Les droits de défense dans le contentieux fiscal.par Mohamed Heni KHANFIR Faculté de Droit de Sfax - Mastère de recherche en droit public 2018 |
Paragraphe 2 : Le respect du principe de la contradiction dans la phase juridictionnelle:Dans le cadre de la phase juridictionnelle, le principe de contradictoire « implique que chacune des parties soit en mesure de connaître et de discuter les prétentions, les preuves et l'argumentation de son adversaire. En plus, le juge ne peut se prononcer sur un litige en se basant sur des moyens ou des documents invoqués ou produits par une partie que si son adversaire en a été informé et a été même de discuter»149(*). Le respect de ce principe ne s'impose pas seulement aux parties en litiges, il s'impose également au juge qui doit veiller au bon déroulement de la contradiction. Considéré comme étant « l'âme de procédure juridictionnelle »150(*), le principe de contradictoire apparaît dans les relations entre le contribuable et l'administration fiscale à travers les différentes règles et dispositions légales qui organisent le contentieux fiscal. Le respect du principe de contradictoire dépend en premier lieu de l'obligation d'informer le défendeur à l'action de l'exercice d'une action en justice à son encontre. D'ailleurs, dans le contentieux fiscal, le défendeur est l'administration fiscale. Ce qui constitue une dérogation au principe en vertu duquel le demandeur à l'obligation est le demandeur à l'action. En effet, en principe celui qui saisit le juge est le demandeur à l'obligation, c'est-à-dire la personne qui nie l'existence de l'obligation et qui la conteste.Or, l'administration fiscale qui réclame une créance d'impôt, se trouve dispensée de recourir au juge à cet effet en occupant la place confortable du défendeur à l'action151(*). Le droit d'information dont bénéficie l'administration fiscale et qui constitue une première manifestation du principe de contradictoire entre les parties en litige est bien garanti. En effet, dans les dispositions du CPCC sont applicables au contentieux fiscal tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du CDPF. D'ailleurs, la requête du contribuable est considérée comme étant nulle à la lumière de l'article 71 du CPCC si jamais l'une des mentions obligatoires prévues par l'article 70 du CPCC est omise. Le respect de la contradiction entre les deux parties est garanti par le droit reconnu au contribuable de prendre connaissance des pièces et des documents produits par l'administration fiscale conformément aux dispositions de l'article 4 du CPCC. De même, il peut consulter l'intégralité du dossier de l'affaire. Une pareille mesure ne peut que conforter le droit du contribuable à avoir accès à tout son dossier. Par ailleurs, cette contradiction est garantie au profit du contribuable à travers l'échange des conclusions en défense qui est prévu par l'article 83 du CPCC. Ainsi, le débat contradictoire se déroule d'une façon écrite. En effet, le caractère écrit de ce débat ne peut que mieux satisfaire les droits des deux parties dans la mesure où il permet d'éviter les écueils pouvant résulter de l'oralité des débats. Le caractère écrit du débat permet au contribuable de garder une fidèle référence de la thèse avancée par l'administration fiscale et sur laquelle il peut s'appuyer pour préparer son réplique152(*). La garantie de l'effectivité de la contradiction dans les relations entre deux parties dépend de l'information à laquelle le contribuable a le droit de se faire communiquer par l'administration fiscale. En effet, l'intérêt du débat contradictoire qui se déroule lors de l'audience réside dans le fait que le contribuable peut discuter tous les éléments desquels l'administration fiscale s'est servie pour l'imposer et il peut exposer tous les moyens qui démontrent le caractère exagéré de son imposition. Le respect du principe de la contradiction dans les relations entre le contribuable et l'administration fiscale est garanti également par le fait que le tribunal ne peut trancher la contestation qui lui est soumise que sur la base des mémoires et des documents qui ont été régulièrement communiqués aux parties et discutées par elles. Par conséquent, le juge ne s'appuie pas sur des arguments ou des pièces justificatives présentées par l'une des parties à l'insu de l'autre pour fonder son jugement.153(*) Le respect du principe de contradictoire lors de la phase du contentieux dépend également de l'attitude adoptée par le juge. Ce dernier est également tenu par le principe de la contradiction et ce de deux manières. En premier lieu, le juge doit s'assurer, lors du déroulement de l'instance, que le contribuable est acquitté de son obligation d'information et de communication réciproque et qu'il a pu faire valoir son droit à la défense. De ce fait, il doit permettre au contribuable de produire ses mémoires en réplique et ses moyens de la défense et de la preuve dans un délai suffisant et raisonnable, à moins qu'il ne considère que l'affaire soit prête pour être tranchée. En second lieu, le juge est tenu de se plier aux exigences du principe de contradictoire en rendant son jugement. Ainsi, le jugement doit être rendu conformément aux dispositions de l'article 123 du CPCC, qui exige que « tout jugement doit contenir l'indication du tribunal qu'il a rendu, les noms, les prénoms, qualité et domiciles des parties154(*), l'objet du litige, le résumé des dires des parties, les motifs en fait et en droit...». Le juge est donc tenu non seulement par l'obligation de résumer tous les moyens de la défense, mais également tenu d'y prendre un à un, ou du moins de répondre aux moyens les plus importants155(*). Il est également tenu de prendre en considération en rendant son jugement tous les documents et pièces justificatives faute de quoi son jugement est infirmé pour violation des droits de la défense et non le respect du principe dela contradiction156(*). * 149 Kammoun (S), Le procès fiscal, thèse en vue de l'obtention du doctorat en droit public, Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales de Tunis, 2006, p.243.244. * 150 Ibid, p.243. * 151 Ibid, p.p.57.58. * 152 Kammoun(S), Thèse précitée, p.248. * 153 T.A, affaire n°32434, rendu le 13 novembre 2000 (arrêt inédit). * 154 T.A, affaire n°687, rendu 26 novembre 1987/ V. - ÕÎÑí (ã) ? "ÇáãÑÇÚÇÊ ÇáãÏäíÉ æÇáÊÌÇÑíÉ æÇáÅÏÇÑíÉ æÇáÌÈÇÆíÉ: ÏÑÇÓÉ í ÇáÞÇäæä ÇáÊæäÓí æÇáÞÇäæä ÇáãÞÇÑä" Ï.ä ÊæäÓ 2001 Õ.1211. * 155 T.A, affaire n°31595, 17 avril 2000, Ibid. * 156 Ibid. |
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