1.5. Perspectives de notre étude pour le
terrain.
Les résultats présentés dans ce
mémoire même s'ils sont relativement faibles peuvent avoir des
implications pratiques de deux ordres pour le terrain.
D'abord, nos résultats montrent que les
différences entre les filles et les garçons sont toujours bien
marquées que cela soit en faveur des filles ou des garçons. La
division sexuée de l'orientation est toujours présente. Les
filles préfèrent les métiers majoritairement
exercés par les femmes et les garçons les métiers
majoritairement exercés par les hommes. Il est donc important que les
professionnel?l?es de terrains continuent à mettre en place des actions
visant
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à expliciter ces « différences
supposées naturelles » (Vouillot, 2014) et ainsi à
réduire les inégalités que ces différences
pourraient engendrer.
Nos résultats montrent qu'une modification de
l'utilisation des formes grammaticales peut avoir une influence pour
réduire cette différence, mais que cela n'est pas suffisant. Il
conviendrait donc d'abord que tous les acteurs et actrices de terrain
s'adressent aux filles et aux garçons en utilisant le genre grammatical
qui correspond à leur sexe et non le genre grammatical masculin. Outre
une modification du genre grammatical, c'est grâce à une prise de
conscience et une modification des comportements à l'égard des
élèves que nous pourrons lutter contre les
stéréotypes de sexe. Pour cela, la formation des équipes
sur le genre est importante. En effet, le Haut Conseil à
l'égalité entre les femmes et les hommes (2017) émet le
constat d'un manque de formation des professionnel·le·s. Il
préconise ainsi :
« - de renforcer et généraliser la
formation initiale des personnels sur l'égalité
filles-garçons - par un module dédié obligatoire,
l'intégration de cette question à l'ensemble des cours et la
présence de personnes ressources au sein des ESPE - et d'en faire une
compétence requise pour l'obtention des diplômes ;
- de développer et garantir une offre de formation
continue sur l'égalité des sexes en encourageant les personnels
à y participer ;
- d'élaborer un Guide pratique de la formation
à l'égalité filles-garçons visant à
accompagner et outiller les professionnel.l.e. s de l'Éducation
nationale. »
Les Psychologues de l'EN peuvent en outre avoir un rôle
à jouer dans la formation des professionnel·le·s de l'EN. En
effet, les missions des Psychologues de l'EN stipulent que les Psys EN
« participent aux travaux de réflexion professionnelle et
contribuent à la formation professionnelle initiale et continue des
personnels de l'éducation nationale. » (Ministère de
l'Éducation nationale, 2017).
Pour cela, les Psys EN pourraient collaborer avec la ou le
référent·e égalité filles garçons afin
d'assurer notamment la formation continue des différent·e·s
professionel·l·e·s et faire remonter les besoins des acteurs et
actrices de terrain.
De plus, il est inscrit dans le point 3.2 du
3ème axe de la convention interministérielle 20132018
pour l'égalité entre les filles et les garçons, les femmes
et les hommes dans le système éducatif, qu'il faudrait :
« Appliquer, au regard des circulaires en vigueur, l'usage de la
féminisation des noms de métiers, fonctions, grades et titres et
utiliser le langage épicène ». Il conviendrait donc,
que les outils des Psychologues de l'EN soient adaptés et
révisés afin qu'ils conviennent aux deux sexes. Alpheratz (2017)
a même proposé pour « une langue plus neutre »,
la création et l'utilisation d'un genre neutre. L'informatisation
des questionnaires d'intérêts
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devrait permettre d'adapter ceux-ci aux élèves.
De même, les documents fournis aux élèves devraient
être rédigés avec une vraie neutralité (utilisation
de termes épicènes et inclusifs). Que cela soit en classe avec
les professeur·e·s , en entretiens ou en séance, etc., il
semble important de mettre au courant les élèves sur toutes les
possibilités qui leurs sont offertes. Cela passe d'abord par le fait de
nommer les noms de métiers avec l'emploi des deux genres grammaticaux,
car selon Baudino (2001, cité par ONISEP Picardie, 2014), « ce
qui n'est pas nommé n'existe pas ». Les représentations
de femmes et d'hommes engendrées par une modification du langage
devraient contribuer à l'élaboration d'un prototype des
métiers différents. Or, selon Huteau (2005) dans Guichard et
Huteau (2005) les intérêts professionnels proviendraient de la
congruence entre un prototype des métiers et des filières de
formation et l'image que l'on a de soi. Ces prototypes correspondent aux
portraits types imaginés d'une personne qui exerce une profession ou
s'engage dans une filière de formation. Ces prototypes sont donc
constitués de stéréotypes, et notamment de
stéréotypes sexués. La présentation d'une langue
plus neutre devrait permettre de désexuer les représentations des
élèves et ainsi que leur choix ne soient plus fait pour se
montrer conforme à leur identité sexuée. Le but
étant de contribuer à désexuer les représentations
prototypiques et que l'appariement soi prototype ne se fasse plus sur le
critère du sexe.
Mais, notre TER montre que l'utilisation du genre grammatical
féminin n'est pas suffisant pour développer
l'intérêt des élèves. Si SEP et
intérêts sont liés comme le montrent nos résultats
alors il convient donc de développer des actions en faveur d'une
augmentation des SEP des élèves pour les métiers
considérés comme plus « atypiques ». Pour cela, les
actions mises en place peuvent s'appuyer sur la TSCO de Lent et al. (1994) en
développant en parallèle d'un suivi des élèves des
actions qui développent les expériences de maitrise (visite
d'entreprise, stages, travaux pratiques...), la persuasion sociale
(encouragement et feedback positif...), l'apprentissage vicariant
(témoignage d'ancien·n·e élèves, partage
d'expérience de stages...) et les expériences
émotionnelles et physiologiques (relaxation).
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