§3. Conditions de reconnaissance du statut de
réfugiés ou de l'éligibilité
Pour toute personne requérante qui a quitté son
pays d'origine à raison d'une crainte fondée de
persécution ou qui a fui un conflit armé, les conditions
d'éligibilité inclusives et non exclusives dont la Convention de
1951 est le fondement, doivent être satisfaisantes pour que celle-ci soit
reconnue en tant que réfugiée107par le pays d'accueil.
Sans trop nous plonger dans la littérature de détermination du
statut de réfugié à ce niveau de travail, les
éléments importants inclusifs d'éligibilité ont
été décrits par cette Convention quoiqu'elle reste
désuète sur certains points108et les Etats parties
devraient les appliquer, vu cette situation de vulnérabilité des
réfugiés sur leur territoire.
Les personnes chargées de prendre la décision
doivent tenir compte des faits et circonstances pertinents qui ont fait que la
personne traverse les frontières et les étudier cas par cas. La
crainte avec raison de persécution, le seuil de la persécution
qui ne soit pas une ébauche de poursuites légitimes des personnes
criminelles et l'analyse des circonstances qui n'équivalent pas à
des persécutions109, sont des éléments
essentiels de déterminer le statut de
réfugié110. Nous avons montré que les crises
ethniques générées en conflits armés ont mis sur
l'exil un nombre illimité de réfugiés111 ce qui
a permis aux autorités habilitées de déterminer
collectivement cet afflux massif de réfugiés. A certains, les
Etats de la région et le HCR leur a accordé le statut de
réfugiés sur une base « prima facie 112 »
(à première vue) qu'ils ont rangé dans les camps. A
d'autres qui ont été accueillis dans leurs familles proches et
ailleurs ainsi que ceux qui avaient commis des crimes qui erraient dans les
forêts environnantes avec leurs armes ne sont pas reconnus comme
réfugiés, d'où la non protection113.
104 L'article 2 alinéa 1 de la Convention de 1969
dispose qu'il faut « les accueillir et leur assurer l'établissement
dans leur droit d'asile ».
105 L'article 2 alinéa 5 prévoit l'admission
temporaire dans le premier pays d'asile et la garantie de non refoulement
pendant la détermination du statut de réfugié.
106 La question des réfugiés rwandais
exilés dans les pays limitrophes ne se résout pas, les
réfugiés tutsi en front armé attaquent leur pays d'origine
en 1990, les réfugiés hutu en FDLR du RDC lancent des attaques
sporadiques vers le Rwanda en 1996-1997, contrairement à ce que
prévoit l'article 29 alinéa 3 de la Charte Africaine de Droits de
l'Homme et de Peuples et l'article 3 alinéa 1 de la Convention de l'OUA
de 1969 qui interdit au réfugié toute activité subversive
dirigée contre un Etat membre de l'OUA.
107 Voir la définition du réfugié selon la
Convention de 1951 ci-haut marquée.
108 NAKACHE (D), op.cit., p. 3, montre que la
définition conceptuelle reste désuète pour certains Etats
signataires et chercheurs académiques et le concept même est sujet
d'acerbes critiques qui exigent une reconceptualisation du droit de
réfugié.
109 A l'exemple des personnes qui fuient les catastrophes
naturelles et les effets indiscriminés d'un conflit armé ou
d'autres catastrophes provoqués par l'homme dont la domination,
l'intervention ou l'occupation étrangère et le colonialisme, in
UNHCR, op.cit., p.40.
110 UNIHCR, Détermination du statut de
réfugié, op.cit., pp. 31-40.
111 L'exemple illustratif est la fuite de plus de 700.000
réfugiés hutu vers le Zaïre après la tragédie
rwandaise de 1994.
112 UNIHCR, Détermination du statut de
réfugié, op.cit., p. 14.
113 Les activités militaires sont incompatibles avec le
statut de réfugiés. A ceux qui résident dans des familles
amies, la demande de statut de réfugié à titre individuel
peut toujours être établie, in UNIHCR, Détermination du
statut de réfugié, op.cit., p.15.
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La grande problématique de ces masses de
réfugiés qualifiés seulement à la première
vue, qui ne sont pas séparés des combattants actifs, auxquels une
détermination officielle de statut individuelle n'est permise en
procédures inclusive ou exclusive, est cette situation dont ils ne
puissent pas jouir de plein droit du statut de réfugiés ; dans
cette impasse, entre l'enclume et le marteau nous réitérons, le
refoulement, l'expulsion, privation de liberté de circulation, de
séjour et d'autres avantages qui les attendent. La qualité de
réfugié doit normalement être établie sur une base
individuelle, cela n'exclut pas pourtant que dans l'exode massif, des membres
du groupe peuvent être considérés individuellement comme
des réfugiés au sens de l'article 1 A(2)114.
Victimes de l'impossibilité d'acquérir le statut
individuel de réfugiés, ils deviennent des indésirables et
sont collectivement et arbitrairement expulsés115, dans des
situations inhumainement préparées contrairement aux obligations
étatiques116. Ici la question politique bat son plein, les
camps des réfugiés sont armés, les pays d'origine ont
droit de poursuite des criminels ou maintenir la sécurité
nationale tandis que les pays hôtes doivent vivre en bonne diplomatie
avec les pays voisins, coup dur alors de détermination de statut de
réfugiés et de protection. Ce qui est encore redoutable, c'est
que même ceux qui ont accédé à la nouvelle
nationalité sont expulsés117 contrairement à ce
que prévoit l'article 33 de la Convention de 1951 et l article 5 de la
Convention de l'OUA de 1969, alors leur détermination devient nulle et
non avenue.
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