§2. Le cas des pays sujet d'étude
Le Rwanda, le Burundi et la RDC, réunis en
Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) ont des liens
historiques, géographiques et culturels similaires à tel enseigne
que même les sensibilités des apports politico-juridiques
s'interfèrent au même rythme dans les trois Etats. Apparemment ces
apports ne dépassent pas le cadre juridique élaboré par
les Conventions de 1951 et 1969 en matière de protection des droits des
réfugiés et le HCR peut assister aux
170 Un des exemples illustratifs d'expulsion d'un
étranger pour motif d'ordre public est l'arrêté royal
d'expulsion pris par la Belgique à l'égard de Fikret DONER, de
nationalité turque le 28 septembre 1988 et notifié le 6 mars
1989, L'arrêt 2652 du 26 mai 1989 rejetant sa demande de sursis à
exécution, in DE SCHUTTER (O), VAN-DROOGHENBOECK (S) , Droit
international des droits de l'homme devant le juge national,
préface de Françoise Tulkens, coll. « les grands
arrêts de la jurisprudence belge », LARCIER s.a. Bruxelles, 1999,
p.329.
171 GOY (R), Jurisprudence française sur la qualité
de réfugié, op.cit., p. 945.
172 GOY (R), Jurisprudence française sur la qualité
de réfugié, op.cit., p. 947.
173 A l'ouverture de séminaire des Nations Unies sur la
Création des Commissions régionales des droits de l'homme
à Monrovia le 10 septembre 1979, le président Tolbert,
cité par Kéba MBAYE, s'exprime : « Ce fait que l'Afrique
compte plus de 4 millions de réfugiés... que la plupart de ces
malheureux ont fui leur patrie par ce qu'ils y voyaient refuser leurs droits
fondamentaux en tant que citoyens de leur pays. », MBAYE (K), op.cit, p.
257.
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sessions de leurs organes de détermination de statut de
réfugiés à titre d'observateur, sans voix
délibérative174.
A. Le Rwanda
La Constitution de la république du Rwanda garantit
« de bâtir un Etat de droit fondé sur le respect des
libertés et droits fondamentaux de la personne175 »
et le droit des réfugiés est consacré par la loi n°
29/2006 du 20 juillet 2006 modifiant la loi n° 34/2001 du 5 juillet 2001
sur les réfugiés. La détermination du statut de
réfugiés est faite par un Conseil National pour les
Réfugiés (CNR), un corps de neuf membres en provenance de
diverses institutions étatiques d'administration publique dont un
représentant de la Commission nationale des droits des l'homme. Celui-ci
soumet le rapport d'activité au ministre ayant les
réfugiés et les rapatriés dans ses
attributions176.
La Convention de 1951 et son protocole de 1967 posent les
principes de la protection internationale accordée aux
réfugiés dont le non refoulement, alors qu'un
réfugié à l'encontre de qui il y a des raisons
sérieuses de croire qu'il constitue un danger pour la
sécurité du Rwanda ne peut se prévaloir du droit « de
non-refoulement177 ». Il reste à voir si « les
principes de l'équité de procédures justes et efficaces
» adoptés lors des conclusions du comité
exécutif du HCR sont respectés et appliqués178.
Ce qui est clair, la détermination « prima facie »,
d'octroi collectif de statut de réfugiés peut être faite
par le CNR et la décision devant être approuvée par un
arrêté du ministre179. Le doute plane à ce
niveau de procédure si longue et délai inédit pouvant
être orientée par la politique et la diplomatie des pays d'origine
et d'accueil en défaveur des requérants.
Le principe juridique général du droit de la
preuve reste concomitant avec le droit du demandeur d'asile d'être
entendu et de présenter tous ses arguments liés à sa
demande et la responsabilité des faits est partagée avec la
personne chargée de prendre la décision180. Ce droit
n'est pas totalement garantie, car la CNR examine et analyse la demande d'asile
dans un délai raisonnable, « peut entendre le demandeur et
mener toute enquête sur lui s'il le juge nécessaire
181». Cette alternative de l'entendre ou de ne pas
l'entendre marque assurément l'inefficacité de la
procédure de détermination du statut de réfugiés,
ce qui met en doute son droit d'être une personne
protégée.
174 Article 9 de la loi n° 29/2006 du 20 juillet 2006 sur
les réfugiés au Rwanda, l'article 78 de la loi n° 1/32 du 13
novembre 2008 sur l'asile et la protection des réfugiés au
Burundi prévoit la collaboration étroite de la CCER et le HCR
surtout en cas d'expulsion de réfugiés.
175 Préambule de la Constitution du 4 juin 2003 paragraphe
6.
176 Article 1er, 29 de la loi n° 29/2006 du 20
juillet 2006 sur les réfugiés au Rwanda.
177 Article 23 alinéa 2 de la loi
précitée.
178 HCR, Guide des procédures et critères à
appliquer pour déterminer le statut de réfugié, 1991,
réédité, Genève, janvier 1992.
179 Article 10 alinéa 2 de la loi
précitée.
180 UNHCR, détermination du statut de
réfugié, op.cit., 139.
181 Article 9 de la loi précitée.
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La crise des droits de l'homme dans la région a
occasionné l'exil d'un bon nombre de réfugiés vers le
Rwanda, la détermination de leur statut de réfugiés a
été faite soit collectivement, soit individuellement. L'effectif
en décembre 2012 s'élève à 58.212
réfugiés enregistrés dans les camps, dont 57.957
Congolais, 333 Burundais, et 4.826 demandeurs d'asile. On signale aussi
quelques autres demandeurs d'asile en provenance du Tchad, Erythrée,
Ethiopie, Kenya, Somalie totalisant 27 personnes182. Dans le souci
de garantir ce droit de protection des réfugiés, après la
notification au demandeur de la décision motivée du refus de
statut de réfugiés, cette décision peut être
réexaminée en appel à la Haute Cour dans trente jours de
la notification183. Le MIDIMAR dans ces délais a
enregistré dix-neuf cas d'appel à la Haute Cour selon les
données de la personne chargée de l'éligibilité de
ce ministère.
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