§2. Le pouvoir sans limite
Le pouvoir sans limite est la suite logique de ce que nous
venons d'évoquer ci-haut. Sur bon plaisir du Prince, l'Etat de police
« Etat de droit » accorde une large place au droit, qui ne
connaît ni véritable limite juridique à l'action de la
puissance publique, ni réelle protection des citoyens contre le pouvoir.
L'administration dispose d'une totale maîtrise sans être
elle-même forcément tenue au respect de normes qu'elle
édicte, surtout lorsque l'efficacité des mesures prises par elle
est en jeu231. Sur ce, « chaque Prince doit être
caractérisé par le réalisme, l'égoisme, le calcul
des différences au bien et au mal, l'habileté, l'assimilation et
la grandeur232».
227 GABA (L), l'Etat de droit...dans ses conclusions
d'étude menée en ces quatre pays la Côte d'Ivoire, Le Togo,
le Ghana et l'Ouganda.
228 Nous avons montré dans le chapitre introductif
l'abus de droit commise par le terroir des élites qui monopolisent les
instruments légaux...p. 12.
229 Le livre La République « Res Publica » en
1576 défend le pouvoir absolu du monarque et Jacques Bénigne
Bossuet 16271704 est le chantre de la monarchie absolue. Machiavel distingue la
République et la monarchie, fait des éloges aux qualités
et aux comportements du Prince. Thomas HOBBES associe la notion du contrat
social au pouvoir absolu du Léviathan. Hegel (1670-1764) identifie le
rationnel et le réel et consacre la suprématie de l'Etat. JHering
voit aussi dans l'Etat la seule source du droit, in MUTERAHEJURU (A),
Introduction au droit, cour, INES-RUHENGERI, année académique,
2005.
230 Voir notre introduction à la page 3.
231 GABA (L), l'Etat de droit...op.cit. p. 43.
232 Sont ces éloges et comportement que doit faire montre
le détenant du pouvoir « le prince» selon Machiavel.
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Dans cet Etat de droit, toutes les procédures et les
mécanismes de garantie non-juridictionnelles et juridictionnelles du
droit international des droits de l'homme sont consacrés par le
Constituant, la justice qui devrait être une garantie juridictionnelle
est décriée à tous azimuts : « l'absence
d'indépendance, son inféodation au pouvoir politique, corruption
des juges, capacités intellectuelles et techniques des magistrats
douteuses, indigence financière et documentaires des juridictions,
justice inefficace dans la protection de ses droits et au milieu de
l'aspiration générale à plus de justice, une
institution vraiment délabrée233».
L'exercice de ces droits dans l'existence complète devrait d'abord
s'accorder sur une certaine hiérarchie des valeurs que les peuples
s'entendent sur la manière de faire respecter : « une
même conception pratique de l'homme et de la vie ; une même
philosophy of life234».
M. Eya NCHAMA montre que la mise en pratique du droit
d'individus à la liberté d'opinion et d'expression rencontre des
difficultés alors que ceux-ci sont à la base des gouvernements
démocratiques, que malheureusement, l'application de ces droits n'existe
pas dans tous les pays235. Ce qu'il voit de curieux, c'est que
lorsque les peuples africains veulent remettre en question les dictatures qui
depuis les décennies gouvernent la majorité des Etats de ce
continent, l'Europe occidentale travaille à empêcher que se
réalise ce rêve236, alors que les pays
développés devraient plutôt les aider à
développer les sociétés civiles, le pluralisme politique
et de délimiter le mandat politique des élites au pouvoir
totalitaire qui les font stagner dans la misère de sous
développement cause des mouvements de la population237.
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