4.3. Echanges de
ménages entre les différentes strates de la ville
Les échanges de ménages entre les
différents espaces résidentiels de la ville sont à
l'origine de la prédominance du modèle centrifuge de la
mobilité résidentielle à Niamey qui affecte le
développement de la ville. C'est pourquoi, il paraît
intéressant de l'examiner avec minutie, strate par strate.
Ainsi, plus de la moitié des chefs de ménage de
la strate 1 ont été hébergés dans leur premier
quartier d'accueil. Ceux qui ont débuté leur parcours migratoire
intra-urbain par la location représentent 1/3 des chefs de ménage
dont la plupart sont restés locataires jusqu'à à la date
de l'enquête (2008). Au total, 87 % des chefs de ménage ont
été soit hébergés, soit locataires à leur
premier logement à Niamey avant d'évoluer vers les autres statuts
d'occupation.
La plupart des chefs de ménage de la strate 1 ont
débuté leur mobilité résidentielle dans la
même strate notamment dans le quartier actuel. Il s'agit de 71 % d'entre
eux. Ceux qui ont d'abord vécu dans la deuxième strate sont 14 %.
Il faut dire que la strate 3 et la strate 4 ont rarement été le
premier lieu d'habitation des chefs de ménage de la strate 1.
A partir du premier quartier d'habitation, les ménages
poursuivent une certaine trajectoire résidentielle intra-urbaine. Dans
cet esprit, on note que la plupart des séjours des ménages du
centre ville se sont déroulés dans un quartier de la
strate 1 : en effet, 62 % des séjours ont eu lieu dans la strate 1
contre 21 % dans la strate 2. Les strates 3 et 4 ont été rarement
fréquentées par les ménages de la strate 1 comme on peut
le voir sur la figure n°4.5. Seul un ménage du centre ville sur 5 a
séjourné dans un quartier de la zone péricentrale ou de la
zone périphérique.
Figure n°4.5 : Lieu de départ et lieu
d'installation des ménages de la strate 1
S'agissant de leurs déménagements, 38 % se
déroulent dans le centre ville contre 35 % à partir de la strate
2 et moins de 20 % à partir des deux dernières strates de la
ville. Ces chiffres montrent que la strate 1 est son premier fournisseur en
ménages et révèle une circulation des ménages en
son sein. Chaque déplacement du ménage à un motif bien
précisé qui influence la décision du ménage
à déménager.
Ainsi, les migrations internes et internationales ont
été la première cause des déménagements des
chefs de ménage de la strate 1. En effet, 29 % de leurs
déménagements sont liés aux migrations internes et
internationales notamment vers des pays ouest-africains comme le Nigeria, la
côte d'Ivoire, etc. La deuxième cause relative à la
qualité du logement, sa taille, son prix et sa situation
géographique a été évoquée par 23 % des
chefs de ménage qui ont changé de logement. Les migrations et la
qualité du logement constituent donc les principaux déterminants
des déménagements vers les quartiers du centre ville.
Néanmoins, on relève que 14% de déménagements sont
liés aux changements de statut matrimonial notamment le mariage, le
veuvage ou le divorce. Quant au déménagement lié au
changement de statut d'occupation, il demeure faible. Cela montre que
les Niaméens de la strate 1 ont le plus souvent
déménagé sans pour autant changé de statut
d'occupation.
Figure n°4.6 : Raison du
déménagement des chefs de ménage de la strate 1 (en
%)
En effet, seul un déménagement sur 10 est
dû à un changement de statut d'occupation qui est soit une
décohabitation ou un accès à la propreté. Ce faible
taux montre les difficultés de promotion résidentielle. En
conséquence, les propriétaires sont maintenus dans un logement
vétuste tandis que les locataires circulent de logement en logement au
sein de la même strate sans accéder à la propreté.
La location, qui normalement devait être une phase transitoire, perdure
et devient définitive. Cet état de fait s'observe surtout au
Liberté et à Lacouroussou. Par ailleurs, moins d'une installation
sur quatre émane du choix des ménages.
Au niveau de la strate 2, le déplacement des
ménages dans les espaces résidentiels de la ville est une autre
réalité comme l'illustrent les figures 4.7 et 4.8.
D'après la figure 4.7, plus de la moitié des chefs
de ménage ont eu leur premier logement dans la strate 2. Ils sont plus
fréquents à Boukoki 1 où ils constituent 69 % des
ménages.
Figure n°4.7 : Localisation du premier quartier
d'accueil des chefs de ménage de la strate 2
Après la strate 2, la strate 1 est le deuxième
lieu d'accueil des chefs de ménage à leur arrivée à
Niamey avec un taux de 23 %. Ce cas est plus présent parmi les chefs de
ménage du quartier Cité Fayçal.
Globalement, le chef de ménage ayant
débuté son parcours résidentiel dans la strate 1 sont
presque deux fois plus nombreux que ceux l'ayant débuté dans la
strate 3 et 3 fois que ceux qui l'on débuté dans la strate 4.
Cependant, on remarque que plus d'un chef de ménage sur 10 ont
débuté leur trajectoire résidentielle intra-urbaine
à partir d'un quartier périphérique. Cette proportion est
plus importante que celle des chefs de ménage dont la trajectoire a
débuté à partir d'un quartier de la zone
intermédiaire.
En ce qui concerne leur mobilité, 73 % des lieux de
séjour des ménages de la strate 2 se trouvent dans la zone
d'habitat péricentrale. Leurs séjours ailleurs sont rares et se
répartissent comme suit : 9 % dans la zone centrale, 14 % dans la
zone intermédiaire et seulement 4 % dans la zone
périphérique. Ces statistiques indiquent que la strate 2
reçoit peu de ménage des autres espaces résidentiels de la
ville ; de ce fait elle s'alimente surtout par densification du
ménage et de l'habitat et par la décohabitation des jeunes qui
viennent de former un ménage.
Pour les déménagements, la figure n°4.8
montre que 3/5 déménagements ont lieu en direction des autres
strates de la ville. Ce qui fait de la zone péricentrale un lieu de
départ de ménages qui vont alimenter les autres strates.
Figure n°4.8 : Lieu de départ et lieu
d'installation des ménages de la strate 2
Quand ils quittent la première strate, 78 % des
ménages s'installent dans la strate 2 avant d'aller ailleurs dans les
autres strates. La strate 2 est le premier lieu d'origine des flux en direction
de la strate 3. Cependant, les échanges entre la strate 1 et la strate 2
se font à l'avantage du second de la strate 2. Pour un départ de
la strate 2 vers la strate 1, on observe 4,2 dans le sens inverse. De ce fait,
le déplacement des ménages se sont fait surtout du centre ville
vers la zone périphérique. A l'inverse, pour un départ de
la strate 2 vers la strate 3, on en observe 2 à 3 dans le sens inverse.
Par contre les ménages ont rarement quitté la strate 2 pour la
strate 4. Ainsi, pour un départ de ménage de la strate 2 vers la
strate 4, on note l'installation de 6 ménages en provenance de la strate
4 vers la strate 2. Cela indique paradoxalement un retour des ménages de
la périphérie vers la zone péricentrale.
En ce qui concerne les motifs de la mobilité
résidentielle des ménages de la strate 2, ils se résument
à des installations par opportunité qui représentent plus
de 2/5 des emménagements. Le ménage n'a de choix que pour une
installation sur 4. Ce choix dans l'installation du ménage est plus
observé chez les ménages de Plateau 2 notamment les
locataires.
Quant aux déménagements, ils sont dus
essentiellement à la mauvaise qualité du logement et aux
migrations internes et internationales. En revanche, les ménages ont
rarement déménagé par choix.
Au niveau des quartiers enquêtés, les
déménagements liés au changement de statut matrimonial
sont dominants à Boukoki 1 et plus de la moitié de ceux qui ont
eu à déménager suite à une expulsion, au retour du
propriétaire ou à la mutation de leur maison d'habitation sont de
Plateau 2.
Dans la strate 3, le comportement des ménages
révèle une autre situation dont l'implication sur les
échanges de flux de ménages vers les autres strates est aussi
évidente. En effet, la mobilité résidentielle
intra-urbaine des ménages de la strate 3 est marquée par une
stabilité relative qui n'exclut pas des échanges avec les autres
strates. Plus de la moitié des ménages qui y séjournent
ont eu leur premier logement au sein de la même strate. Pour les chefs de
ménage qui ont débuté leur trajectoire
résidentielle à partir d'une autre strate, 50 % ont eu leur
premier logement dans la zone péricentrale.
Figure n°4.9 : Localisation du premier quartier
d'accueil des chefs de ménage de la strate 3
Les chefs de ménage de la strate 3 ont rarement
débuté leur parcours résidentiel intra-urbain dans un
quartier du centre ville ou de la périphérie. Toutefois, un
ménage sur cinq de Dar es-Salaam a eu son premier logement dans la
strate 1.
S'agissant des échanges entre strates, plus de 3/5 des
quartiers habités par les ménages de la strate 3 se trouvent dans
la même zone. En revanche, les strates 1 et 4 ont rarement
été le lieu de séjour des ménages de la strate 3.
Cela veut dire que les ménages s'installent prioritairement dans la
strate 3 et circulent entre ses quartiers. S'il leur arrive de
déménager de la strate 3, les ménages s'installent dans la
strate 2. A ce propos, 23 % des quartiers habités se comptent dans la
strate 2.
La strate 2 constitue le point de départ de 41% des
flux de ménages vers les autres strates. Quand ils quittent la strate 2,
les ménages s'installent dans la strate 3 dans 74 % des cas et le
deuxième lieu d'origine des ménages vivant actuellement dans la
zone intermédiaire est la strate 3, d'où proviennent 31% des
flux. Lors de leur déplacement à partir de la strate 3, les
ménages s'installent prioritairement dans la strate 2. Les flux qui
proviennent du centre ville et de la zone périphérique sont
faibles et tournent autour de 14 %.
S'agissant de l'accueil de ménages, la figure 4.9
montre qu'ici la strate 1 n'en accueille que 5% des installations contre 10 %
pour la strate 4 puis 18 % pour la strate 2 et 67 % pour la strate 3. De ce
fait, en dehors de la strate 3 où ils vivent actuellement, la strate 2
est le deuxième lieu de d'installations pour les ménages de la
zone intermédiaire.
Figure n°4.10 : Lieu de départ et lieu
d'installation des ménages de la strate 3
Une installation sur deux relève de
l'opportunité de logement offerte aux ménages. Les
emménagements relevant du choix du ménage ne font que 14 % dont
aucun à Gamkallé. Les ménages vivant
actuellement dans la strate 3 ont dû déménager surtout pour
des raisons liées aux mauvaises conditions de logement (28 % des
déménagements), aux migrations internes et internationales (15 %
des déménagements) et aux changements de statut matrimonial (15
%).
Figure n°4.11 : Raison du
déménagement des chefs de ménage de la strate 3
L'analyse montre que la strate 3 ne fournit qu'une faible
proportion de flux de ménages en direction de la strate 4
Figure n°4.12 : Localisation du premier quartier
d'accueil des chefs de ménage de la strate 4
La localisation du premier quartier d'habitation des chefs de
ménage de la strate 4 est très déterminante dans la
compréhension de la redistribution des ménages à
l'intérieur des espaces résidentiels de la ville. Ici, elle
démontre que la trajectoire résidentielle intra-urbaine est
à dominante centrifuge chez les ménages. Or, le modèle
centrifuge de mobilité résidentielle est reconnu pour être
un facteur important d'étalement de la ville.
La figure n°4.12 montre que trois ménages sur cinq
de la strate ne sont pas installés directement dans la zone
périphérique. Ils ont dû avoir une trajectoire
résidentielle qui les amène à séjourner dans les
strates antérieures de la ville notamment dans la strate 2. Cette
dernière a été le premier lieu d'habitation pour 36 % des
chefs de ménage de la zone périphérique. Malgré la
proximité, la zone intermédiaire ou strate 3 n'a
été le premier lieu d'habitation que pour 13% des chefs de
ménage de la strate 4, soit un peu moins que ceux dont la trajectoire
résidentielle a commencé dans les anciens quartiers du centre
ville. En outre, les chefs de ménage de la strate 4 ont
été le plus souvent hébergés ou locataires à
leur premier logement à Niamey. Il faut dire que seuls 8 % des
propriétaires l'étaient déjà dans leur premier
logement à Niamey.
L'analyse de déplacements des ménages de zone
périphérique de Niamey montre que leurs séjours sont plus
nombreux dans la strate 4 puis dans la strate 2. En revanche, ils sont rares
dans la strate 1. Il convient de préciser que 3/5 des séjours ont
eu lieu dans la strate 4 contre 1/5 dans la strate 2 et seulement 1/10 dans
les strates 1 et 4.
Les ménages de la strate 4 proviennent de toutes les
strates de ville mais avec une nette prédominance de ceux ayant
déménagé d'un quartier de la strate 2 ; en effet,
37% des flux en direction de la zone périphérique trouvent leur
source dans les quartiers de la strate 2 ; ce qui est plus important que
les flux qui s'opèrent au sein de la strate 4 dont la proportion ne
dépasse pas 31 %. Quant à la strate 3, il n'est que le
troisième fournisseur de la strate 4 en ménages.
Figure n°4.13 : Lieu de départ et lieu
d'installation des ménages de la strate 4
En ce qui concerne les motifs des installations des
ménages dans les différents quartiers de la strate 4, on ne note
pas une rupture avec ceux évoqués par les ménages des
autres strates de la ville. En effet, moins de 15 % des ménages de la
zone périphérique déclarent s'y être
installés par choix notamment du fait de l'accès à la
propriété qui est à la base de 13 % des installations.
Pour le reste, les installations sont dues aux opportunités de logement
offertes aux ménages.
Figure n°4.14 : Raison du
déménagement des chefs de ménage de la strate 4
Quant aux déménagements observés dans la
strate 4, ils sont dus à deux raisons essentielles qui sont les
migrations (internes et internationales) et le changement de statut
d'occupation (par exemple passer de locataire à propriétaire et
vice-versa).
En définitive, les ménages qui ont habité
dans le plus grand nombre de quartiers se retrouvent dans la strate 4, puis
dans la strate 2. A l'inverse, les ménages de la strate 3 ont
été les moins mobiles. Cela justifie le fait que les
ménages ont tendance à séjourner plus longtemps dans leur
logement au niveau de la strate 1 et de la strate 3.
Tout se passe comme si ce sont les quartiers
résidentiels et les quartiers spontanés en matériaux
définitifs (banco) qui accueillent les ménages ayant la plus
longue trajectoire résidentielle à Niamey. En revanche, les
ménages séjournent plus longtemps à Liberté puis
à Gamkallé, Lacouroussou et à Boukoki1 ; il s'agit de
quartiers traditionnels ou de village urbain (Gamkallé).
Par ailleurs, les échanges de ménages entre
strates révèlent une mobilité résidentielle
centrifuge observable à travers la trajectoire résidentielle de
la plupart des ménages enquêtes. L'analyse de cette trajectoire
contribue à démontrer combien la mobilité
résidentielle participe au processus d'étalement à
l'oeuvre dans la ville de Niamey. Il résulte une certaine dissemblance
des espaces résidentiels de la ville notamment en ce qui concerne les
conditions d'existence des ménages.
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