1.3. Les éléments constitutifs de
l'identité de marque
Avant d'observer et de décrire les modèles
d'identité de marque proposés par Aaker (1996) et de Kapferer
(1997), il est intéressant de parcourir les différents
modèles proposés par les chercheurs au travers du tableau
ci-après. Le tableau 1 reprend les éléments constitutifs
de l'identité de marque selon différents modèles
proposés par divers auteurs.
Tableau 1 : Brand Identity Models
Source : Petek et Konecnik Ruzzier (2013)
Des dimensions communes apparaissent dans ces différentes
approches :
- la vision (Melewar, 1993 avec le terme `strategy' ; Ind,
1997 ; de Chernatony, 1999 ; de Chernatony et Harris, 2000 ; Melewar et
Karaosmanoglu, 2006 ; Balakrishnan, 2009 ; de Chernatony, 2010 ; Konecnik
Ruzzier et de Chernatony, 2013)
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- la personnalité (Van Riel et Balmer, 1997 ; Aaker,
1996 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000 ; Kapferer, 1997 ; de Chernatony, 1999 ;
de Chernatony et Harris, 2000 ; de Chernatony, 2010 ; Konecnik Ruzzier et de
Chernatony, 2013)
- la communication (Melewar, 1993 ; Van Riel et Balmer, 1997 ;
Melewar et Jenkins, 2002 ; Melewar et Karaosmanoglu, 2006 ; Balakrishnan,
2009)
- le relation (Aaker, 1996 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000 ;
Kapferer, 1997 ; de Chernatony et Harris, 2000 ; de Chernatony, 2010)
- la culture dans laquelle l'histoire de la marque y est
intégrée (Melewar, 1993 ; Kapferer, 1997 ; Ind, 1997 ; de
Chernatony, 1999 ; Melewar et Jenkins, 2002 ; Melewar et Karaosmanoglu, 2006 ;
de Chernatony, 2010)
Pour mieux comprendre les éléments constitutifs
de la marque, revenons sur deux modèles souvent explorés dans les
recherches que sont le modèle d'Aaker (1996) et le prisme
d'identité de marque de Kapferer (1997).
1.3.1. L'identité de marque selon Aaker (1996)
Aaker (1996) définit la marque comme une «
mental box ». En effet pour l'auteur la marque est «
comme une boîte mentale dans la tête de quelqu'un... Même
après quelque temps, on peut retrouver la boîte, on sait si elle
est lourde ou légère, dans quelle pièce elle est
rangée, si c'est dans la pièce des bonnes boîtes ou celle
des mauvaises boîtes, celle qui vous a laissé un bon ou un mauvais
souvenir. » Aaker voit la marque comme une expérience de
consommation qui va laisser des traces, des souvenirs dans la tête du
client. C'est pourquoi, il est essentiel selon lui que la marque
développe et renforce son « capital de marque » (« brand
equity ») qui est constitué de 4 éléments : la
notoriété, la fidélité, la qualité
perçue et les associations spontanées (Figure 1). La marque est
à la fois objet de consommation par ses produits et sujet agissant en
émetteur de signe.
Selon Aaker (1996), l'identité de marque, est au centre
de l'analyse stratégique de la marque. Elle donne la direction, le but
et le sens que la marque doit prendre. D. Aaker (2003) note que
l'identité de la marque est un ensemble d'associations liés
à la marque qui doivent être développés et retenus
pour une stratégie de marque. C'est un élément central de
la vision stratégique de la marque et le conducteur d'une des 4
principales
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dimensions du capital de marque, à savoir, toujours
selon l'auteur, les associations qui forment le coeur et l'âme de la
marque.
L'identité de marque est un ensemble unique
d'associations que le marketeur aspire à créer ou maintenir pour
déterminer une position que l'entreprise souhaite détenir dans
l'esprit de ses clients. Elle doit contribuer à établir une
relation entre la marque et ses consommateurs en générant une
proposition de valeur impliquant des bénéfices fonctionnels,
émotionnels et d'expression de soi.
Figure 2 : Brand Identity Model Aaker (1996)
Le modèle d'identité de marque d'Aaker (Figure
2) repose sur douze dimensions organisées autour de quatre perspectives.
Elles sont vraiment différentes et ont pour
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objectif commun d'aider le stratégiste à prendre
en considération les différents éléments et
modèles de la marque qui pourront clarifier, enrichir ou
différencier une identité.
Une entreprise doit considérer la marque selon ces
quatre perspectives : la marque en tant que produit, la marque en tant
qu'organisation, la marque en tant que personne et la marque en tant que
symbole.
- la marque en tant que produit :
o définition du produit (1) : à quel(s)
produit(s) la marque est-elle associée ? Visa = carte de crédit,
Apple = ordinateur, iPhone, iPad, Easyjet = lowcost, Uber = taxi...
Un lien fort entre la marque et une classe de produits
signifie que la marque sera évoquée quand la classe de produits
sera mentionnée. Une marque dominante (comme Kleenex = mouchoir en
papier, TippEx = blanco, Ketchup = sauce tomate...) sera souvent la seule
marque évoquée à l'appel de sa classe de produits.
o attributs du produit (2) : les attributs sont directement
liés à l'achat ou à l'utilisation du produit qui procurent
aux clients des avantages fonctionnels et parfois émotionnels. Un
attribut lié au produit peut créer de la valeur en offrant
quelque chose de plus (comme des fonctionnalités particulières ou
des services inattendus) ou tout simplement en offrant quelque chose de plus.
Les publicités TV de l'Apple Watch présentent plus qu'une montre,
elles valorisent toutes les fonctionnalités et les
bénéfices que procure la montre connectée.
o qualité/valeur (3) : la qualité est un
attribut du produit suffisamment important pour être traité
à part. Dans chaque secteur compétitif, la qualité
perçue implique l'acceptation du prix (la marque doit délivrer un
niveau de qualité minimum pour survivre) et sert de socle face à
la concurrence (la marque avec le plus haut niveau de qualité gagne). La
valeur est très proche de la qualité ; elle enrichit le concept
de qualité en ajoutant la dimension de prix.
o usages (4) : certaines marques parviennent avec
succès à définir une utilisation ou application
particulière, obligeant leurs concurrents à travailler autour de
cette réalité.
o
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utilisateurs (5) : une autre approche est le positionnement de
la marque en fonction du type de ses utilisateurs. Certaines marques sont
immédiatement associées à un type d'utilisateurs. Red Bull
s'adresse aux gens en recherche d'adrénaline. Evian s'adresse aux
personnes qui veulent rester jeunes...
o pays ou origine (6) : une option plus stratégique
est d'associer la marque avec un pays ou une région qui va lui
conférer de la crédibilité. Chanel fait
référence au luxe à la française, Tipiak fait tout
de suite penser à la Bretagne... Les produits allemands par exemple sont
souvent associés à une haute qualité et à une plus
grande performance mais à un prix élevé. De nombreuses
recherches explorent les effets du pays d'origine. Nous citerons par exemple
les travaux de Kapferer sur la marque France.
- La marque en tant qu'organisation :
o les attributs organisationnels (7) : cette perspective met
l'accent sur les attributs liés à l'organisation plutôt
qu'à ceux liés aux produits ou services. L'innovation, la
conduite de la qualité, les préoccupations liées à
l'environnement... sont le fruit du travail des collaborateurs de l'entreprise.
Les attributs organisationnels sont plus résistants aux attaques
concurrentielles que les attributs du produit/service. Premièrement il
est plus facile de copier un produit que de dupliquer une organisation.
Deuxièmement, les attributs organisationnels se retrouvent dans toutes
les classes de produits adressées par l'entreprise rendant plus
difficiles la compétition sur une classe unique de produits.
Troisièmement, comme il est difficile d'évaluer les attributs
organisationnels tels que l'innovation par exemple, les concurrents auront du
mal à démontrer qu'ils ont rattrapé l'écart
perçu. Il n'est pas facile de prouver qu'une entreprise est plus
innovante qu'une autre.
o locale vs globale (8) : la marque doit-elle être
globale, aves le prestige et la crédibilité que cela sous-entend
ou au contraire viser et s'adapter à un marché local ? Il s'agit
là d'une question de stratégie qui représente un choix
fondamental pour la marque.
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- La marque en tant que personne :
o la personnalité de la marque (9) : la perspective de
la marque en tant que personne engendre une identité de marque plus
riche et plus intéressante que celle basée uniquement sur les
attributs du produit. Comme une personne, la marque peut être
perçue comme compétente, impressionnante, digne de confiance,
drôle, active, humoristique, décontractée, formelle, jeune
d'esprit ou intellectuelle. La personnalité de marque permet à
ses clients de s'identifier à elle en exprimant leur propre
personnalité. Un client Apple se sent décontracté, pointu,
cool, créatif.
o les relations entre la marque et ses clients (10) : La
personnalité de marque représente les bases de la relation entre
la marque et ses clients et facilite la définition de la communication
autour du produit.
- La marque en tant que symbole :
o l'imagerie visuelle et les métaphores (11) : un
symbole fort apporte de la cohésion et de la structure à
l'identité et rend plus facile l'identification et la
mémorisation. Sa présence peut être un
élément clé du développement de la marque et son
absence peut engendrer un handicap substantiel. La virgule de Nike est sans
doute le meilleur exemple de symbole fort. La simple virgule fait
immédiatement référence à la marque et à ses
attributs.
o l'héritage de la marque (12) : un héritage
significatif peut aussi représenter l'essence même de la marque.
L'histoire de Louis Vuitton et son passé de malletier, notamment pour le
compte de l'impératrice Eugénie, a marqué à jamais
l'identité de la marque de maroquinerie de luxe.
La structure d'identité de marque dans le modèle
d'Aaker inclut une identité principale et une identité
élargie. L'identité principale - centrale, l'essence intemporelle
de la marque - est sensée restée constante tout au long de la vie
de la marque, quels que soient les marchés qu'elle adresse ou les
produits qu'elle propose. L'identité élargie intègre les
éléments de l'identité organisés en groupes
cohérents et significatifs qui apportent texture et
exhaustivité.
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Aaker rappelle et illustre dans son modèle que
l'approche stratégique de l'identité de marque n'est possible
qu'après une analyse approfondie des clients (tendances de
consommations, motivations, besoins insatisfaits, segmentation), des
marchés et des concurrents (image/identité de marque,
forces/stratégies, faiblesses). Il lui apparaît essentiel
également de mener une analyse précise de la marque (quelle image
actuelle ? Quel est son héritage ? Quelle est son histoire, son pays
d'origine ? Ses « success stories » ? Qui sont ses fondateurs...- ?
Quelles sont ses forces et possibilités, ses valeurs organisationnelles
?).
Figure 3 : La marque dépasse le produit. Aaker
(1996) Source Branding Management (Lewi et Lacoeuilhe)
Aaker (1996) complète son modèle de
l'identité de marque en intégrant huit facettes liées
à la marque et qui gravitent autour du produit (Figure 3). Les huit
facettes Ð la personnalité de la marque Ð la symbolique de la
marque Ð la relation avec les clients Ð les bénéfices
émotionnels Ð la valorisation personnelle Ð l'identité
des consommateurs Ð le pays d'origine Ð le rôle de l'entreprise -
jouent un rôle prépondérant dans l'approche
stratégique de l'identité de marque. Même si le produit est
au centre de la stratégie, les huit dimensions qui gravitent autour sont
source de création de valeur et forment un ensemble d'associations
mentales qui vont aider à définir la place de la marque dans
l'esprit des consommateurs et sur un marché, qui accompagneront la
relation avec le client et détermineront les axes de communication et
les investissements financiers, structurels et organisationnels à
consacrer.
Au même titre qu'Aaker (1996) et son système
d'identité de marque, Kapferer (1997) place l'identité dans une
approche stratégique de marque émettrice et a
développé un système d'identité autour de six
factettes.
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