Section 2: Les principes fondamentaux de la
fiscalité écologique
On peut ici se référer à trois approches
principales dont la portée et la concrétisation varient
sensiblement. Tout d'abord, une fiscalité vouée à
l'écologie peut privilégier l'application du principe «
pollueur-payeur » .La second théorie privilégie le principe
de double dividende et enfin l'affectation des ressources des
écotaxes.
Paragraphe 1 : La consécration du principe du
pollueur payeur
Le principe du pollueur-payeur est un principe
économique qui favorise le recours aux lois de l'économie de
marché pour assurer la protection de l'environnement. Il signifie que,
idéalement, le prix d'un bien sur le marché doit refléter
les coûts de la pollution, ou coûts sociaux, engendrés dans
la production de ce bien ; on parle alors d'internalisation des coûts
externes. Ces coûts comprennent les dommages subis par les
éléments de l'environnement (eau, sol, faune, flore,
écosystème, etc.) et par les êtres humains (dommages aux
biens, à la personne). En situation de libre concurrence, le
consommateur sera automatiquement enclin à acheter les biens les moins
chers, qui seront aussi les plus écologiques, selon ce modèle
théorique18. Étant donné le coût
élevé lié à la réparation des dommages de
pollution, il serait dès lors, dans la plupart des cas, beaucoup plus
avantageux pour les industriels d'adopter dès le départ des
méthodes de production moins polluantes que d'utiliser des
procédés dommageables pour l'environnement et de devoir
répercuter les coûts sociaux ainsi causés dans le prix des
biens produits19.
Politiquement, le principe du pollueur-payeur se vend bien. Il
frappe l'imagination populaire dans un sens favorable : pris à la
lettre, il signifie pour le simple citoyen que les coûts de la lutte
contre la pollution industrielle ne lui seront pas imputés. En fait,
cette simplicité
18 - J.-P. BARDE et E. GERELLI, Économie et
politique de l'environnement, Paris, Presses universitaires de France, 1977,
p.137. « le pollueur cherchera à minimiser sa prise en charge des
coûts de la pollution, à moins que la concurrence ne l'oblige
à cette prise en charge par réduction de ses profits, lorsque la
répercussion des coûts risquerait de détourner
partiellement la demande vers des biens substituables ou concurrents »
.
19 - Pour des niveaux de pollution peu
élevés, la réparation des dommages s'avérera
cependant moins coûteuse que l'épuration à la source.
Ainsi, le pollueur sera incité à réduire sa pollution
«jusqu'au niveau d'égalisation du coût marginal de la lutte
contre la pollution et du coût marginal des dommages causés par
cette pollution». Voir «Mécanismes du marché et
environnement », Annales de la voirie et de l'environnement, vol. 1491,
oct.
1990, pp. 43, 44 (extraits du Rapport annuel mondial sur le
système économique et les stratégies.
Mastère professionnel TCF ISG Gabés
Monaem FATTOUCH Page 18
apparente est trompeuse. Selon Michel Prieur, le
«principe aux allures de slogan publicitaire cache des problèmes
économiques et juridiques complexe20.
S'il semble théoriquement parfait, le modèle se
révèle en fait d'application difficile, sinon impossible. D'une
part, l'évaluation des coûts sociaux n'est pas chose aisée.
Comme nous l'avons déjà mentionné, les dommages aux
éléments de la nature, ou à la santé des
êtres humains, s'avèrent souvent difficilement quantifiables, et
peuvent ne survenir que bien des années après
l'événement dommageable. D'autre part, il serait
irréaliste, et irréalisable, d'exiger l'internalisation de tous
les coûts sociaux. La plupart des activités humaines
entraînent une modification de l'environnement, celle-ci pouvant dans
bien des cas être légitime compte tenu de l'accroissement de la
qualité de vie apportée à l'être humain. Ainsi, la
société peut très bien tolérer un certain seuil de
dommages à l'environnement.
L'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE), qui a fait figure de
pionnière dans l'étude des questions d'intégration de
l'économie et de l'environnement, a tenté, la première, de
transposer en termes juridiques le principe du pollueur-payeur. La
recommandation C(72) du 26 mai 1972, dont les prescriptions ne sont toutefois
pas obligatoires pour les États membres de l'OCDE21, donne en
fait une portée plus limitée au principe ; il y est question
d'internalisation partielle des coûts sociaux22.
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