNGU POLEPOLE,Les poursuites pénales d'un chef de l'état en fonction en droit positif congolais, https://www.memoireonline.com, consulté le 24 Mai 2023.


* 87DESPORTES F., LE GUNEHEC F., Droit pénal général,2e éd Economica,2003, P 102.

* 88 Article 165 de la constitution du 18 Février 2006.

* 89 Idem, Al. 1.

* 90 ILUME MOKE, Le droit judiciaire congolais et compétence judiciaire, T.1, P. UNILI, Lubumbashi, 2013, P.414.

* 91 Article 7 ; 188 et 190 de la constitution du 18 Février 2006.

* 92 Article 190 de la constitution du 18 Février 2006.

* 93 Gérard CORNU, la sûreté de l'Etat est le maintien de la consistance de l'Etat, de son territoire, de sa population, de ses institutions publiques essentielles, de leur indépendance et de leur autorité, par prévention et répression des infractions qui y porteraient atteinte, cité par : Félicité MUGOMBOZI AKONKWA, Du crime de haute trahison en droit constitutionnel congolais https://www.memoireonline.com/10/12/6136/Du-crime-de-haute-trahison-en-droit-constitutionnel congolais.html consulté le 24 Mai 2023.

* 94 STEFANI G., LEVASSEUR G., Droit pénal Général, 3e éd, Dalloz, Paris, 1987, P 226.

* 95 LEVASSEUR G., CHAVANNE A, MONTREUIL J, Droit pénal général et procédure pénale, 2e éd Sirey, Paris, 1991, P. 245.

* 96 La haute trahison, https://www.google.com/search?q=la+haute+trahison+en+droit+congolais&client=firefox-b-d&ei=tytuZKCfHPvY7_UPyNOGmAM&ved=0ahUKEwjg1sCUoY7_AhV77LsIHcipATMQ4dUDCA4&uact=5&oq=la+haute+trahison+en+droit+congolais&gs_lcp=Cgxnd3Mtd2l6LXNlcnAQAzIFCAAQgAQ6CggAEEcQ1gQQsANKBAhBGABQ2hBYok5gwFZoAXABeACAAYMNiAHoJpIBBzYtMS4yLjGYAQCgAQHIAQjAAQE&sclient=gws-wiz-serp , consulté le 24 Mai 2023.

* 97 Article 165 Al. 2 de la constitution du 18 Février 2006.

* 98 Dieudonné KALUBA, https://www.memoireonline.com/02/11/4261/m_Du-contentieux-constitutionnel-en-Republique-Democratique-du-Congo-Contribution--letude-des46.html#toc62 , consulté le 24 Mai 2023.

* 99 Idem.

* 100Article 167 et suivant du code pénal congolais livre II.

* 101Articles 98 et 99, du code Pénal Congolais livre 2.

* 102 Article 167 de la constitution du 18 février 2006.

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