LE FONDS DE COMMERCE DU SECTEUR INFORMEL : UN BIEN
PARTICULIER
S'il y a une peur qui hante au quotidien tout
commerçant, c'est sans doute celle de perdre son fonds de commerce, car
ce dernier est son bien précieux ou plutôt l'élément
essentiel de son patrimoine. Le législateur OHADA sur la lignée
de son homologue Français en a pris conscience et de ce fait, a
réglementé avec minutie autant le contenu que la protection du
fonds de commerce ; mais aussi sa circulation et toutes les opérations
qui l'entourent. Dès lors, le fonds de commerce apparaît comme
l'un des éléments centraux de la vie et du droit des affaires,
tant il est vrai que sa disparition cause du tort non seulement au
commerçant et à sa famille qui en dépend, mais surtout
à la société qui par principe encourage l'initiative
privée en général et les activités commerciales en
particulier afin de disposer d'une économie à réseau
étoffé. La notion de fonds de commerce est relativement
récente car elle est une création de la pratique commerciale
française au cours du XIXème Siècle. Le Droit
s'en est saisi sous l'effet de la nécessité d'une double
protection : D'une part, protéger le commerçant contre les
attaques de concurrents en raison des investissements intellectuels et
financiers souvent importants qu'il a réalisés lors de la mise
sur pied de son activité ; D'autre part, protéger les
créanciers du commerçant contre la dissipation d'un
élément souvent important de son patrimoine qui est le fond de
commerce ou son prix de cession.94
94 Une personne ne pouvant avoir qu'un patrimoine,
la théorie du patrimoine d'affectation est exclue en ce qui concerne
le fonds de commerce et, les créanciers du commerçant sans
distinction d'origine
De grandes controverses doctrinales ont donc ponctué la
détermination de la nature juridique de ce bien du commerçant.
Finalement, les auteurs se sont accordés pour lui reconnaître
d'abord le caractère d'un bien unitaire distinct des
éléments qui le composent, et ensuite le caractère d'un
bien meuble incorporel car, il est composé de biens meubles et de biens
incorporels qui sont assimilés à des meubles.95 L'Acte
Uniforme relatif au Droit Commercial Général ne définit
pas la notion de fonds de commerce, il en donne plutôt les
éléments constitutifs. Ainsi, son article 103 en son al
1er dispose que : « Le fonds de commerce
est constitué par un ensemble de moyens qui permettent au
commerçant d'attirer et de conserver une
clientèle.». L'al 2 du même article
poursuit en énonçant qu'il regroupe différents
éléments mobiliers corporels et incorporels. L'article 104 quant
à lui désigne la clientèle, l'enseigne, le nom commercial
comme éléments obligatoires du fonds de commerce à
côté des éléments subsidiaires que l'article 105
énumère.96 Il ressort de tous ces textes que le fonds
de commerce comprend une série d'éléments disparates, tous
mobiliers. De là, on est inéluctablement porté à
s'interroger sur le contenu du fonds de commerce dans le secteur informel.
L'opérateur d'un tel secteur a-t-il un fonds de commerce avec tous
les
civile ou commerciale ont action sur tous ses biens, mais surtout
ont un droit d'opposition sur le prix de la vente du fonds de commerce.
95 Bien que le fonds de commerce comprend des
éléments corporels, il demeure un bien meuble incorporel en
raison de l'importance des éléments incorporels dans l'ossature
général du fonds de commerce. Comme tel, la règle de
l'article 2279 du Code Civil qui édicte que: « En fait de meubles,
possession vaut titre. », ne lui est pas applicable.
96 L'article 10 dispose en effet que: « Le fonds
de commerce peut comprendre en outre, à condition qu'ils soient
nommément désignés, les éléments suivants
:
- les installations,
- les aménagements et agencements,
- le matériel,
- le mobilier,
- les marchandises en stock,
- le droit au bail,
- les licences d'exploitation,
- les brevets d'inventions, marques de fabrique et de commerce,
dessins et modèles, et tout autre droit de propriété
intellectuelle nécessaires à l'exploitation. »
éléments prévus par l'AU.DCG ? Le fonds de
commerce du secteur informel est-il identique à celui du secteur formel
?
D'emblée la réponse ne peut être positive
car l'informalité juridique ou encore les motivations psychosociales et
/ ou économiques qui accompagnent la logique de l'informel sont par voie
de conséquence, de nature à altérer ou à
désagréger les éléments qui le composent. A la
vérité, le fonds de commerce dans le secteur informel
présente de curieuses particularités eu égard non
seulement à l'altération (section 1), mais aussi et surtout
à la fragilité (section 2) de certains de ces
éléments.
SECTION I
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