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Les travaux dans le cadre du bail à usage professionnel


par Soline KETCHEUZEU NANA
Université de Dschang - Master en Droit des Affaires et de l’Entreprise  2020
  

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Paragraphe 2 : Le règlement selon les stipulations contractuelles

Généralement dans leur contrat, les parties prévoient une clause prévoyant que les frais déboursés par le preneur pour réaliser les grosses réparations avec l'accord du bailleur seront soit compensés avec les loyers (A) ou ces travaux seront acquis par le bailleur sans aucune indemnité (B).

A- La compensation des impenses avec les loyers

Les parties peuvent convenir expressément dans leur contrat que les travaux effectués par le preneur sur autorisation du bailleur doivent être compensés ou défalqués sur les loyers à venir. C'est ce qui ressort d'une ordonnance rendue en matière civile par le juge des référés du TPI d'Ekounou104(*). En l'espèce, les parties avaient expressément, convenu à l'alinéa 4 de l'article 3 de leur contrat de bail que : « les coûts engagés par le preneur en vue de la réalisation des embellissements, améliorations et installations seront défalqués des loyers ». Le contrat étant la loi des parties, c'est dire qu'en cas de réalisation des grosses réparations faites sur accord du preneur, celui-ci peut retenir les loyers en guise de compensation. C'est en cas de désaccord que l'une des parties peut saisir la juridiction compétente statuant à bref délai. Dans un arrêt rendu par la Cour d'Appel d'Abidjan le 10 décembre 2019, il a été décidé que « Le locataire qui effectue les grosses réparations incombant au bailleur sans obtenir l'autorisation judiciaire ne peut se permettre de retenir les loyers échus à verser à ce dernier en guise de compensation105(*) ». On peut déduire à la lecture de cet arrêt que le locataire ayant réalisédes grosses réparations sur autorisation judiciaire peut être fondé à retenir les loyers en guise de compensation, car cette créance du locataire est certaine, liquide et exigible106(*).

En outre, les parties peuvent décider de commun accord que les travaux effectués par le preneur appartiendront au bailleur sans aucune indemnité.

B- L'accession à la propriété des travaux par le bailleur sans indemnité

Les dispositions de l'article 131 du nouvel Acte uniforme portant sur le Droit commercial général107(*) n'étant pas d'ordre public, elles ne s'appliquent notamment aux relations entre le bailleur et le preneur qu'à défaut d'une stipulation contraire insérée dans le contrat de bail. Partant, il est de jurisprudence constante que le bailleur rembourse les constructions autorisées sauf stipulation contraire108(*). Il arrive souvent que les parties conviennent expressément dans leur contrat à partir de quel moment s'effectue l'accession, en prévoyant par queles travaux de construction, aménagement et autres réalisés par le preneur appartiendront au fur et à mesure au bailleur sans préjudice de remboursement des frais engagés. Cette clause est licite si l'on raisonne selon le droit des biens en droit positif camerounais, en principe, l'accession se réalise immédiatement, les constructions et aménagements étant acquis au bailleur au fur et à mesure de leur incorporation au local. Cette position a été confortée par la doctrine109(*) et entérinée par la jurisprudence ancienne110(*).

Toutefois, il n'est pas exclu que l'accession s'opère également à la fin du bail, ce qui posera le problème de reddition des comptes en fin de bail.

* 104TPI de Ydé-Ekounou, ord. n°40/civ du 16 février 2010, Aff. BALLA André Parfait C/ MFOU'OU Jean Claude.

* 105 Arrêt n° 716/2019 du 10 décembre 2019, CA de Commerce d'Abidjan, 5è ch. En outre, une compensation ne peut être possible entre le loyer qui constitue une créance certaine et le préjudice subi du fait de l'inexécution de réparations par le bailleur, la créance éventuelle du preneur n'étant pas certaine, liquide et exigible.

* 106GATSI (J.), Pratique des baux commerciaux dans l'espace Ohada, PUL, Douala, 2006, p.79. Toutefois, les tribunaux peuvent refuser cette compensation, motif pris de ce qu'il n'y a pas eu accord entre les parties sur les travaux à réaliser, qu'il n'y avait pas urgence. De même que les frais n'ont pas été engagés judicieusement.

* 107 Ce texte s'inspire des articles 555 et 1730 du Code civil camerounais. Toutefois, il convient de préciser que ces dispositions existaient déjà dans le code civil camerounais également.

* 108Civ. 1er mars 1960, Gaz.Pal. 1960. 2. p. 30, ISSA-SAYEGH (J.), POUGOUE (P.G.) et SAWADOGO (F.M.) (coord.), Traités et actes uniformes commentés et annotés, 4è éd. Juriscope, Jouve 2012.

* 109 LARCHER (E.), « À qui appartiennent pendant le bail les constructions élevées par le locataire ? », Rev. Crit. Législ. Et Jurispr. 1900, p. 374 et s.

* 110 LEPAGE (A.), Répertoire notarial Jurisclasseur, V° Propriété, fasc. n°95 qui cite notamment, Cass. Req., 25 mai 1873, S. 1873, I, p. 319.

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