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écrire les métiers au genre grammatical masculin et féminin. Quelles influences sur les sentiments d’efficacité personnelle et les intérêts des élèves de 3ème ?


par Justine LefàƒÂ¨vre
INETOP-CNAM - Diplôme d'état de Conseiller d'Orientation-Psychologue 2017
  

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Partie 2 : Cadre Théorique.

1. De la division sexuée de l'orientation à la division sexuée du travail.

1.1. Les représentations des métiers des adolescent·e·s : des représentations sexuées.

Les individus ont tendance à catégoriser le monde afin de mieux pouvoir l'appréhender. La catégorisation engendre des effets de comparaison et de hiérarchisation entre les groupes et est ainsi le prérequis à toute forme de stéréotypes (Berjot & Delelis, 2005). La complexité de l'être humain semble ainsi plus facilement appréhendable, lorsqu'elle est catégorisée en « féminin» et « masculin ». Ces deux catégories construites sont soumises à de nombreux stéréotypes. Les stéréotypes sont définis comme « des généralisations basées sur l'appartenance à une catégorie, c'est-à-dire des croyances dérivées de l'inférence que tous les membres d'une catégorie donnée partagent les mêmes propriétés et sont donc interchangeables. » (Leyens, Yzerbyt & Schadron, 1996, p.31). Certains traits de personnalités sont ainsi plus communément interprétés comme « féminins » et/ou « masculins ». En effet, les hommes se décrivent et sont plus souvent décrits avec des traits « d'utilité sociale » (« indépendant, sûr de soi, dominateurs, agressifs») et les femmes avec des traits de « désirabilité sociale1 » tels que « compatissante » ou « chaleureuse » (Bem, 1977 ; Testé & Simon, 2005, p.82).

Plusieurs critères sont donc utilisés par les personnes pour catégoriser les êtres humains, mais également pour catégoriser les métiers. Selon le modèle explicatif de Gottfredson (1981), les choix d'orientation se font via la création d'une carte cognitive de représentations des métiers qui reposent sur trois domaines : « la compatibilité du sexe perçu de chaque métier avec l'identité de genre, la compatibilité du niveau perçu de prestige de chaque métier avec le sentiment d'avoir les capacités pour accomplir ce travail, et la volonté de faire le nécessaire pour obtenir le travail désiré » (Stevanovic & Mosconi, 2007, p.55). En accord avec ce modèle, une étude islandaise de Vilhjálmsdóttir et Arnkelsson (2007) a montré que les professions2 sont catégorisées par des adolescent·e·s de 15 et 16 ans, en termes « d'utilité sociale », de niveau de prestige et de « féminité/masculinité ». Certains métiers seraient connotés comme étant plus « masculin » que « féminin » et vice versa. Dans cette étude, on constate que les métiers dits « féminins » sont classés par les garçons comme moins prestigieux, moins intéressants et moins

1 Les concepts de « désirabilité sociale» et « d'utilité sociale» s'appuient sur la théorie de la valeur sociale des personnes (voir par exemple, Dubois & Aubert, 2010).

2 Le terme « profession » est ici utilisé comme synonyme de « métier ». Pour plus d'informations sur la distinction entre métier et profession, voir Dubar et Tripier (2008).

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utiles socialement. Les filles quant à elles accordent un prestige plus important aux métiers dits « masculins », mais leur montrent un moindre intérêt.

Bosse et Guégnard (2007) ont démontré que les adolescent·e·s français·e·s ont elles?eux aussi des représentations sexuées des métiers. En effet, selon leur enquête, ces dernier·e·s sont majoritairement d'accord pour associer certains métiers à des traits de personnalités et des qualités qui seraient propres au sexe des individus. Par exemple, les femmes seraient considérées comme douces avec des qualités relationnelles, de service et seraient donc privilégiées pour les métiers en rapport avec le soin, les relations sociales et les enfants. À l'inverse, les hommes auraient des compétences physiques et des connaissances techniques. Ils iraient donc plus typiquement exercer des métiers en lien avec la production et le pouvoir. Bien que les lycéen·ne·s soient d'accord pour dire que ces métiers ne sont pas exclusivement réservés à l'un des deux sexes (elles et ils sont 90 % à considérer qu'il n'y a pas de métiers exclusivement sexués), elles et ils sont cependant 1/3 à se conforter à ces stéréotypes de sexe lorsqu'on leur demande leur projet professionnel.

Les garçons indiquent également majoritairement ne pas vouloir exercer un métier « habituellement occupé par une femme » (Bosse & Guégnard, 2007, p.36). Leur réponse montre une dévalorisation nette des métiers typiquement exercés par les femmes et une conformité aux stéréotypes de sexe : « c'est la honte! ! ! », « cela fait trop faible, pas capable d'exercer un métier d'homme », «je ne suis pas un homosexuel», «je suis plus viril que la moyenne» (Bosse & Guégnard, 2007, p.38). C'est ce que Vouillot (2014, p.43) appelle pour les garçons « la double disqualification », en effet si les garçons choisissent un métier dit « féminin» alors ils sont susceptibles de craindre de ne plus avoir une reconnaissance de « vrai homme » et doivent accepter de subir une dévalorisation sociale. Les métiers dits « féminins » étant souvent perçus comme moins prestigieux socialement (Testé & Simon, 2005).

Les filles, elles seraient plus enclines à exercer des métiers plus communément exercer par les hommes et auraient plus tendance à citer le libre choix et la possibilité d'être l'égal des hommes en exerçant les mêmes métiers qu'eux. Elles citent cependant la difficulté d'accès à de tels métiers face à la « domination masculine » et aux pressions sociétales : pour « prouver que j'en suis capable et que ce n'est pas que pour eux », « c'est ce que je voulais faire au collège, mais à l'armée on m'a dit : «non c'est un métier d'homme» » (Bosse & Guégnard, 2007, p.37).

Fontanini (2015) a également étudié la représentation sexuée des métiers des élèves de primaire et de 3ème. Les résultats de son étude sont cependant plus optimistes sur l'évolution des représentations des jeunes. En effet, elle note que si les élèves classent les métiers en :

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« profession pour les hommes et les femmes, profession plutôt pour les hommes et profession plutôt pour les femmes et pour les deux sexes» (Fontanini, 2015, p.206), les élèves de 3ème et encore plus fortement les filles ont tendance à considérer que les métiers sont mixtes (10 métiers sur les 15 présentés) et se réfèrent à l'importance de l'égalité entre les sexes comme arguments. Il est à noter cependant que bien que n'étant pas l'objet de cette étude, les noms de métiers qui étaient présentés aux élèves étaient pour la plupart rédigés à la fois au genre grammatical féminin et masculin. Il est possible que cette façon de rédiger les noms de métiers ait influencé la représentation des élèves sur les métiers, comme nous le démontrerons dans une autre partie.

Au regard des précédents travaux sur les représentations des adolescent·e·s, nous pouvons nous demander si les représentations sexuées des élèves influencent leur orientation scolaire.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille