4.2. Stabilité ou
instabilité résidentielle dans les strates
La faiblesse du nombre moyen de quartiers habités par
les chefs de ménage de la strate 1 trouve sa source dans la
stabilité du logement qui se caractérise par l'importance du
temps passé sur la strate actuelle. Ici, nous parlons
d'instabilité quand le temps moyen passé dans la zone d'habitat
actuelle n'atteint pas 15 ans.
La durée de séjour du ménage est en
moyenne de 24 ans depuis la dernière installation dans la strate 1.
Cette moyenne est plus importante à Liberté (31 ans) et plus
faible à Terminus (19 ans). Cela est dû au fait que les
ménages du quartier Liberté ont une trajectoire
résidentielle stabilisée tandis que les ménages du
quartier Terminus présentent la trajectoire la plus
développée et plus éclatée de la strate.
Au quartier Liberté, la stabilité
résidentielle est surtout l'oeuvre de ménages locataires dont la
durée de séjour moyenne depuis la dernière installation
dans le quartier avoisine 45 ans. Cela montre que malgré la
promiscuité, le quartier Liberté à une grande
capacité de rétention de ces locataires dont la plupart sont des
ménages démunis ou des étrangers qui souhaitent rester
à côté de la zone commerciale de la ville. Ici les
propriétaires sont des héritiers dont les parents ont aussi
cohabité avec les locataires. En revanche, ce sont les
propriétaires qui ont la durée de séjour la plus longue
dans le quartier Terminus tandis le séjour le plus long revient aux
ayants droit parmi les ménages du quartier Lacouroussou. A
l'échelle de la strate 1, le plus court séjour s'observe chez
les logés gratuitement du quartier Terminus.
Dans la strate 1, le statut d'occupation semble être
indicateur de stabilité ou d'instabilité du ménage dans
son logement. En effet, l'importance de la durée de séjour depuis
la dernière installation correspond à la sécurité
foncière dont jouit le ménage. A cet, effet, on remarque que la
durée moyenne de séjour décroît avec
l'insécurité foncière. En conséquence, elle est
plus importante chez les propriétaires qui ont une durée de 32
ans contre 24 ans chez les ayants droit, 22 ans chez les locataires et
seulement 14 ans chez les logés gratuitement. Ainsi, la durée est
assez importante parmi toutes les catégories de ménage. Ainsi, la
forte durée de séjour exprime-t-elle les difficultés de
promotion résidentielle chez les ménages de cette strate dont la
plupart se voient contraints de rester dans des logements vétustes et
souvent trop exigus. Cela est d'autant vrai que globalement, la forte
durée de séjour traduit une stabilité résidentielle
qui augure rarement un changement de statut d'occupation.
Le taux de renouvellement des ménages dans un espace
résidentiel donné est la proportion de ménages dont le
séjour n'y dépasse pas un an. Il permet de saisir non seulement
le degré de stabilité résidentielle mais également
les changements sociaux qui pourront découler de l'accueil de nouveaux
ménages.
Les ménages qui se sont nouvellement installés
dans la strate 1 sont de l'ordre de 8% en 2008. La faiblesse de ce taux montre
un renouvellement moribond des ménages au sein de la strate 1. Et ce
renouvellement de ménages n'augure pas de changement sociaux importants
car la strate n'accueille que de ménages dont le chef est artisan ou
commerçant c'est-à-dire des gens qui évoluent dans le
secteur informel comme ceux qui sont déjà installés.
Il convient de noter que ce taux est plus élevé
à Terminus où il est de 13 % contre 6 % à Lacouroussou et
à Liberté. En moyenne, seuls 14 % des chefs de ménage ont
vécu moins de 5 ans dans la strate 1.
Figure n°4.1 : Durée de séjour des
ménages de la strate 1 dans le quartier actuel
(en année)
Dans la strate 2, La durée moyenne de séjour
dans le quartier actuel est moins importante que celle observée chez les
ménages de la strate précédente ; cela s'explique par
le fait que la strate 2 se présente comme la strate la plus dynamique en
matière de mobilité résidentielle intra-urbaine. En effet,
l'analyse de la mobilité résidentielle a permis de comprendre que
cette strate est le lieu où s'observe le plus fort taux de
déménagement. Ce qui fait que la durée moyenne de
séjour depuis la dernière installation des ménages ne
dépasse guère 13 ans ; ce taux est comparable à celui
observé dans la zone périphérique où l'on compte
plusieurs quartiers d'installation récente.
Cependant, il y a lieu de noter que la durée de
séjour depuis la dernière installation du ménage dans le
quartier actuel varie en fonction du type d'habitat. C'est ainsi que le
quartier traditionnel de Boukoki 1 détient moyenne est plus
élevée parmi les trois quartiers enquêtés dans la
strate 2. Le degré de la stabilisation et de sédentarisation des
ménages de Boukoki 1 est comparable à celui d'un quartier de la
strate 1 car la durée de séjour depuis la dernière
installation des ménages y est de 21 ans, soit au moins deux fois plus
importante que dans les quartiers Cité Fayçal et Plateau 2. En
effet, dans ces deux quartiers, la durée de séjour depuis la
dernière installation du ménage ne dépasse guère 9
ans.
De même, l'enquête révèle des
différences en fonction du statut d'occupation du logement du
ménage. Aussi, la plus faible moyenne est-elle présentée
par les ménages squatters qui ont duré 4 ans dans l'actuel
quartier. Puis suivent respectivement les locataires avec une durée de 9
ans contre 11 ans pour les ayants droit et 17 ans pour les
copropriétaires. Il faut dire que les propriétaires y ont
séjourné plus de deux fois que les locataires ; ce sont les
premiers à se sédentariser. Leur durée de séjour
dans l'actuel quartier est proche de 20 ans.
Figure n°4.2 : Durée de séjour des
ménages de la strate 2 dans le quartier actuel (en année)
Quant au taux de renouvellement de ménages, il est de
10 % dans la strate 2 en 2008. Ce renouvellement concerne essentiellement les
ménages locataires. A titre illustratif, 4 des ménages sur 5, qui
se sont installés dans la strate 2 au cours de l'année 2008 sont
des locataires. Le renouvellement concerne aussi des ménages
logés gratuitement et des squatters. Il est plus important au Plateau 2
qu'à Cité Fayçal et à Boukoki 1. Car les locataires
sont plus présents au Plateau 2 qu'à Cité Fayçal et
à Boukoki 1, les locataires présents ont tendance à durer
longtemps du fait qu'ils sont le plus souvent pauvres contrairement aux
locataires du quartier Plateau 2 qui sont promis à une mobilité
résidentielle ascensionnelle. Dans ce cas, le statut de locataire n'est
qu'un passage vers l'accès à la propriété.
En ce qui concerne la strate 3, la durée moyenne de
séjour des ménages depuis la dernière installation dans le
quartier actuel est de 20 ans. Cette moyenne qui est bien plus importante que
dans la strate 2 montre une certaine stabilité des ménages de la
zone intermédiaire dans leur logement. La durée moyenne de
séjour des ménages depuis la dernière installation dans le
quartier actuel est deux fois supérieure à Gamkallé
qu'à Dar es-Salaam. Rappelons qu'elle est de 26 ans à
Gamkallé contre 14 % à Dar es-Salaam.
Ici aussi, la durée de séjour dans le quartier
semble dépendre du statut d'occupation du ménage car elle est
plus importante chez les copropriétaires que chez les autres statuts
d'occupation. En revanche, les plus courtes durées de séjour sont
observées auprès des locataires.
Figure n°4.3 : Durée de séjour des
ménages de la strate 3 (en année)
En effet, la durée moyenne de séjour dans le
quartier actuel est de 32 ans chez les copropriétaires contre 25 ans
chez les ayants droit, 22 ans chez les squatters, 21 ans chez les
propriétaires, 13 ans chez les logés gratuitement et moins de 10
ans chez les locataires. La longue durée de séjours des squatters
témoigne de l'importance du temps mis pour la mise en valeur des
parcelles dans les quartiers de la zone intermédiaire qui n'ont pas fini
de se densifier. La forte durée de séjour des
copropriétaires relève du fait qu'ils y habitaient des logements
appartenant, d'abord, à leurs parents qui ont
préféré rester dans les strates antérieures de la
ville ; par la suite ils deviennent copropriétaires après
avoir hérité de la maison qu'ils partagent avec les autres
frères et soeurs.
S'agissant du taux de renouvellement de ménages dans la
strate 3, il est, 8 % en 2008, soit le même que celui observé dans
la strate 1. Il concerne essentiellement des ménages locataires et des
logés gratuitement qui constituent les statuts d'occupation les plus
instables parmi les ménages. Il faut préciser qu'au cours de
cette année la mobilité résidentielle n'a concerné
ni les propriétaires ni les ayants droit.
Quant à la strate 4, la durée moyenne de
séjour depuis la dernière installation de ses ménages dans
le quartier actuel est un peu moins de 12 ans (11,7 ans). Cette faible
durée de séjour s'explique par le fait que la plupart des
quartiers périphériques sont récents. Contrairement
à la strate 2 qui est un lieu de départ, la strate 4 est un lieu
d'accueil de ménages car c'est un espace en construction ; c'est
ici qu'on compte la plupart des nouveaux logements.
En ce qui concerne les différents statuts d'occupation,
on remarque que les squatters semblent être les premiers habitants de ces
quartiers car ils s'y installent avant même la mise en valeur des
parcelles. Ce sont « les pionniers » des quartiers
périphériques dans lesquels ils mènent une vie de nomade
puisqu'ils sont appelés à quitter chaque fois que la mise en
valeur de la parcelle qu'ils occupent est achevée. En revanche,
l'installation des locataires est la plus récente à la
périphérie ; elle n'atteint pas en moyenne 5 ans.
Figure n°4.4 : Durée de séjour des
ménages de la strate 4 dans le quartier actuel (en année)
Le taux de renouvellement de ménages dans la strate 4
est de 13 % en 2008 ; c'est le plus important taux. Cela veut dire que 13
% des logements de la strate 4 ont accueillis leurs occupants en 2008. Parmi
les ménages accueillis, plus de 4/5 sont des locataires. Au total,
près de 2/5 des ménages ont moins de 5 ans dans la strate 4.
Parmi ces derniers, 16 % sont des propriétaires et 75 % des
locataires ; les autres statuts d'occupation n'en constituent que 14 %.
En résumé, l'analyse de la durée de
séjour du ménage depuis sa dernière installation dans le
quartier actuel et du taux de renouvellement de ménages par strate
montre qu'il y a une stabilité résidentielle dans les strates 1
et 3 alors que les strates 2 et 4 sont l'objet d'une certaine
instabilité du logement. Or la capacité de rétention ou de
répulsion des ménages par les espaces résidentiels peut
énormément influencer les échanges entre les
différentes strates de la ville.
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