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Rapport au savoir chez les enfants Ba-Bongo du village Matagamatsegue. Enquête sociologique en milieu rural au Gabon.


par Guy Laroche Mombo
Université Omar Bongo - Master II en sociologie 2019
  

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Chapitre V

LES POLITIQUES EDUCATIVES EN MILIEU RURAL

Le présent chapitre aborde la question de l'offre scolaire en milieu rural gabonais en général et en particulier celui du village Nzingui où les enfants Babongo de Matagamatsengue sont pour le grand nombre inscrits. Ainsi pour mieux cerner les politiques éducatives en milieu rural, nous nous appuyons sur la loi n°21/2011 du 14 février 2012 portant organisation générale de l'éducation, de la formation et de la recherche. Celle-ci énonce dans les articles 2, 5 et 6 que l'éducation et la formation au Gabon sont obligatoires. De ce fait, l'accès à l'éducation et la formation est assurée à tous les jeunes gabonais ou étrangers résidant au Gabon, âgés de 3 à 16 ans.

En outre, parmi les missions générales de celle-ci, il y a notamment:

- ancrer les apprenants dans leurs racines multi culturelles tout en les ouvrant au savoir et au savoir-faire moderne,

- de promouvoir les langues locales, véhicule essentiel de la culture et des valeurs de chaque civilisation, ainsi que les technologies de l'information et de la communication,

- les infrastructures et les équipements d'enseignements et de formation doivent, à
cet effet permettre, selon les niveaux, l'appropriation des connaissances et des compétences en matière : la langue locale, (...).

Ce bref retour sur la loi n°21/2011 nous permet de voir que celle-ci fait l'éloge d'une école de qualité au Gabon. Nous entendons par `'école de qualité», une école qui offre à tous jeunes résidant sur le territoire gabonais les mêmes possibilités d'accès à la formation, à l'instruction et à l'éducation.

Cependant, peut-on parler d'une adéquation entre la loi n°21/2011 et les réalités scolaires en milieu rural ? Autrement dit, y a-t-il un équilibre entre la théorie, les pratiques pédagogiques et le comportement du gouvernement en termes d'investissement et de planification dans le cadre de l'éducation et la formation au primaire ?

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Dans l'objectif de cerner la réalité du contexte scolaire rural, nous avons été dans deux villages voisins (Mbelnaltembe et Mbinambi) pour une observation plus large et effectué des entretiens avec les enseignants des écoles de ces différents villages.

Ce chapitre consiste donc à mettre en évidence les réalités scolaires en milieu rural gabonais. Dans un premier temps, il est question d'un regard critique à partir des observations de terrain sur l'offre scolaire. Notre regard a porté sur trois aspects que nous estimons comme fondamental pour un système éducatif qui se veut égalitaire: les pratiques pédagogiques, le rythme scolaire et l'accès à la formation ou l'éducation (section 1). Et dans un second temps, nous exposons les incidences de cette offre scolaire. Il est question de démontrer que les insuffisances des politiques éducatives en milieu rural font de cette école, une école ou l'on apprend pour abandonner demain (section 2).

Section 1 : Pratique pédagogique, rythme scolaire autonome et inégal accès à la formation ou à l'éducation

1.1. Des programmes pédagogique et rythmes scolaire autonome

A l'école publique de Nzingui, il n'y a pas une organisation précise sur la progression pédagogique tout au long de l'année. Pour le cas de la 4ème et 5ème année, les cours sont faits sur la base des « notions qui reviennent le plus souvent aux examens de fin d'année ». Cette autonomie de programme se vérifie par l'absence de manuel au programme. Les enseignants ne disposent pas des manuels ou de tous autres outils au programme, ce qui implique que la préparation des cours et les évaluations se font à l'ancienne : c'est-à-dire que chaque enseignant est totalement libre et responsable de la production des savoirs. Ce qui compterait pour les autorités du secteur éducatif ce sont les résultats ; c'est dans cette perspective que le directeur de l'école de Nzingui nous confit :

« (...) les inspecteurs viennent faire de la comédie, ils connaissent les conditions dans lesquelles nous travaillons. Ce qu'ils réclament ce sont les résultats et les bon résultats peut importe comment on travaille. Mais personne ne fait rien pour que ça marche c'est une vrai comédie. C'est la raison pour laquelle chacun évalue à sa manière.

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Et moi j'estime que les résultats ne sont plus fiables, au moins avant tout était plus ou moins uniforme. Aujourd'hui lorsqu'on fait état des conditions matérielles à notre hiérarchie, ils nous demandent de nous équiper nous-mêmes et que cela fait partir de la formation » (directeur de l'école publique de Nzingui).

De plus les enseignants des trois écoles observées s'accordent sur la non application du programme et du non utilisation des cahiers de situation cible dans le cadre des évaluations, ils font «chacun des devoirs comme ils peuvent et ils notent ». À cet aspect vient s'ajouter celui des infrastructures défectueux le manque d'équipement d'enseignements et de formation de première nécessité :

« Déjà il n'y a pas de programme c'est l'enseignant qui fait lui-même son programme, il n'y a pas de manuel quel programme alors ? On donne les cours en fonction des nations prioritaire donc on fait l'essentiel, il y a une masse de notion et des disciplines (...) Comme difficulté en général les conditions de salles de classe (tables banc et tableaux défectueux et les murs délabrés), absence de latrine, des matériaux essentiel tel que la craie et les manuels... tout ça c'est notre propre argent » (maitresse de la 1ère année de l'école publique de Nzingui)

Ainsi, l'Etat peine toujours à améliorer son offre scolaire par un investissement suffisant en matière d'infrastructures et en équipement en matériaux d'enseignement pouvant garantir l'appropriation des connaissances et des compétences dans des conditions saine et de qualité.

Le constat qui est fait de manière générale, montre, que les réalités scolaires sont différentes d'un village à un autre. C'est donc pour dire, qu'en milieu rural le contexte scolaire est variés et qu'il existe, non seulement une inégalité entre les élèves qui évoluent en ville et ceux des villages, mais il y a aussi une inégalité de chance d'accès et de réussite entre les différent élèves qui apprennent en milieu rural. Cela se manifeste par le fait que d'un village à un autre, les réalités scolaire ne sont pas les mêmes. Tel est le cas des écoles des trois villages dans lesquels nous nous sommes rendus.

Premièrement l'école primaire de Mbenaltembe : elle à un bâtiment de trois classe dans lesquelles sont repartie les cinq niveaux et 3 enseignants.

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Lors de nos différentes visites les trois enseignants étaient toujours à leur poste de travail. De plus pour palier au problème de manuel didactique, le directeur de cette école s'est équipé des outils informatiques (ordinateur portable et imprimante) et le rythme scolaire est plus ou moins régulier au-delà des absences de chaque fin de mois lié à la prise de salaire à la capitale provinciale.

« J'ai été obligé de me procuré ces deux appareils pour mieux travailler et venir en aide au collègue et à nos élèves qui manquent un peu de tout en leur fournissant au moins à chaque foi des documents pour des exercices de maison » (directeur de l'école primaire de Mbenaltembe).

Deuxièmement, l'école primaire de Nzingui quant-à-elle a aussi un bâtiment de 3 salles de classes pour les cinq(5) niveaux et trois enseignants affecté, mais il n'y a que deux enseignants qui ont la gestion des cinq(5) niveaux, car le troisième enseignent après la prise de service n'est plus jamais revenu pour répondre à son devoir. On note en plus une insuffisance de manuel au programme. Les deux enseignants ont chacun un manuel « super en mathématique» qui répond aux normes. Mais la préparation des cours se fait à l'aide de tous d'autre manuel pour atteindre l'objectif qui est demandé par leur hiérarchie : « les résultats peu importe comment on les obtient ».

« Ici, les enseignants sont constamment absent, ils viennent sans leur familles, ils peuvent être la durant un moment et ressortent pour des semaines. C'est le cas de la maitresse de 1ère année qui était sortie pour prendre son salaire et là on est déjà à une semaine elle n'est pas toujours revenu ? Vraiment c'est dure chaque année c'est la même chose » (président de la association des parents d'élève de école de Nzingui).

« Mon absence s'explique par la prise de salaire et j'ai profité à faire des achats car ici il y a un problème de route et le ravitaillent alimentaire (...) en réalité il est impossible de rattraper les jours perdu, mais pour celui qui a l'expérience il peut faire la collection des notions prioritaires » (maitresse de 1ère année, école de Nzingui),

Et troisièmement l'école de Mbinambi, à 1 bâtiment de trois salles de classes pour 5 niveaux et deux enseignants dont il n'y a qu'un présent. L'enseignant titulaire (le directeur) est quant à lui absent depuis près de deux (2) mois et celui qui nous a reçu a été victime d'un

accident de circulation et bien que présent dans le village l'école restera fermée le temps de son rétablissement.

« Mon directeur était là le premier mois mais cela peut faire deux mois déjà presque qu'il est absent pour des raisons qui me sont inconnues, (...) l'école est fermée juste pour le temps de convalescence mais dès que possible tout rentrera dans l'ordre, sauf si mon directeur revient entre temps (...) en réalité les outils de travail c'est nous même » (enseignant à l'école de Mbinambi).

On se rend bien compte, que le rythme scolaire et les conditions de travail sont belle et bien fonction du lieu où l'on se trouve. Le calendrier académique tel que conçu de manière à promouvoir et garantir l'idéal d'une école accessible et de qualité tant prôné par le politique sont en milieu rural l'ombre d'eux-mêmes dû à la confrontation aux conditions géographique qui viennent limités une fois de plus la démocratisation scolaire des familles.

Dans l'optique d'un prolongement de cette réflexion, Orphée Martial SOUMAHO MAVIOGA et Dany Daniel BEKALE69 disent que « la demande scolaire au primaire est caractérisée par une offre publique insuffisante » et poursuivent en disant que « l'offre scolaire divise la société gabonaise en classe et ne garantit pas la mixité sociale. Elle apparait comme une politique publique éducative qui participe à la ségrégation sociale et limite l'accès à certains biens et privilèges sociaux aux enfants issus des quartiers populaires »

Dès lors, plus les contextes scolaires sont variés, plus ils sont différents et inégaux : certains favorisent la réussite scolaire et d'autres le décrochage, l'abandon et donc l'échec scolaire. Cet aspect entraine nécessairement des inégalités de chance de réussite au profit des familles qui vivent en ville et qui usent de stratégie en inscrivant leurs enfants dans les meilleurs contextes que ceux du milieu rural.

Par conséquent, les raisons du décrochage ou de l'abandon des élèves Babongo trouvent une part de leur fondement au sein même de l'établissement (« effet établissement »70) pour rejoindre Marie DURU-BELLAT. Car chaque établissement par son

69 Orphée Martial Soumaho Mavioga et Dany Daniel Békale, (2007), « offre scolaire au Gabon et problématique de l'égalité des chances dans l'enseignement primaire », Romaric Franck Quentin de Mongaryas (dir) Refonder l'école gabonaise : Enjeux et perspectives, Saint-Denis, Publibook, Pp 23-41

70 Marie Duru-Bellat, « les causes sociale des inégalités à l'école », Comprendre, n°4, Octobre 2003

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organisation et son fonctionnement particulier, exerce une influence sur le rendement scolaire des élèves. C'est-à-dire sur leur performance ou leur survie dans le monde scolaire.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote