Partie 1 : Revue de la littérature
1) Vers un changement de pédagogie.
Dans une pédagogie classique, le maître fait son
cours de science par informations ascendantes avec accumulation d'informations
que l'enfant doit ensuite apprendre et restituer. Dans la méthode LAMAP,
c'est l'enfant lui-même qui découvre les lois scientifiques, ce
qui lui permettrait ensuite de mieux les assimiler (Piaget, 1970). Cette
pédagogie peut être considérée comme la
résultante des travaux du Psychologue Jean Piaget et des idées
constructivistes. En effet, pour Piaget (1969) l'enfant agit comme un chercheur
qui a besoin d'inventer pour comprendre. L'avènement des idées
constructivistes a vu naître de nombreuses pédagogies reposant sur
cette thématique. Toutes ces pédagogies sont regroupées
dans la littérature sous le terme « Inquiry Based Science Education
(IBSE) » (Wu, Tseng, & Hwang, 2015). Le constructivisme est
défini comme l'idée que les connaissances se développent
graduellement en stade. Ces connaissances sont acquises plus rapidement et plus
durablement par l'enfant s'il construit lui-même le savoir par un
raisonnement hypothético-déductif (Piaget, 1970).
Cependant, ces dernières décennies les travaux
de Piaget ont été réinterprétés. Piaget a vu
le développement comme linéaire. (Houdé, 2014). En effet,
la présence de décalages
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horizontaux dans le développement a remis en cause le
modèle linéaire Piagétien. On sait maintenant que
très tôt les enfants ont des compétences précoces.
Dans le domaine scientifique on peut citer, par exemple les travaux de Wynn
(1992) qui ont montré les compétences proto numériques
précoces des bébés. De même, certaines erreurs
tardives (biais de disponibilité, biais de
représentativité, biais d'appariement, etc.) des enfants et des
adultes restent inexplicables au regard de la théorie
Piagétienne. (Khaneman, 2011, cité par Shleifer, 2012). Il
existerait deux systèmes pour Khaneman (2011), trois pour Houdé
(2000). Le système 1 dit « Heuristique », rapide peu
coûteux et automatique. Ce système fonctionne dans la
majorité des situations. Les heuristiques sont intuitives et construites
à partir de nos expériences (Houdé & Borst, 2015), et
le système 2 dit « Algorithmique », coûteux, logique
(celui qui est sollicité dans la réussite académique, car
il permet à coup sûr d'arriver à la bonne réponse,
c'est-à-dire au concept scientifique) et le système 3 : «
Superviseur », qui est l'arbitre et permet de choisir au cas par cas entre
système 1 et système 2 en situation de conflits. Piaget postulait
que la construction de la pensée se faisait en stade et que peu à
peu la pensée de l'enfant allait se développer vers une
conception logico-mathématique. Encore aujourd'hui, le système
scolaire français est construit sur le modèle Piagétien.
Pourtant, le développement n'est pas « Unitaire », mais «
Pluraliste ». (Lautrey & Caroff, 1999). Se développer
dépendrait de l'activation et de l'inhibition de différents
processus qui peuvent entrer en compétition (Lautrey & Caroff,
1999). Ce constat nous amène à nous demander si la manière
d'enseigner ne devrait pas suivre un chemin pédagogique
différent. La réussite à l'école nécessite
d'utiliser en priorité le système 2, c'est-à-dire d'avoir
une pensée réfléchie et logique qui repose sur des savoirs
vérifiés. En science, cela équivaut pour l'enfant à
devoir activer un concept scientifique appris et à le restituer au
moment où on lui demande. Le système 1, constitué des
croyances de l'enfant sur le monde est pourtant celui qui est activé
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en priorité par économie d'énergie
(Houdé, 2014). Ces croyances sont regroupées dans la
littérature sous l'appellation : « théories naïves
».
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