B- Les modes de la preuve
selon les jurisprudences 263/02 - Section Kenyane de la
Commission Internationale de Juristes, Law Society of Kenya, Kituo Cha
Sheria/Kenya, et 127/94 Sana Dumbuya c/Gambie, la preuve de
l'épuisement des recours internes consiste à « fournir
les informations sur les efforts faits pour épuiser les voies de recours
internes ». En effet, « Il doit être
démontré qu'il a été accordé à
l'État lui-même une opportunité de remédier au cas
avant d'avoir recours à un organe international»166
Il appartient au requérant et au défendeur de mettre à la
disposition de la Commission toute information167 concernant les
efforts faits pour épuiser les voies de recours internes. La preuve
porte soit sur l'épuisement des recours internes soit sur l'exception
à l'art 56(5) de la Charte. L'épuisement des recours internes ou
son exception peut être prouvé par tous les moyens. La preuve est
très souvent écrite (1) et /ou verbale
(2)
1 - La preuve écrite
Il s'agit de preuves matérielles qui consistent en la
présentation de tout document, démontrant que l'État, a eu
l'opportunité de régler l'affaire par son système
judicaire. La preuve peut ainsi être les copies de décisions des
juridictions nationales jointes aux requêtes168. A titre
d'exemple, dans la communication 228/99 Law Office of Ghazi Suleiman c.
Soudan la Commission a « demandé au plaignant de
soumettre, par écrit, ses observations sur la question
166 Com 268/2003 Ilesanmi c. Nigeria.
167Com 263/02 Section Kenyane de la Commission
Internationale de Juristes, Law Society of Kenya, Kituo Cha Sheria/Kenya
Communication 127/94 - Sana Dumbuya c/Gambie,§ 36.
168Com 48/90, 50/91, 52/91, 89/93 Amnesty
International. c. Zambie
de l'épuisement des voies de recours internes. En
outre, les parties devraient lui fournir la législation et les
décisions de justice pertinentes (en anglais ou en français)
»
Dans le cas de l'exception de non épuisement des
recours internes, la preuve peut être établie à partir de
toute jurisprudence, de correspondances administratives, de textes
législatifs, appuyés de commentaires pour montrer l'incidence de
l'application de ces documents sur la procédure des recours. De simples
doutes sur l'effectivité des voies de recours internes ne suffisent
pas,169 au risque que la Commission « établirait un
dangereux précédent si elle recevait un cas sur la base du
sentiment d'un plaignant de l'absence d'indépendance des institutions
internes d'un pays ».170
De même l'État qui allègue le non
épuisement des voies de recours internes doit en apporter la preuve. Il
s'agira pour lui de présenter le droit positif instituant ces
recours171, de rapporter des pièces officielles de
procédures démontrant que l'affaire est pendante devant ses
tribunaux, ou simplement de remettre à la Commission des jurisprudence
qui démontrent que les recours internes ont redressé des
violations similaires et sont donc aptes à redressée la situation
litigieuse172. Toutefois, il en va autrement lorsque les
autorités nationales ont amplement été informées de
la violation et ce même en dehors des modes juridictionnels. En effet la
Commission a décidé dans la Communication 275/2003 - Article
19/État d'Érythrée que « le fait que le plaignant
n'ait pas suffisamment démontré avoir épuisé les
voies de recours érythréennes ne signifie pas que ces voies de
recours soient accessibles, effectives et suffisantes. La Commission africaine
peut arriver à des déductions à partir des circonstances
entourant le cas et déterminer si ces recours sont en fait accessibles
et s'ils le sont, s'ils sont effectifs et suffisants. »
169Dans l'affaire Article 19, la
Commission se rapportant à la jurisprudence du comité des droits
de l'homme, (Affaire A c. Australie) normes minimales
d'indépendance judicaire de l'IBA adopté e 1982. Voir
également L. Emile Caabe c. Island, Com. N° 674/1995 UN
Doc ; CCPR/C/58/D/674/1995/(1996) ; Antoine Randolph c. Togo Com. 910
ONU Doc. CCPR/C/79/D/910/2000 (2003) est d'avis que « de simples
doutes sur l'efficacité des voies de recours nationales ou sur la
perspectives de coûts financiers impliqué n'absolvait pas l'auteur
de rechercher ces voies de recours ».
170Com 260/02 Bakweri Land Claims Committee /
Cameroun.
171Com 228/99 Law Office of Ghazi Suleiman
/Soudan §28, « Le Représentant de l'État a fourni
des preuves de recours internes efficaces sous forme de lois et de cas de
jurisprudence.»
172Com 198/97 SOS-Esclaves c.
Mauritanie.§16 ; la Commission a considéré que le
silence du demandeur au sujet des information relative à l'art 56(5)
donne « à penser que les recours internes n'auront pas
été épuisés...le cas échéant le
requérant l'aurait fait savoir. »
2 - La preuve verbale
La preuve verbale est retenue au cours du procès
pendant lequel les déclarations des parties sont prises en
compte.173 Tel a été le cas dans la jurisprudence
Bakweri Land Claims Committee où il est
rapporté que : « Comme il ressort de
l'ensemble des faits présentés devant la Commission Africaine par
les deux parties, tant par écrit que verbalement, le plaignant n'a pas
saisi une seule fois un tribunal local ou national
»174.
La preuve matérielle de l'épuisement des voies
de recours internes n'est pas le seul mode de vérification de cette
condition. La jurisprudence de la Commission fait état de nombreux cas
de présomption du non épuisement des voies de recours. Il en est
ainsi lorsque malgré les appels de la Commission les parties restent
silencieuses.175
La preuve de l'épuisement des voies de recours,
entraîne la recevabilité de la communication. Dans le cas
contraire la plainte est simplement déclarée irrecevable.
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