§.2- Les limites de la règle de la prescription
de l'action publique
Considérée comme une alternative à la
sanction pénale, la prescription de l'action publique se retrouve
limitée en raison de l'ignorance des infractions occultes ou
dissimulées, l'absence de détermination de leur point de
départ(A), et des répercussions de la prescription de l'action
publique (B).
A- L'ignorance des infractions occultes et
dissimulées et l'absence de détermination de leur point de
départ
Qu'est-ce qu'une infraction occulte ou dissimulée ? Une
interrogation qui n'a pas sa réponse ni dans le Code pénal, ni
dans le Code de procédure pénale puisque, le législateur
n'en a pas fait référence. En effet, les infractions occultes et
dissimulées ne se retrouvent pas encore dans l'arsenal juridique
togolais. Par contre, son homologue français s'est
intéressé à la question en
référençant ces deux infractions dans son Code de
procédure pénale175.
En principe, une infraction est dite occulte lorsqu'en raison
de ses éléments constitutifs, elle ne peut être connue ni
de la victime, ni de l'autorité judiciaire176. Par contre une
infraction est qualifiée de dissimulée lorsque, son auteur
accomplit délibérément toute manoeuvre
caractérisée tendant à empêcher sa
découverte177.
Quel est le point de départ des infractions occultes ou
dissimulées ? Cette interrogation nous laisse perplexes en raison du
silence du législateur en la matière.
En droit pénal tout comme en procédure
pénale, on a véritablement du mal à déterminer les
points de départ de la prescription des infractions occultes et
dissimulées parce que le
175 Articles 9-1 al. 4 et. 9-1 al. 5 CPPF
176 Article 9-1al.4 CPPF
177 Article 9-1al.5 CPPF
SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la
justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page
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législateur ne les a pas précisées. Ce
qui n'est toujours pas le cas du législateur français qui a pris
le soin de déterminer ces points de départ.178
Le législateur national n'ayant ni
référencé les infractions occultes et dissimulées,
ni défini leur point de départ, laisse l'acteur judicaire dans
une incertitude totale qui peut d'ailleurs être qualifiée de vide
juridique. Il s'agit en tout état de cause d'une difficulté
rédhibitoire.
Les infractions occultes et dissimulées sont des
infractions difficiles à déceler, et concernent la plupart du
temps les dossiers économiques et financiers. L'opacité du
législateur concernant ces infractions, empêche la poursuite des
dossiers de corruption, de détournement de deniers publics et des biens
mal acquis. En vertu du principe « nullumcrimen, nulla puena sine lege
»179, les infractions occultes et dissimulées ne
peuvent être réprimées, puisque le législateur ne
les a pas prévues. Cette lassitude du législateur entraine la non
poursuite des auteurs de ses infractions, une fois le délai de
prescription de droit commun expiré. D'aucuns diront que cette mission
incombe à l'autorité de lutte contre la corruption. Mais cette
autorité peine à accomplir cette obligation. Le Code pénal
réprime la corruption180, les soustractions et
détournements de deniers publics181 ; mais, cela ne
résout véritablement pas la question du
référencement des infractions occultes et dissimulées dans
le droit pénal. D'ailleurs, il faut noter l'absence de sanctions dans la
pratique judiciaire pénale des agents ou préposés de
l'Etat, qui sont auteurs de la corruption, de soustractions et
détournements de deniers publics. Pourtant, ce ne sont pas ces criminels
qui font défaut.
L'inertie du législateur au sujet des infractions
occultes et dissimulées pourrait laisser entrevoir qu'il est complice
des agissements de ses délinquants qui sont des puissants, souvent en
rapport avec des hommes politiques puisque l'impunité a
véritablement acquis une notoriété dans ces domaines.
Si la prescription de l'action publique est consacrée
en matière pénale, cela n'est pas sans répercussions sur
les justiciables.
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