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L'action dans l'intérêt collectif de la profession.


par Slim Affes
Paris Nanterre - UFR Droit Social - Master 2 droit social et relations professionnelles 2020
  

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Sous paragraphe 2 : La défense de l'intérêt général

Devant les juridictions pénales : Certaines infractions à l'intérêt général sont perméables, à l'admission d'autres intérêts à l'instar de celui de la profession. L'intérêt général n'est pas exclusif de l'intérêt de la profession et l'action syndicale en défense de l'intérêt collectif objet de l'article 2132-3 C.T peut être ainsi recevable devant les juridictions pénales, tel est le cas par exemple s'agissant d'un délit d'obstacle à l'accomplissement des fonctions d'un contrôleur du travail.277 des poursuites pour dénonciation calomnieuse 278ou à propos du meurtre d'un inspecteur du travail par la personne qu'il contrôlait.279

273 Nicolas Cayrol, Action en justice Dalloz Collection, Dalloz Corpus 2019 ISBN n°496 p.234

274 S.Guinchard et Buisson, procédure pénale, 11eme Edition. 2018, LexisNexis, n°1217.

275 Ex : Crim. 20 nov. 1984, n°84-91.237, Bull (en cas d'exercice illégal de la profession de préparateur), Crim. 10 juill. 1973, n°71-93.712, (en cas d'exercice illégal de l'activité des agences de voyages), Crim. 14 juin 1972, no 71-91.966, Bull. (en cas d'exercice illégal de la profession d'ingénieur conseil) et Crim. 5 janv. 1971, n°70- 90.712 (en cas d'infraction à la police sanitaire des animaux).

276 Dalloz actualité, 24 janvier 2019, Mehdi Kebir « Ordre des médecins : recevabilité de l'action en défense de l'intérêt collectif de la profession » Civ. 1re, 12 déc.2018, F-P+B, n°17-27.415.

277 Crim. 4 oct. 1988, n°87-80.084.

278 Ex : Crim. 11 mars 2003, n°02-82.352, Bull.

279 Bordeaux, 17 mai 2005, Dr. ouvrier 2006. 40, note F. S.,

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Les syndicats professionnels sont aussi recevables en cas de procédures judiciaire ouvertes à l'encontre de certains membres du conseil des prud'hommes.280

La défense des lois et règlements devants les juridictions administratives : Parmi les exemples relativement récents qui témoignent de la possibilité des organisations syndicales à engager un recours contre une norme juridique touchant les intérêts collectifs des travailleurs : le recours devant le juge des référés engagé par une confédération syndicale interprofessionnelle afin de suspendre l'application de l'ordonnance n°2005-892 du 2 août 2005 relative à l'aménagement des règles de décompte des effectifs des entreprises.281 Le conseil d'Etat a considéré que « l'application de cette mesure porte une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts » du syndicat requérant (CGT-FO en l'espèce). 282

Sous-section 2 : La défense de la conventionalité 283

L'action en justice des syndicats a trouvé également un champ vaste, mais pas très soyeux, sur lequel elle a pu s'étendre pour défendre l'intérêt collectif de la profession : la défense de la conventionalité, c'est-à-dire défendre l'exécution et la validité de la norme collective. L'articulation entre conventions collectives et l'action dans l'intérêt collectif est assez « subtile ». 284 La recevabilité de l'action dans l'intérêt collectif en défense de la conventionalité peut être basée juridiquement sur le fondement général de l'article 2132-3 C.T ou sur la base particulière de l'article 2262-10 C.T issu au fond de la loi du 25 mars 1919285.

La qualité d'agir : Il convient de rappeler que seuls les syndicats de salariés ou d'employeurs sont qualifiés pour exercer l'action en justice en la matière. Les institutions représentatives du personnel sont donc en principes privées de l'exercice de telles actions. Il en va de même pour les groupements qui ne détiennent pas la qualité de syndicat professionnel286 . L'action en justice en défense de la

280 Crim. 3 févr. 2004, n°03-83.259, Dr. ouvrier 2004. 441 (Faux en écriture et violation du secret professionnel).

281 C.E 23 nov. 2005, n°286440 publié au recueil Lebon

282 CE 13 janv. 1975, no 90193, Lebon 16, à propos du recours contre des circulaires concernant la situation des travailleurs étrangers en France

283 Le terme « conventionalité » est emprunté à Emeric Jeansen, La semaine juridique Entreprise et affaire n°39,28 septembre 2017,1515

284 Hélène Tissandier, « intérêt collectif, intérêt catégoriel, intérêt individuel : la complexité de l'action syndicale en justice » note ss Soc. 22 févr. 2006, no 04- 14.771, inédit, RDT 2006. 329

285 Loi relative aux conventions collectives de travail.

286 V, sur ce point, nos développements sur la qualité d'agir.

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conventionalité a pour ambition d'appliquer les stipulations de la convention collective et/ou de lui donner l'interprétation qui convient au syndicat.287

L'action « générale » en défense de l'intérêt collectif de la profession (Art 2132-3 C.T) est différente de l'action de l'action de l'article 2261-11 C.T appelée aussi « Action du syndicat en son nom propre ».

Conformément à l'article 2262-11 C.T, Cette action peut être intentée par tout syndicat ou groupement « contractuellement » lié par la convention ou l'accord, pour demander en son nom propre, l'exécution de la convention et le cas échéant obtenir des dommages et intérêts en raison du préjudice dont il a souffert.

136 : La loi du 25 mars 1919 a ouvert la porte aux syndicats professionnels pour exercer l'action en défense de l'intérêt collectif de la profession par le biais d'un texte particulier relatif aux conventions et accords collectifs qu'est l'Article 2262-10 C.T. Cet article n'est qu'une « déclinaison »288 de l'action générale des syndicats en défense de l'intérêt collectif de la profession tel qu'elle a été reconnue dans l'article 2132-3 C.T (Paragraphe 1). La chambre sociale a tellement étendue la recevabilité des actions syndicale sur la base générale de l'article 2132-3 C.T que l'article 2262-10 C.T est tombé en désuétude (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'action générale de l'article L 2132-3 C.T :

Le droit pour les syndicats d'ester en justice pour défendre la conventionalité (et de manière indirecte l'intérêt collectif) a progressivement été reconnu sur la base générale de l'article de 2132-3 C.T. Cette reconnaissance s'est faite en dépit des actions syndicales spécifiques prévues par les articles 2262-10 et 2262-11 C.T.

Preuve d'extension, l'action dans l'intérêt collectif de la profession est recevable aussi bien en cas de demande d'exécution de la convention collective (sous paragraphe 1) qu'en cas de contestation de sa validité à travers l'action en annulation (sous paragraphe 2). Cette défense de conventionalité « conduit aujourd'hui à admettre que l'action en exécution de la convention collective puisse être exercée par des syndicats non-signataire »289.

287 V. par exemple Soc. 2 déc. 2008, n° 07-44.132, Semaine juridique n°10, mars 2009,1098 note Lydie Dauxerre à propos de la détermination des avantage acquis par les salariés à la suite de la dénonciation d'un accord collectif. Voir aussi Cass. Soc 20 nov. 2010 n° 09-42.990 s'agissant de l'inapplication d'une convention collective non étendue. Note Yannick Pagnere, La semaine juridique Social n°6, février 2011,1066

288 Manuela Grévy, Syndicats professionnels : Prérogatives et action, Dalloz, Répertoire de droit du travail, Avril 2014 n°136

289 Cyril Wolmark, l'action dans l'intérêt collectif - Développements récents. Droit social n°7/8-juillet-Aout 2017. P.631

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Sous paragraphe 1 : L'action dans l'intérêt collectif en exécution de la Convention Collective Une ouverture significative : En matière d'actions en exécution de la convention collective on a assisté à une évolution intéressante marquée par l'extension du champ de l'action dans l'intérêt collectif de la profession. En effet, avant les années 2000, La jurisprudence avait tendance à déclarer l'action du syndicat en vue de l'obtention de l'exécution de la convention collective irrecevable pour défaut de qualité lorsqu'elle, l'action, se basait juridiquement sur l'article 2132-3 C.T.290

Mais depuis les années 2000, la cour a commencé peu à peu à changer de position.

Elle admet de plus en plus l'action en exécution de la convention collective sur la base de l'article 2132-3 C.T sans tenir compte ni de la représentativité ni même du fait que le syndicat demandeur a signé ou non la convention collective.

L'engloutissement de l'action de l'article 2262-11 C.T : La cour de cassation a profité du contentieux relatif à l'application de la convention collective étendue pour admettre le principe de recevabilité de l'action syndicale. C'est l'arrêt du 12 juin 2001 qui a marqué le coup. En effet, l'arrêt a été l'occasion pour la cour de cassation d'autoriser la recevabilité de l'action du syndicat en vue d'appliquer la convention collective, sur la base générale de l'article 2132-3 C.T et non pas sur celle de l'article 2262-11 C.T relatif à l'action contractuelle du syndicat.

Le pas qui a été franchi par la cour de cassation a été considéré par la doctrine comme étant un « saut inhabituel ». Autrement dit, La cour s'est située sur le terrain de l'action dans l'intérêt collectif et s'est montré indifférente à l'existence ou non d'actions particulières en cas de demande d'exécution d'une convention collective, favorisant ainsi une interprétation extensive de l'article 2132-3 C.T ; A ce titre, l'attendu de la cour est assez révélateur ; « en cas d'extension d'une convention ou d'un accord collectif qui a pour effet de rendre les dispositions étendues applicables à tous les salariés et employeurs compris dans leur champ d'application, les syndicats professionnels sont recevables à en demander l'exécution sur le fondement de l'article L. 411-11 du code du travail, leur non-respect étant de nature à causer nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de l'ensemble de la profession ». 291 Cette solution est soutenable à notre avis car d'une part, la généralité de l'article 2132-3 C.T n'est pas imperméable à l'accueil d'une telle l'hypothèse et d'une autre part parce que l'extension de l'accord est de nature à uniformiser l'accès à la justice pour le syndicat bénéficiaire de cette extension. La « condition »

290 Ex : Soc. 10 mai 1994, n°92-14.097, Bull. civ. V, no 173 ; RJS 6/1994, n°736. V. aussi Soc. 25 mars 1985, n°8312.714, Bull. civ. V, no 204.

291 Soc. 12 juin 2001, n°00-14.435, Bull. civ. JCP 2002. II. 10049, note Petit. Et dans le même sens V. Soc. 18 févr. 2003, n°01-02.079, publié

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jurisprudentielle liée à l'extension de la convention collective, a fait toutefois l'objet de nombreux reproches tenant essentiellement à l'effet ergaomnes des conventions collectives, l'inapplication de ces dernières seraient nécessairement préjudiciables à l'intérêt collectif de la profession.

La conquête d'un nouveau domaine292 : A l'occasion d'un arrêt du 3 mai 2007, la chambre sociale a réussi à lever le doute qui s'est installé en 2004293 s'agissant de la condition d'extension de l'accord collectif supposée nécessaire à la recevabilité de l'action dans l'intérêt collectif.

L'arrêt du 3 mai 2007 294 qui a supprimé cette condition de manière définitive, marque incontestablement le signe d'occupation par l'action dans l'intérêt collectif d'un nouveau champ, qui est celui des accords et conventions collectives. 295

En extrapolant la règle de recevabilité de l'action dans l'intérêt collectif à tout litige mettant en cause les conventions collectives, la cour de cassation a autorisé tous syndicat à demander l'application de l'accord ou la convention collective sur la base du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession quand bien même l'accord ou la convention n'est pas étendue et peu importe le niveau de cet accord (Entreprise, Branche, groupe, établissement).

L'arrêt précité explicite en des termes clairs que : « indépendamment de l'action réservée par l'article

L. 135-5 du code du travail (devenu article L. 2262-11 C.T ) aux syndicats liés par une convention ou un accord collectif de travail, les syndicats professionnels sont recevables à demander sur le fondement de l'article L. 411-11 de ce code ( devenu article L. 2132-3) l'exécution d'une convention ou d'un accord collectif de travail, même non étendu, son inapplication causant nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession »296. « La cour de cassation fait ainsi sauter l'un des derniers verrous enfermant l'action en justice des syndicats en justice des syndicats en matière de convention ou d'accord collectif »297. Plusieurs arrêts ont permis ultérieurement de confirmer cette orientation jurisprudentielle. 298 Le dernier arrêt en date indique que l'action de l'article 2132-3 C.T est recevable

292 Note Fabre, Ss. Soc 3mai 2007, n844 FS-P+BA. Dalloz Actualité 24 mai 2007

293 Soc. 26 mai 2004, n°02-18.756, Bull. civ. V, no 143 ; RJS 11/2004. 795, rapp. Morin. Et J-M verdier, La recevabilité de l'action syndicale exercée dans l'intérêt collectif de la profession après les arrêts Aventis Pharma et Michelin, Dr. soc. 2004. 845.

294 Le litige portait sur l'inexécution d'un accord de participation aux résultats de l'entreprise.

296 Soc. 3 mai 2007, n° 05- 12.340, Bull. civ. V, n°68 ; RDT 2007. 536, obs. Borenfreund.

297 Soc 3mai 2007, n844 FS-P+BA. Dalloz Actualité 24 mai 2007, Obs A. Fabre

298 V. Soc. 16 janv. 2008, n°07-10.095, Bull. civ. V, n°10 ; RDT 2008. 245, obs. Véricel. , Soc. 25 mars 2009, n°0744.748, Bull. civ. V, no 84 ; D. 2009. AJ 1092, obs. Maillard. , Soc. 30 nov. 2010, n°09-42.990, Bull. civ. V, no 276 ; JCP S 2011. 1066, note Pagnerre.

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abstraction faite de la signature de l'accord par le syndicat qui l'engage et ce donc « indépendamment de l'action réservée par l'article 2262-11 C.T aux syndicats liés par une convention ou un accord »299

Intérêt collectif et effet ergaomnes : Le non-respect de la convention collective produit un effet néfaste à l'égard de tous les salariés. Un effet ergaomnes selon George Borenfreund. Cet effet néfaste porte atteinte à l'intérêt de la collectivité des salariés. Et donc c'est cet effet préjudiciable à l'égard de tous qui justifie la recevabilité de l'action dans l'intérêt collectif de la profession. Le raisonnement est en totale corrélation avec le principe même de l'action dans l'intérêt collectif tel qu'elle a apparue en 1913 et codifié dans l'article 411-11 C.T (devenu 2132-3 C.T). Cette disposition à caractère très généralisant en dit long sur la capacité représentative des syndicats. En effet, elle confère à tous les syndicats professionnels, un « rôle de représentant » des intérêts agrégés de la profession. Un intérêt qui dépasse les membres du syndicat. Une action « au nom de tous », qui reconnait à toutes les organisations syndicales représentatives ou non, signataires ou non de la norme collective le droit de demander son application ou de demander des dommages et intérêt pour atteinte l'intérêt collectif.

Nouvelle optique : L'action dans l'intérêt collectif a vu également son champ se détendre malgré certaines restrictions jurisprudentielles d'ordre procédurales. L'action principale du syndicat en application de l'accord collectif n'est en principe recevable que si le syndicat sollicite cette application au bénéfice d'une collectivité déterminée et non pas à chacun des salariés nommément désignés300. Facteur d'éclatement du contentieux entre les juridictions et frein à l'action collective, cette orientation a été critiquée.301

L'évolution peut être saisie à travers un nouveau raisonnement observé dans plusieurs jugements de la TGI qui ont pris appui sur la jurisprudence de la chambre sociale.

Une Jurisprudence permissive qui a accordé aux syndicats la possibilité de demander d'ordonner l'application des conventions à une collectivité définie mais à condition qu'il ne s'agisse pas de « droits déterminés au profit de salariés nommément désignés ».302 Le mécanisme nous rappelle étrangement celui de l'action de groupe.

299 Note F.Bousez. Ss. Soc. 11 juin 2013, no 12-12.818, semaine juridique n°3. 21 janvier 2014. 1033.

300 G.Borenfreund, préc .536.

301 Note Ss TGI Nanterre, 23 nov. 2012, Dr. ouvrier 2013. 351.

302 V. Soc. 25 sept. 2013, no 12-13.697, Dr. ouvrier 2014. 41, note Keller Lyon-Caen.

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Dans l'affaire du 25 septembre 2013, « l'arrêt casse partiellement la décision d'appel en se prononçant en faveur de la demande de régularisation ... la cassation ainsi prononcée a ajouté du pragmatisme à la solution, un certain dynamisme puisque la solution peut être directement exécutée »303

Ces tribunaux ont ainsi pu se prononcer en même temps sur l'exécution matérielle de la convention collective ainsi que sur la demande du syndicat visant à régulariser en bloc la situation des salariés concernés. 304

Enfin, dernier espace dans lequel l'action générale dans l'intérêt collectif déplorable en matière d'exécution d'accord ou de convention collective a pu s'étendre, c'est les accords atypiques. En effet l'inobservation de ces accords par l'employeur cause inévitablement préjudice à l'intérêt collectif de la profession. 305

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard