L'exercice de la contrainte par l'union africaine sur ses états membres.par Aubain Wilfried NGOULOUGOU Université de Douala (Cameroun) - Master 2 recherche en droit public international 2020 |
PARAGRAPHE 2 : LES AUTRES MÉCANISMES CONSACRÉSL'UA ne se limite pas qu'aux mécanismes consacrés par son Acte constitutif. Il en existe qui sont même antérieurs à l'AC.UA et donc en vigueur depuis l'ère de l'OUA248(*). Ceci n'a guère empêché que l'UA ait instauré de nouveaux mécanismes. L'on doit en conséquence distinguer les mécanismes classiques (A) des mécanismes émergents (B). A. LES MÉCANISMES CLASSIQUESL'UAa hérité de l'OUA, certains mécanismes de contrainte. Y faire recours nécessite le respect des procédures tracées à cet effet. En effet, la consécration de ces mécanismes a emporté avec elle, la prévision des cheminements pratiques. Il s'agit du système de communication (1) etdu système des rapports (2). 1- LE SYSTÈME DE COMMUNICATION : UN MÉCANISME ÉTATIQUE La communication est davantage consacrée par la CAfDHP, dans son chapitre 3 qui traite « de la procédure de la Commission ».Au terme de ladite Charte, tant les États parties que les États tiers ont la possibilité d'entamer un processus de communication. Pour les États parties à la Charte, celle-ciprévoit en premier ressort, une communication entre eux (c'est-à-dire, entre un État destinateur et un autre destinataire)249(*). En second ressort, la CAfDHP octroie aux États en cause un moyen au terme d'un certain délai, d'entamer une communication près des organes compétents en la matière250(*).Cependant, la CAfDHP prévoit néanmoins la possibilité d'une communication directe entre un État destinateur et les organes concernés251(*). Quant auxcommunications des tiers, elles prêtent à équivoque. D'abord,elles sont examinées par la CADHP sur la demande de la majorité absolue de ses membres au sens de l'article 55 de la CAfDHP252(*).Ensuite, elles sont examinées seulement après observation des conditions requises telles que stipulées par l'article 56 du même texte253(*). Quid des rapports ? 2- LE SYSTÈME DE RAPPORTS Les rapports sont des « comptes rendus » dit Gérard CORNU254(*). Cependant, il faut distinguer les rapports de l'État sur lui-même,des rapports d'organes sur les Étatset leurs activités. Deux textes sont appliqués au sujet des rapports d'État. Il y a premièrement la CAfDHP qui exige à chaque État partie de présenter un rapport biannuel à la CADHP255(*). Il y a secondairement la Charte africaine des valeurs et principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local qui elle, exige des États parties, un rapport triennal256(*)soumis à la Commission de l'UA. Le but est de faire connaître les mesures prises en vue de nationaliser les droits et libertés, et les principes aménagés par ces textes. S'agissant des rapports d'Organes, la CADHP et la Commission de l'UA en présentent un à leur tour à la Conférence, suite à leurs différentes investigations et activités. En effet la CAfDHPprévoit que la CADHP établisse un rapport relatant les faits et conclusions auxquelles elle a abouti257(*). Lequel rapport est envoyé aux États concernés et communiqué à la Conférence. Elle prévoit en outre, que la CADHP soumette à la Conférence, un rapport annuel sur ses propres activités258(*). De son côté, la Charte africaine des valeurs et principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local prévoitque laCommission de l'UA soumette un rapport à la Conférence mais cette fois, par le lien du Conseil exécutif259(*).Que dire desmécanismes émergents ? * 248 Il faut rappeler que la Charte de l'OUA ne consacrait aucun mécanisme de coercition sur ses États membres mais dans ses textes connexes. * 249Voir supra CAfDHP, art 47 : « Si un État partie à la présente Charte a de bonnes raisons de croire qu'un autre État également partie à cette Charte a violé les dispositions de celle-ci, il peut appeler, par communication écrite,l'attention de cet État sur la question. Cette communication sera également adressée au Secrétaire Général de l'OUA et au Président de la Commission. Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la communication, l'État destinataire fera tenir à l'État qui a adressé la communication, des explications ou déclarations écrites élucidant la question, qui devront comprendre dans toute la mesure du possible, des indications sur les lois et règlements de procédure applicables ou appliqués et sur les moyens de recours, soit déjà utilisés, soit en instance, soit encore ouverts ». Il faut par contre savoir que l'appellation de « Secrétaire Général » de l'OUA est caduque. En effet, l'UA a érigé le Secrétariat général de l'OUA (article 7(3) de la Charte de l'OUA) en Commission (art. 5 (1) (e) de l'AC.UA) qui assure dorénavant le rôle du Secrétariat de l'Union (art. 20 (1) de l'AC.UA) et qui est sous l'autorité d'un Président (art. 20 (2) de l'AC.UA). De ce fait, partout où il sera mentionné « Secrétaire Général de l'OUA », il s'agira actuellement du Président de la Commission de l'UA. * 250Ibid., art. 48 : « Si dans un délai de 3 (trois) mois à compter de la date de réception de la communication originale par l'État destinataire, la question n'est pas réglée à la satisfaction des deux États intéressés, par voie de négociation bilatérale ou par toute autre procédure pacifique, l'un comme l'autre auront le droit de la soumettre à la Commission par une notification adressée à son Président, à l'autre État intéressé et au Secrétaire Général de l'OUA. ». * 251Ibid., art 49 : « Nonobstant les dispositions de l'article 47, si un État partie à la présente Charte estime qu'un autre État également partie à cette Charte a violé les dispositions de celle-ci, il peut saisir directement la Commission par une communication adressée à son Président, au Secrétaire Général de l'OUA et à l'État intéressé. ». * 252Ibid., art. 55 : « 1. Avant chaque session, le Secrétaire de la Commission dresse la liste des communications autres que celles des Etats parties à la présente Charte et les communique aux membres de la Commission qui peuvent demander à en prendre connaissance et en saisir la Commission. 2. La Commission en sera saisie, sur la demande de la majorité absolue de ses membres. » * 253Ibid., art. 56 : «Les communications visées à l'article 55 reçues à la Commission et relatives aux droits de l'homme et des peuples doivent nécessairement, pour être examinées, remplir les conditions ci-après : 1. Indiquer l'identité de leur auteur même si celui-ci demande à la Commission de garder l'anonymat ; 2. Etre compatibles avec la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine ou avec la présente Charte ; 3. Ne pas contenir des termes outrageants ou insultants à l'égard de l'État mis en cause, de ses Institutions ou de l'OUA ; 4. Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par des moyens de communication de masse ; 5. Etre postérieures à l'épuisement des recours internes s'ils existent, à moins qu'il ne soit manifeste à la Commission que la procédure de ces recours se prolonge d'une façon anormale ; 6. Etre introduites dans un délai raisonnable courant depuis l'épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Commission comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine ; 7. Ne pas concerner des cas qui ont été réglés conformément soit aux principes de la Charte des Nations Unies, soit de la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine et soit des dispositions de la présente Charte. » . * 254 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, op. cit., p. 850. Pour lui, dans un premier sens, les rapports sont des « documents écrits destinés à donner diverses informations sur certains faits qui concernent le rapporteur.» Dans un second sens, ce sont des « conclusions d'une personne ou d'une Commission chargée par une autorité d'étudier pour celle-ci un certain point ou une certaine question en vue de lui faire connaître la vérité et de lui proposer une action appropriée. » * 255 CAfDHP, art 62 : « Chaque État partie s'engage à présenter tous les deux ans, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente Charte, un rapport sur les mesures d'ordre législatif ou autre, prises en vue de donner effet aux droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte. » * 256Charte africaine des valeurs et principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local, art 19 (1): « les États parties soumettent à la Commission tous les trois ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la Charte, un rapport sur les mesures législatives et autres prises pour assurer la mise en oeuvre des principes et des engagements de la présente Charte. » * 257 Voir supra CAfDHP, art 52: « Après avoir obtenu, tant des États parties intéressés que d'autres sources, toutes les informations qu'elle estime nécessaires et après avoir essayé par tous les moyens appropriés de parvenir à une solution amiable fondée sur le respect des droits de l'homme et des peuples, la Commission établit, dans un délai raisonnable à partir de la notification visée à l'article 48, un rapport relatant les faits et les conclusions auxquelles elle a abouti. Ce rapport est envoyé aux États concernés et communiqué à la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement. ». * 258Ibid., art. 54 : « La Commission soumet à chacune des sessions ordinaires de la conférence des Chefs d'État et de gouvernement un rapport sur ses activités. ». * 259 L'article 19 (2) de la charte en référence dispose que « la Commission prépare et soumet à la conférence par le biais du conseil exécutif, un rapport de synthèse de la mise en oeuvre de la présente Charte, pour examen. » |
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