Partie 1 : Introduction.
« Le genre masculin, étant le plus noble, doit
prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se
trouvent ensemble» (Claude Favre de Vaugelas, Rem. t. I, p. 130, dans
Pougens, 1647, cité dans Littré, sous l'entrée
prédominer). Cette citation, d'un des premiers
académiciens français s'inscrit dans la thématique de ce
mémoire. En effet, 370 ans ont passé depuis cette affirmation,
pourtant cette règle de la langue française est toujours
d'actualité. Le terme « noble » induit
d'emblée une hiérarchie entre les deux sexes. En français,
au singulier, nous utilisons des genres grammaticaux différents selon le
sexe de la personne à laquelle il est fait référence.
Mais, comment définit-on le sexe d'une personne? La définition du
sexe la plus communément utilisée repose sur le fait que le sexe
renvoie aux attributs biologiques des individus (Centre National de Ressources
Textuelles et Lexicales, s.d.). Sur la base de cette définition
organique, il serait donc difficile d'affirmer si l'on s'adresse à une
femme ou à un homme. Nous nous appuyons donc en réalité
sur d'autres indices pour définir le sexe des personnes. Il convient de
distinguer ce qui est de l'ordre du sexe et du genre. Le concept de genre est
défini entre autres par (Mead, 1935 et Oakley, 1985, cité par
Delphy, 1993) comme l'ensemble des rôles sociaux que la
société attribue aux individus selon leur sexe. Alors que pour
Delphy (1993) et Vouillot (2010, p.61) le concept de genre est défini
comme un « système hiérarchique de normes de
féminité/masculinité qui définissent les
rôles de sexe». Le genre ne renverrait donc pas seulement aux
rôles de sexe, mais au système de norme qui crée ces deux
catégories distinctes. Catégories qui sont
hiérarchisées jusque dans la langue où la règle
actuelle veut que « le masculin l'emporte sur le féminin
».
Le sexe des individus a une influence sur de nombreuses
caractéristiques des personnes dont leur sentiment de compétence
relatif à l'exercice d'un métier (Bandura, 2003) et leurs
intérêts professionnels (Gottfredson, 1981 ; Perdrix, Rossier
& Butera, 2012). Le sentiment de compétence est également
reconnu comme un médiateur des intérêts professionnels
(Lent, Brown & Hackett, 1994). Les psychologues de l'orientation utilisent
des questionnaires d'intérêts dans lesquels figurent des noms de
métier qui sont souvent présentés au genre grammatical
masculin. Récemment, des études ont pourtant montré que
l'utilisation du masculin n'était pas neutre (Chatard, Guimont &
Martinot, 2005 ; Steinbruckner & Thiénot, 2015). Le but de cette
recherche était donc de savoir quels sont les effets de l'utilisation
des noms de métiers mis au masculin et au féminin sur les SEP et
les intérêts professionnels des filles et des garçons. Pour
cela nous montrerons donc d'abord dans une partie théorique comment et
pourquoi l'orientation et le travail connaissent une division sexuée.
Dans une
2
seconde partie, nous proposerons les résultats
d'une recherche, effectuée auprès d'élèves de
3ème à l'aide d'un questionnaire de SEP et
d'intérêts pour les métiers. Puis enfin nous
discuterons ces résultats et proposerons des indications pour la
pratique.
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