Le temps dans la justice pénale au Togo.par Solim Aimée SONDOU Institut des hautes études des relations internationales et stratégiques - Master II en Droit Privé Fondamental 2018 |
B- Les conséquences de la prescription de l'action publiqueLa prescription est une cause légale d'extinction de l'action publique. Etant une mesure d'ordre public, elle doit être relevée d'office par tout juge saisi même si personne ne l'invoque. 178Art. 9-1 al. 3 CPPF 179 Formule latine qui exprime le principe fondamental de la légalité des délits et des peines. « il n'y a pas de crime, il n'y a pas de peine sans loi ». 180Arts. 594 - 596 CTT : la corruption des agents publics nationaux ; Arts. 597- 599 CTT : la corruption des agents publics étrangers et des fonctionnaires Internationaux ; Arts. 600- 606 CTT : la corruption dans le secteur privé. 181Art. 586 bis CPT SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 44 Ainsi, lorsque l'action publique n'est pas mise en mouvement dans les délais fixés par la loi, elle s'éteint. Des conséquences découlent de ce fait. D'abord, la prescription de l'action publique correspond à l'extinction du droit de poursuivre après l'écoulement d'un certain délai. Elle éteint l'action publique et constitue, un handicap à son l'exercice. La prescription ôte en toute évidence aux faits poursuivis tout caractère délicieux. Il s'agit donc d'une irrecevabilité à agir. Cette dernière suppose qu'aucun jugement de condamnation n'est encore intervenu puisqu' elle a pour objet d'éteindre la poursuite, et se rattache donc à la procédure182. Ensuite, une fois l'action publique prescrite, les faits commis ne peuvent plus donner lieu à condamnation. En effet, l'auteur des faits ne peut plus être ni pénalement poursuivi ni jugé sur sa culpabilité pénale183. Il est donc libre et toute poursuite à son encontre est impossible. C'est le mécanisme de la prescription extinctive qualifiée également de libératoire puisqu'il libère l'auteur des faits. La prescription de l'action publique se présente donc comme une institution favorable non seulement à celui-ci mais aussi à tous ceux qui sont intervenus dans la commission de l'infraction c'est- à-dire les auteurs, les coauteurs et les complices. Il s'agit bien évidement du caractère impersonnel de la prescription de l'action publique. Une fois la prescription acquise, l'auteur de l'infraction ne peut prétendre y renoncer. La loi proscrit alors toute poursuite initiée de son propre chef. Il s'agit d'un caractère d'ordre public de la prescription de l'action publique. De plus, la prescription de l'action publique équivaut au déni de la reconnaissance des victimes. La prescription est le temps qui court irrévocablement contre la victime et finit par éteindre son droit. L'infraction n'a donc pas existé car la loi ne reconnaitra plus ni la victime ni le coupable. Finalement, ce n'est plus l'auteur de l'infraction qui est puni mais plutôt la victime. La loi sanctionne donc la négligence de la partie poursuivante en lui faisant perdre son droit à agir. Toutefois, la victime, le ministère public ou toute personne habileté peut soulever l'exception de prescription devant toutes les juridictions. Dans ce cas, la partie poursuivante à l'obligation de prouver que l'action judiciaire n'est pas éteinte. Par ailleurs, la justice pénale juge les personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction : crime, délit ou contravention qui sont des comportements interdits parce qu'ils sont contraires soit à des valeurs essentielles de notre société, soit à des règles fondamentaux du vivre ensemble. La prescription de l'action publique handicape le juge dans son rôle de poursuivre et de sanctionner les infractions à la loi pénale en vue de mettre un terme au trouble causé à la 182 DONNEDIEU DE VABRES (H.), Traité de droit criminel et législation pénale comparée Sirey, Paris, 01-01-1947, 3e éd. 183Gian-FrancoRaneri, « La prescription, la fin du temps pénal », www.justice- en-ligne.be, 31 mars 2009. SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 45 société par celle-ci. La prescription empêche ipso facto « le juge de dire la « vérité judiciaire » au plan pénal : il ne peut pas, même si la personne était en aveux, la déclarer coupable, ni lui infliger une peine. Le juge n'est pas face à un choix mais à une obligation, celle de constater d'office la prescription »184. Enfin, la prescription tend à favoriser l'oubli. Ainsi, compte tenu de la durée écoulée depuis la commission des faits, il n'y a plus lieu de poursuivre leur auteur parce que l'opinion a oublié le trouble causé par leur commission et ne réclame plus vengeance. Cependant, est-il légitime d'oublier le comportement infractionnel qui laisse des traces dans les mémoires surtout que « Le crime est souvent perçu comme un signe de bestialité. Il caractérise la violation de la norme sociale édictée par le peuple, pour le peuple. Le crime est également un signe d'hominisation »185. A titre indicatif, les infractions volontaires accompagnées de récidive, le viol des femmes et des mineurs, la pédophilie, sont des infractions qui occupent une place primordiale dans la mémoire non seulement des victimes mais aussi de la société. Il est donc évident que les infractions, peu importe leur gravité laissent une empreinte indélébile dans la mémoire surtout avec leur médiatisation où les réseaux sociaux sont devenus aujourd'hui la principale source de propagande des informations. Il est clair qu'en droit togolais tout comme en droit français, la prescription de l'action publique constitue « un oubli annoncé »186. PRINS et GARRAUD, rejetant la prescription de l'action publique se demandent, « comment le simple écoulement du temps pourrait parvenir à l'amendement du délinquant alorsque la peine ne peut pas toujours atteindre ce but. »187 S'il est admis que la réglementation de la prescription de l'action publique reste problématique, la prescription des peines n'est pas du reste. |
|