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L'Union Africaine face aux graves violations des droits de l'homme.


par Paul Sékou YARADOUNO
Université générale Lansana Conté Sonfonia-Conakry Guinée  - Master droits de l'homme et droits humanitaires 2019
  

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Première Partie

L'EVOLUTION DE L'UA FACE AUX GRAVES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME

Le début du XXe siècle est marqué par l'engagement des dirigeants africains à travers l'UA pour régler les conflits qui ravagent l'Afrique et faire face aux défis des graves violations des droits de l'homme, de paix et de sécurité. Cette volonté manifeste est le résultat d'une prise de conscience de la gravité croissante de la situation sur le continent et cela, après le génocide au Rwanda en 1994, au Liberia et en Sierra Léone. Le génocide rwandais constitue l'un des événements les plus abominables qui entacheront à tout jamais le XXe siècle dans la mémoire des hommes. Au cours d'une centaine de jours entre Avril et Juillet 1994, huit cent milles (800.000) rwandais selon l'ONU ont été massacrées41(*).

Le drame Rwandais a changé et forgé la vision des africains, qu'ils ne peuvent plus rester indifférents face aux crimes de guerre, de génocide et de crime contre l'humanité. Un réveil de conscience qu'a résumé l'ex commissaire de l'Union africaine chargé de la paix et de la sécurité Saïd DJINNT dans une de ses allocutions, que « Plus jamais, les africains ne pourront regarder le développement des tragédies sur le continent et dire que c'est de la responsabilité des Nations Unies ou de la responsabilité d'une tierce personne. Nous sommes passés du concept de la non-interférence à celui de la non-indifférence. Nous ne pouvons en tant qu'africains rester indifférents aux tragédies de notre peuples »42(*).

Ainsi est intervenue dans ce réveil de conscience, la nécessité d'assumer une responsabilité collective43(*) s'ils veulent mettre fin ou du moins réduire le nombre de conflits en Afrique, source de graves violations des droits de l'homme. Nous aborderons donc les mesures prises par l'UA face aux graves violations des droits de l'homme (Chapitre I), avant d'aborder l'effectivité des actions de l'UA (Chapitre II).

Chapitre 1 : les mesures prises par l'UA face aux graves violations des droits de l'homme

A la reprise et au passif de la Charte de l'UA, on oppose véritablement les avancées de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, et de ses Protocoles. Cette dernière prévoit un mécanisme qui confie la responsabilité de la supervision et de la sauvegarde des droits de l'homme à trois organes distincts dont : la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA et la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. L'adoption de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples n'est pas en marge de cette logique de maximisation du droit à travers les avancées normatives (Section 1). De même, l'évolution des droits de l'homme en Afrique fait de l'UA un champ d'établissement et de reconnaissance des avancées institutionnelles (Section 2).

Section 1 : les avancées normatives

L'UA a inscrit dans ses avancées normatives, l'adoption de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples comme un instrument juridique efficace et protectionniste des droits de l'homme (Paragraphe 1) et la jurisprudence de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme et des peuples (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : l'adoption d'un instrument juridique de protection des droits de l'homme et des peuples

La protection des droits de l'homme face à leurs graves violations dans le système régional africain est liée aussi bien au particularisme africain de garantie générale (A) qu'au brassage normatif du système africain de protection des droits de l'homme (B).

A - le particularisme africain de garantie générale

L'effet directeur du système africain de protection des droits de l'homme pourrait probablement donner lieu à des réponses négatives si nous nous en tenons au bilan de la pratique de certains Etats de l'Afrique centrale44(*). Les juges, les avocats et les justifiables préfèrent faire confiance à certains instruments internes plus connus. Autant la justice est quasi incertaine en Afrique face à la pratique de la corruption grandissime et autant, la méconnaissance des règles contemporaines y compris les pratiques « traditionnelles »45(*) reste énormes et occupent une place de choix au sein des Etats membres de l'UA.

Par contre, nous remarquons qu'au-delà de cette région particulière, la plupart des 53 Etats membres de l'UA n'ont toujours pas déposé tous leurs rapports exigés par l'art 62 de la Charte. Point n'est besoin de rappeler qu' « en ratifiant la Charte sans prendre les dispositions nécessaires pour mettre ses lois en conformité avec ses dispositions, la Commission africaine considère que l'Etat n'a pas respecté ses obligations au titre de l'article 1er de la Charte »46(*). Bien qu'inspiré par les instruments juridiques internationaux, en proclamant les droits de l'homme dans sa Charte, l'UA n'a pas fait une reprise intégrale de ceux-ci mais, elle a tenu compte des liens sociologiques autour desquels se distinguent les Etats africains.

Précédé d'un préambule, la Charte ventile ses dispositions autour de trois parties de manière inégalitaire. La première se résume autour des droits et devoirs de l'homme, contenu dans deux chapitres et compte 29 articles. La deuxième, plus large s'articule autour des mesures de sauvegarde analysées en trois chapitres et contenues dans 33 articles. La dernière partie de cet instrument juridique énumère les dispositions diverses dans quatre articles.

Ainsi, le contenu matériel de la Charte se caractérise remarquablement par l'incorporation dans un seul et unique document deux catégories distincts de droits individuels, c'est une démarcation substantielle par rapport aux autres instruments juridiques internationaux que sont les systèmes européens et interaméricains qui, ont institué chacun, deux instruments d'instincts pour ses deux catégories des droits de l'homme47(*).

En effet, la consécration des droits de la solidarité ou les droits de la troisième génération est perçue comme un apport significatif de la Charte africaine et, de ce fait, elle devient le premier instrument juridique international à caractère obligatoire à prévoir de tels droits et à designer le peuple comme leur seul et unique titulaire48(*). Dès lors, la Charte consacre le droit des peuples à leur développement économique, social et culturel et le droit des peuples à la jouissance commune du patrimoine de l'humanité (art 22), le droit des peuples à la paix et à la sécurité internationale (art 23), le droit des peuples à un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement (art24).

En sus, l'autre originalité de la Charte réside dans la consécration des devoirs de l'individu à l'image de plusieurs autres instruments juridiques internationaux tels, la déclaration américaine des droits et devoirs de l'homme du 02 mai 1948 et la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 Décembre 1948 qui d'ailleurs, prévoit à l'article 29(1) que : l'individu a des devoirs envers la communauté dans laquelle seule le libre et le plein développement de sa personnalité est possible. A ces deux déclarations, il faut prendre en compte les deux Pactes des Nations Unies de 1966 (dernier paragraphe de leur préambule et article 19 du second Pacte, liberté d'expression), la Convention européenne (article 10, liberté d'expression) et la convention américaine (chapitre V, article 32).

Ces conventions consacrent également des devoirs de l'individu mais avec moins d'emphase et de manière moins détaillée que la charte africaine. La Charte africaine, pour sa part, consacre formellement tout un chapitre, c'est-à-dire pas moins de onze paragraphes, à ces devoirs ; elle prévoit ainsi les devoirs de l'individu envers la famille, envers la société, envers l'Etat et envers la communauté internationale (article 27, 28 et 29)49(*).

Par ailleurs, le fonctionnement d'un tel système reste majoritairement embarrassé par de nombreux blocus et défis qui attendent l'Union et des idées qu'on en fait50(*) surtout par rapport à son attractivité et son ambition à faire de la protection des droits de l'homme sa vocation première dans son effectivité au-delà de la consécration ou proclamation dans la Charte. C'est d'ailleurs ce qui fait que les membres souhaitent reformer le système en le rendant plus effectif à travers une opération de métissage où la cour africaine des droits de l'homme et des peuples serait engloutie par la cour de justice de l'UA, et avec pour effet directeur une baisse de son rayonnement régional.

Souvent les analystes se limitent à une description ondoyante de l'environnement normatif et institutionnel sans véritablement entrevoir son attractivité comme laisse entendre A.D Olinga que « Il est difficile aujourd'hui de ne pas être redondant, voire ennuyeux, au sujet de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ou, plus globalement, du régionalisme africain en matière de protection des droits fondamentaux »51(*). Cette analyse de la Charte a également inspiré Mutoy Mubiala dans son ouvrage qu'il consacre au Système régional africain de protection des droits de l'homme, il présente une image détaillée des normes et des différents mécanismes africains en la matière tout en aboutissant à « une faiblesse opérationnelle du système régional africain»52(*).

Nonobstant ce constat, certains n'ont pas hésité d'accorder quelques vertus magiques au système africain de protection des droits de l'homme, d'autant plus que la nécessité de voir s'instaurer en Afrique un ordre politique respectueux de la dignité humaine s'imposait inéluctablement. Le consensus qui s'est dégagé au moment de son adoption ne s'est pas traduit dans la pratique des Etats qui se méfient des contraintes du droit international sur leurs jalouses souverainetés53(*). La Charte est alors perçue comme un « simple habit de gala» pour accéder à la « civilisation internationale »54(*).

Cependant, le système africain de protection des droits de l'homme offre non seulement des réelles possibilités de blâmer les Etats dont les comportements paraîtraient manifestement peu soucieux de la dignité humaine, mais il contribue aussi à favoriser une réelle intégration des Etats africains par le droit international des droits de l'homme sur la base des valeurs universelles partagées par la communauté internationale. La Charte africaine a institué une Commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui rend compte à la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine55(*). La Commission africaine a des missions de promotion et de protection. Elle peut servir d'instance de médiation pour régler certaines affaires ou proposer des solutions appropriées aux gouvernements africains. Evelyne ANKUMAH a cependant souligné le peu d'intérêt que les analystes accordent au travail de la Commission africaine et à la portée de ses décisions56(*).

* 41 Voir le rapport de l'ONU sur le génocide rwandais in : http//www.un.org/french/documents/view-doc.asp ? symbole=S/1999/1257

* 42 Citer par Kristina Powell, The African Union's Emerging Peace and Security Regime: Opportunities and Challenges for Delivering on The Responsibility to Protect, The North-South Institute, Ottawa, May 2005, p.1, in: https://www.files.ethz.ch/isn/118315/119FULL.pdf, consulter le 01.05.2017.- À noter que celle-ci est une traduction faite par l'auteur du présent article, l'extrait était à l'origine en anglais comme suit:

« No more, never again. Africans cannot... watch the tragedies developing in the continent and say it is the UN's responsibility or somebody else's responsibility. We have moved from the concept of non-interference to non-indifference. We cannot as Africans remain indifferent to the tragedy of our people»

* 43 BOUDA Nassima, MA "A", « Les innovations normatives de l'Union africaine en matière de paix et de sécurité », in Revue Académique de la Recherche Juridique, pp. 47-65

* 44 BOUKONGOU J.D, « L'application de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples par les autorités nationales en Afrique centrale », pp. 123-160, in Flauss (Jean-François), Lambert-Abdelgawad (Elisabeth) (dir.), L'application nationale de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, Bruxelles : Bruylant/Némésis     2004, 266 p., coll. Droit et justice 54

* 45 BOUKONGOU J. D., « Vie familiale comme lieu d'exercice des droits fondamentaux : lecture des pratiques africaines », in Le défi des droits fondamentaux, sous la dir. de OTIS (G.) et MORIN (J.-Y.), Bruxelles, Bruylant, 2000.

* 46 CADH, 251/2002 - Lawyers Fr Human Right / Royaume de Swaziland, 37ème session, 27 avril-11 mai 2005, Banjul, 18ème rapport d'activités, § 56, 58, 61.

* 47 Voir ici la Convention européenne de 1950 et La Charte sociale européenne de 1961 pour le système européen, La Convention américaine de 1969 et Le protocole de San Salvador pour le système américain.

* 48 OUGUERGOUZ, F « La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Une approche juridique des droits de l'homme entre tradition et modernité », PUF/IUHEI, Paris/ Genève, 1993, p.131

* 49 OUGUERGOUZ. F, La protection des droits de la personne humaine en Afrique, cours inédit dispensé à la 34ème session du Programme Extérieur de l'Académie de Droit International de la Haye, Addis - Abeba, 13 - 17 novembre 2006.

* 50 BOUKONGOU J.D, « L'application de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples par les autorités nationales en Afrique centrale », pp. 123-160, in Flauss (Jean-François), Lambert-Abdelgawad (Elisabeth) (dir.), L'application nationale de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, Bruxelles : Bruylant/Némésis     2004, 266 p., coll. Droit et justice 54

* 51 OLINGA. A.D, « L'effectivité de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples », in revue Afrique 2000, avril-octobre 19, n°27/28, p. 171

* 52 MUBIALA. M, Le système régional africain de protection des droits de l'homme ; Bruylant, Bruxelles, 2005, 299 pages.

* 53 . JONATHAN. C, « L'évolution du droit international des droits de l'homme », in Mélanges Offertes à Hubert Thierry, L'évolution du droit international, Paris, Pédone, 1998, pp. 107-125.

* 54SINDJOUN. L, « La civilisation internationale des moeurs : éléments pour une sociologie de l'idéalisme structurel dans les relations internationales », Etudes internationales, vol. 27, N°4, décembre 1996, pp. 841 859.

* 55 POUGOUE P.-G., « La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples entre son passé et son avenir », in : L'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone, Montréal, KAUPELF-UREF, 1994, pp. 529-532.

* 56 Evelyne A. ANKUMAH, La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples. Pratiques et procédures, Londres, SADIC, 1995, 248 pages.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci