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La responsabilité du banquier dispensateur de crédit

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par Aristide CHACGOM FOKAM
Université de Dschang - Master 2 en droit des affaires et de l'entreprise 2011
  

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B- Incidences de la personnalité de l'emprunteur sur les obligations du banquier

La distinction emprunteur averti et profane déteint considérablement sur la responsabilité du banquier, puisque les obligations mises à sa charge seront tantôt allégées(1) ou renforcées(2).

1- Les obligations allégées du banquier face à l'emprunteur averti

Lorsque le demandeur à l'action en responsabilité est un emprunteur averti, la solution retenue par la première Chambre civile correspond à la jurisprudence de la Chambre commerciale de la Cour de cassation française en matière de responsabilité pour octroi de crédit, constante depuis 1999. L'arrêt « Guigan » du 12 juillet 2005 reprend ainsi ce que certains auteurs appellent « formule désormais sacramentelle utilisée par la chambre commerciale »65 :« ne prétendant pas que la banque aurait eu sur sa situation financière des renseignements que lui-même aurait ignorés, M. X,

emprunteur averti, ne peut faire grief à cette banque de lui avoir accordé un prêt qu'iiavait lui-même sollicité. » L'idée désormais est qu'un emprunteur jugé averti ne peut
mettre en cause la responsabilité de l'établissement de crédit au motif que le crédit

65 V. GOURO (A.), JCP G 2005 p. 1875 et s.

s'est révélé inopportun. Cette solution est soutenable dans la mesure où l'emprunteur averti ne pouvait ignorer la portée du prêt sollicité66.

La seule piste ouverte à l'emprunteur averti se trouve sur le terrain de « l'asymétrie d'informations » énoncée notamment par la Chambre commerciale de la cour de cassation française, dans un arrêt du 20 septembre 200567. Un commentateur y décèle une brèche ouverte à l'emprunteur averti. « C'est moins l'asymétrie d'information entre le créancier et le débiteur qui est sanctionné en tant que telle, que le fait que le banquier « ignorait l'ignorance » de son client. En d'autre termes, la faute de la banque tient ici en ce qu'elle ne s'est pas renseignée sur le degré de connaissance de son client et qu'elle aurait dû, dans l'ignorance de celui-ci, lui délivrer l'information nécessaire pour qu'il s'engage en parfaite connaissance de cause.

La responsabilité du banquier vis-à-vis d'un emprunteur averti est donc cantonnée à des hypothèses précises et relativement restreintes. Il n'en va pas de même, en revanche, quand l'emprunteur est un profane.

2- Les obligations renforcées du banquier face à l'emprunteur profane

Le banquier s'est vu confier une nouvelle mission de « gardien » des intérêts de l'emprunteur. En plus de sa mission de police bancaire, il faut lui reconnaître également celle « d'assainisseur » financier puisqu'il doit désormais, avant d'octroyer un crédit, veiller à ce qu'un tel concours n'altère la situation financière de l'emprunteur68. Le banquier pourvoyeur de fonds est astreint à plusieurs obligations et notamment d'information ou même encore de conseil, mais depuis peu69 en vertu de la jurisprudence, à une obligation de mise en garde. Elle a été dégagée explicitement par

66 Cf. LEGEAIS (D.), l'obligation de conseil de l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur et de sa caution, Mélanges AEDBF III, 2001, p. 1524.

67 D. 2005 n°37, actualités juridiques, note DELPECH (X.).

68 Cf. BOUCARD (F.) et DJOUDI (J.), « La protection d l'emprunteur profane », Recueil Dalloz-2008, n°8, p. 500.

69 Nombreux sont les auteurs à s'être intéressés à cette nouvelle obligation. Voir par exemple : BOURDALLE (N.) et J. CAPDEVILLE (J-L.), « le développement jurisprudentielle de l'obligation de mise en garde du banquier », Banque et Droit 2006, n°107, p. 17 ; BOUCARD (F.), « le devoir de mise en garde du banquier à l'égard de l'emprunteur et de sa caution : présentation dialectique », RD banc. Fin, sept.2007, p. 24 ; HOVQUET-BERG (S.), Les fournisseurs de crédit à nouveau mis en garde ? RCA. 2007. Etude 15.

l'arrêt époux jauleski du 12 juillet 200570 réitérée à de multiples reprises71.

L'obligation de mise en garde classiquement peut être définie comme le devoir pour le professionnel d'attirer l'attention de son cocontractant sur un aspect négatif du contrat ou de la chose objet du contrat. Ainsi, le banquier, en matière de crédit devra informer son client sur les charges et dangers de l'opération projetée. Dans ce sens une telle obligation se confond à l'obligation de conseil ou même à l'obligation d'information. S'il est vrai que l'information se distingue du conseil, ce dernier se rapproche davantage de l'obligation de la mise en garde et l'on pourrait considérer la mise en garde comme un conseil renforcé. La mise en garde apparait comme un conseil négatif, un conseil de ne pas faire, accompagné de l'explication des dangers ou simplement des inconvénients encourus si ce conseil n'est pas suivi.

Ainsi, le banquier se doit de veiller que le client qui sollicite le crédit soit à même de le rembourser. Ce crédit ne saurait être supérieur à ses capacités de remboursement. Toutefois, cette vérification des capacités de remboursement de l'emprunteur n'est pas automatique et concerne plus l'emprunteur non averti. Le principe de l'opportunité du crédit a pour corollaire la surveillance des fonds.

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