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L'effectivité de la répression du détournement de deniers publics au Gabon.


par Junior Arnaud Landry ONDO NDOUTOUMOU
Université de Yaoundé II/Soa - Master professionnel en Droit Contentieux Fiscaux, financiers et des Comptes Publics 2015
  

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Section II : L'avilissement de la sanction par le manque d'indépendance du juge

L'indépendance d'un organe aussi sensible que l'organe judicaire est d'une extrême importance aux fins de consolidation de l'Etat de droit. C'est à travers le juge répressif que la sanction de la société à la suite d'une infraction d'un de ses membres prend corps. Dans le cas du Gabon, on vient à regretter l'avilissement de la sanction pénale en matière de détournement de deniers publics, faute à une dépendance fonctionnelle (paragraphe I) et organisationnelle du pouvoir judiciaire (paragraphe II) vis-à-vis de l'exécutif.

Paragraphe I : La dépendance fonctionnelle du pouvoir judiciaire

Le terme dépendance qui vient du verbe dépendre, s'entend ici comme le lien entre une chose et ce qui la régit153. Le travail qui sera le nôtre se fera un devoir d'éclairage de cette analyse. La bonne administration de la justice au Gabon est la prérogative du le Conseil Supérieur de la Magistrature154 par l'entremise de son président. Cette dernière veille à une bonne gestion du corps judiciaire en l'organisant et en permettant un accès facile pour la population à la justice. Malheureusement, la capacité pour les institutions judiciaires d'assurer l'accessibilité à la justice pour la population demeure problématique. Pour comprendre comment une telle situation existence dans l'environnement de la justice gabonaise notre

151 Au sujet de la plainte déposé par le mouvement ?Stop pillages ?, Marc ONA ESSANGUI et MOUKAGNI IWANGOU contre Marie- Madeleine MBOURANTSUO. Le procureur général près de la cour d'Appel au d'office procureur général près de la Haute Cour de justice ayant le pouvoir de demander à l'autorité compétente de convoquer les magistrats pour la comparution de l'accusé, trouva plus aisé de dire que la HCJ n'est pas une juridiction ayant un siège permanent et que sa mise en oeuvre ne dépend pas de lui. Comment entrevoir une telle ironie étant donné que le Ministère public dont il a autorité (Art.31 du Code de procédure pénal) peut se saisir d'office. Ceci est encore plus évident étant donné que l'accusé a fait l'objet d'une mise en examen par la justice française pour les mêmes faits en avril 2017. Par cette démarche, le procureur général près de la Cour d'appel pense-t-il que les charges retenues contre l'accusé en France ne sont pas d'application suffisante en droit gabonais pour demander la mise en place de la HCJ. Cet argumentaire semblerait peu de valeur étant remarqué que le droit gabonais est d'inspiration française et le détournement de deniers publics pour ne citer que cette charge, est conçu entendu de la même manière par le Code pénal gabonais et français.

152 152 J. OWONA, Droits Constitutionnels et institutions politiques du monde contemporain, op. Cit., p.651.

153 Dictionnaire Larousse, Maxi poche 2010, p.386.

154 Art.2 Loi organique n° 2/93 du 14 avril 1993 fixant la composition, l'organisation et le fonctionnement du conseil supérieur de la magistrature, op.cit.

Présenté et soutenu par Mr. ONDO NDOUTOUMOU Junior Arnaud Landry Page 55

LA REPRESSION DU DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS AU GABON

analyse nous permettra de voir de prime abord la gestion du pouvoir de nomination des magistrats (1) in fine l'assujettissement du pouvoir judiciaire (2).

1. La gestion du pouvoir de nomination des magistrats

La Constitution gabonaise prévoit que la gestion de la justice est fixée par une loi organique155. En effet, l'article 2 de la loi organique fixant la composition, l'organisation et le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature citée plus haut confie la gestion de la justice à cet organe décisionnel précité. Dans le cadre de cette étude le terme gestion peut - être considérer comme étant « l'action (...) d'administrer 156». Ladite administration de la justice consiste pour le Conseil de la Magistrature de statuer « sur tes intégrations, les nominations, les affectations, les avancements et la discipline des magistrats ». C'est dire que cette institution détient la lourde charge d'assurer une organisation efficiente de la justice au Gabon. En effet, la Constitution gabonaise permet d'assurer une certaine autonomie de gestion de la justice par le Conseil. En pratique, cette existence constitutionnelle de cette prérogative accordée au Conseil dont le Président de la République en sa qualité de président dudit Conseil semble desservir la justice et d'autre part, rendre impossible l'accès de la population à la justice dans certaine situation. En effet, tout d'abord, le rôle du pouvoir judiciaire est de rendre justice à la société l'aisée par la violation d'un individu de la loi en vigueur. Mais depuis la mise en place de la première organisation de la justice au Gabon157 en matière de détournement de deniers publics, il n'existe aucune jurisprudence sur laquelle s'appuyer ou connue pour permettre de mieux édifier le fonctionnaire ou tout citoyen sur la sévérité de la loi pénale mise en pratique. Ceci est incompréhensible dans la mesure où il existe un arsenal juridique suffisant pour poursuivre et privé de liberté tout contrevenant. Il existe un difficile « accès de la population gabonaise aux décisions de justice et à l'information judiciaire de manière générale 158». Comment donc concevoir une justice qui ne produit de jurisprudence qui est censé être « le témoignage juridique » de l'activité de la justice dans une société. En sus, le bon usage du pouvoir de nomination des magistrats dont bénéficie le pouvoir exécutif (dès l'instant qu'il est détenu par le Président de la République)

155 Art. 72 de la Constitution du 26 mars 1991 « La composition, l'organisation et le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature sont fixés par une loi organique ».

156 Dictionnaire Larousse, Poche 2011, p.368.

157 Organisation qui date de 1970, bien que la loi constitutionnelle n°68-60 du 14 décembre, affirme déjà l'existence d'un pouvoir Judiciaire indépendant et que le décret-loi n°001/PR du 13 décembre 1960 organisait les juridictions de la république gabonaise. Fautes de cadres judiciaires compétents, le jeune Etat n'a pas assumer à ce moment-là pleinement sa souveraineté judiciaire (vis -à- vis de l'ancienne métropole). V. A. NKOUROUNA, Organisation judiciaire au Gabon, Op.cit., pp.3-4.

158 Rapport de la B.A.D, profil de Gouvernance (Bureau régional de Libreville), Octobre 2005, pp.35-36.

Présenté et soutenu par Mr. ONDO NDOUTOUMOU Junior Arnaud Landry Page 56

LA REPRESSION DU DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS AU GABON

est un frein à une liberté de la justice. En France, depuis la loi du constitutionnelle du 23 juillet 2008, il est mis fin à la présidence du Conseil Supérieur de la Magistrature du Président de la République pour le remettre à un magistrat, en l'occurrence le premier président de la Cour de cassation. Par ce fait, l'administration de la justice en France est remise aux mains des acteurs du pouvoir judiciaire. Ceci permet donc à ceux qui sont les premiers bénéficiaires d'une bonne gestion de la justice de procéder à la réalisation de cette dernière. Hors, dans le cas du Gabon, la répression du détournement de deniers publics peine à être effective à cause de l'inaction de celui qui détient le pouvoir de mettre en place la juridiction qui en a compétence, en ce qui concerne les membres du Gouvernement, les hauts fonctionnaires des institutions et le Président de la République (en cas de haute trahison). Cet état des choses permet indirectement de voir ces justiciables exemptés de possibilité de condamnation définitive quel que soit la responsabilité dont ils sont sujet dans une affaire de détournement de deniers publics. Dans un semblant de réponse aux cris d'injustice du peuple aux fins de tentative de redorer le blason d'une justice perçue comme partisane. Depuis, plusieurs mois, des anciens membres du gouvernement et de hauts fonctionnaires soupçonnés de détournement de deniers publics demeurent sous mandat de dépôt159 . Bémol, ils demeurent sans possibilité de voir leur culpabilité retenue ou levé par la justice lors d'un procès équitable. C'est pour cela que certaines des affaires pendant devant la justice reste au poids-mort à cause de l'ombre de l'Exécutif qui plane aux fins d'assujettir la justice à sa volonté.

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