L'exercice de la contrainte par l'union africaine sur ses états membres.par Aubain Wilfried NGOULOUGOU Université de Douala (Cameroun) - Master 2 recherche en droit public international 2020 |
PARAGRAPHE 2 :LE RÔLE DE PROTECTION DESINSTITUTIONSJUDICIAIRES Les institutions de justice relèvent du pouvoir judiciaire. Vu l'existence de ce dernier au sein de l'UA, il devient évident que la séparation des pouvoirs y est une fois de plus admise, eu également égard à la spécialité de fonctions des organes et Instituions. Ceci justifie le faitqueles textes, les États et les citoyens africains soient judiciairement protégés. En effet, le pouvoirjudiciaire est le « gardien de la loi » et des droits humains. Parmi ses institutions, certains sont principalement judiciaires (A) et d'autres consultatif (B). A. LES PRINCIPALES INSTITUTIONS JUDICIAIRESL'UA est équipée d'Institutions quasi-judiciaires qui s'avèrentles plus anciennes de toutes. Ces Institutionssont emboîtées par une autre, plus récente mais cette fois-ci proprement judicaire.Il s'agit respectivement de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (CADHP) etdu Comité africain d'experts sur les droits et le bien-être de l'enfant (CAEDBE) (1), et dela Cour africaine des droits de l'Homme et des peuples (CrADHP) (2).
La CADHP est le superviseur et la garante de la CAfDHP226(*). En vertu de cette Charte, la CADHP est compétente surlesprincipaux points suivants : la promotion et la protection des droits de l'Homme et des peuples puis, l'interprétation de la Charte227(*).Simultanément,la Charte encourage le règlement pacifique des différends tel que l'envisagent les principes de l'Acte constitutif de l'UA228(*) et ceux de la Charte des Nations Unies229(*). Il incombe donc à la CADHP de faire connaître et de veiller sur les droits de l'Homme et les libertés fondamentales en Afrique. C'est sans doute en allant dans cette optique que la Charte prévoit une procédure de communication qui permet aux États, aux organisations reconnues par l'UA, aux autres personnes morales et aux personnes physiques de déposer une plainte près de la CADHP pour violation d'un ou plusieurs droits énoncés dans la Charte par un État qui en est partie230(*). Par ailleurs, chaque État partie est tenu de rendre tous les deuxans, unrapport près de la CADHP sur les mesures législatives ou autres231(*), prises en vue de rendre effectif les droits et les libertés garantis par la Charte. Après ceci, la CADHP formule des observations ?nales. Celles-ci ont valeur de recommandations. D'où le statut d'institution quasi-judiciairede la CADHP. Pour ce qui est du CAEDBE, ses charges proviennent de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant. En effet, sa mission consiste d'abord àpromouvoir et protéger les droits consacrés dans la Charte232(*). Ensuite,elle consiste àsuivre l'application desdits droits et veiller à leur respect. Enfin, à interpréter les dispositions de la Charte à la demande des États parties, des institutions de l'UA ou de toute autre personne ou institution reconnue par l'UA. De ce qui précède, on retient que la CADHP et le CAEDBE ont respectivement pour outil de contrainte, la CAfDHP et la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant. C'est d'ailleurs d'où ils tirenttous leurs pouvoirs. Par contre, à l'exemple de l'aboutissement de la procédure communicationnelle de la CADHP, l'on peut assez aisément déduire qu'elle ne jouit par des compétences juridictionnelles. Serait-ce parce qu'il existe une Institution compétente en la matière ? Il reste donc à le savoir.
LaCrADHPest une Institution judiciaire à part entière dont les décisions ont autorité de chose jugée. Ces décisions peuvent donner lieu à des indemnisations ou à des réparations. La CrADHPcomplèteet renforce alors les fonctions de la CADHP. Cependant dans sa position de contrefort de la CADHP, la CrADHP ne limite pas sa manoeuvre qu'à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples.Elle l'étend jusqu'à l'AC.UA ; la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant; le Protocole à la CAfDHP relatif aux droits des femmes en Afrique... Ceci signifie que la CrADHP est compétente pour connaître de tous les différends et affaires relatifs à l'interprétation et à l'application de textes ci-dessus, de même pour toutes questions de droitinternational. En effet, tous les sujets du droit international africain y compris les citoyens et les ONG, ont qualité pour saisir la CrADHP233(*) et à son tour, celle-ci requiert toutes les compétences pour contraindre ceux-là au respect des textes qu'elle régit judiciairement. En bref, la CrADHP protège les droits de l'Homme en Afrique. Au final, il a été recensé la CADHP, la CAEDBE et la CrADHP comme principales institutions judiciaires de l'UA. Les deux premières étant des institutions quasi-judiciaires et la dernière, une institution judiciaire proprement dite. Cependant, à côté de celles-ci, il y a d'autres institutions qui participent au pouvoir judiciaire de l'UA maisde manière consultative. * 226 La CADHP est le texte le plus grand et le plus général de l'UA en matière des droits de l'Homme. * 227 Voir l'article 45 de la Charte. * 228 Voir l'article 4 (e) de l'Acte constitutif. * 229 Voir l'article 33 de la Charte des Nations Unies. * 230 Par contre, la CAfDHP exige l'épuisement des voies de recours internes en stipulant dans son article 50 que : « la Commission ne peut connaître d'une affaire qui lui est soumise qu'après s'être assurée que tous les recours internes, s'ils existent, ont été épuisés, à moins qu'il ne soit manifeste pour la Commission que la procédure de ces recours se prolonge d'une façon anormale. » Cependant, le principe de l'épuisement des voies de recours internes est limité par certaines exceptions à savoir : lorsqu'il s'agit d'une atteinte à l'intégrité personnelle du requérant ; lorsque celui-ci est accusé de trahison envers l'État. En outre de ces deux exceptions, le requérant peut exploiter la déclaration préalable pour se passer de l'épuisement des voies de recours internes. Les États quant à eux, sont régis par l'article 49 de la Charte. * 231CAfDHP,art. 62 : « Chaque État partie s'engage à présenter tous les deux ans, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente Charte, un rapport sur les mesures d'ordre législatif ou autre, prises en vue de donner effet aux droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte. ». * 232Il s'agit particulièrement d'abord de recueillir et documenter des informations, faire procéder à des évaluations interdisciplinaires des problèmes africains dans le domaine des droits et de la protection de l'enfant en Afrique ; d'organiser des réunions ; d'encourager les Institutions nationales et locales compétentes en matière de droits et de la protection de l'enfant et, au besoin, donner son avis et faire des recommandations aux États concernés. Ensuite, d'élaborer et énoncer des principes et des règles visant à protéger les droits et le bien-être de l'enfant en Afrique. Enfin, de coopérer avec d'autres Institutions et organisations africaines, internationales et régionales oeuvrant pour la promotion et la protection des droits et le bien-être de l'enfant. * 233 Il s'agit précisément des États parties au Protocole et les organisations intergouvernementales africaines. Cependant, Les organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d'observateur auprès de la Commission et les citoyens des États parties ayant déclaré accepter la compétence juridictionnelle de la Cour peuvent également la saisir directement, conformément à l'article 34 (6), qui prévoit le principe de la déclaration préalable. |
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