A- Non prise en compte des lois et décrets
d'application du code civil au Sénégal :
Même durant la période coloniale, certains textes
français modifiant le code civil de 1804 n'étaient pas
applicables au Sénégal du fait que cette application était
subordonnée à une déclaration sous forme
d'arrêté gubernatorial. C'est le cas notamment de la loi du 20
Août 1881 qui n'a été déclarée applicable
qu'à Madagascar et en Somalie.
Après l'indépendance les textes modifiant le
code civil ne sont pas applicables dans notre pays malgré le fait qu'il
y soit toujours admis pour régir le droit de propriété. Et
cela est expliqué comme nous l'annoncions antérieurement par le
principe de la souveraineté nationale du Sénégal et de la
règle de la territorialité de la législation nationale
française.
Ainsi de nombreuses lois et décrets d'application du
code civil instaurés par la France pour une bonne application du code
civil n'ont pas d'effets dans notre pays. En effet il en est ainsi de
nombreuses lois françaises relatives à la limitation du droit de
propriété comme les lois limitant la propriété du
dessus ou du dessous. C'est le cas notamment de la loi du 8 Juillet 1941 ou
celle du 9 Janvier 1985 qui toutes réduisent le droit de
propriété du dessus pour des raisons d'intérêt
général. Il en est également ainsi du droit d'accession
à la propriété des eaux qui contient beaucoup de textes de
lois limitant ce droit, notamment le code rural français1.
Cependant concernant cette accession à la propriété des
eaux, nous l'avons tantôt signalé, au Sénégal il est
régi par des règles contenues dans le code du domaine de l'Etat
mais pour l'essentiel ce texte ne contient pas de limitation à la
propriété des eaux et cela du fait que les eaux au
Sénégal font principalement partie du domaine de l'Etat.
Signalons aussi que la propriété du dessus et surtout du dessous
ont des textes de lois les organisant au Sénégal notamment le
code minier et le code pétrolier. Ainsi donc malgré le fait que
ces lois et décrets d'application du code civil ne soit pas applicables
au Sénégal, notre pays a essayé de pallier à cette
insuffisance en adoptant ses propres lois et décrets d'application, ce
qui est source d'une insuffisance dans l'application du code civil.
B- Insuffisances dans l'application du code
civil :
Cette inapplication des lois et décrets d'application
du code civil français combinée à l'inadaptation de ce
code civil français aux réalités
sénégalaises font que ses dispositions applicables au
Sénégal à savoir celles relatives au droit de
propriété sont d'une application insuffisante dans notre pays. En
effet pour une bonne efficacité, un texte de loi a besoin d'être
précisé par des lois et décrets d'application ce qui n'est
pas le cas comme nous le soulignions du code civil français du moins
dans son application au Sénégal. Ainsi pour pallier à
cette insuffisance le Sénégal a eu recours à l'adoption
d'autres textes de lois pour surtout limiter des droits conférés
par le code civil. Il en est ainsi de la loi 2003-36 du 24 Novembre 2003
portant code minier et de la loi 98-5 du 5Janvier 1998 portant code
pétrolier. Toutes ces lois contiennent comme nous le rappelions
antérieurement des dispositions relatives à la limitation du
droit à la propriété du dessous.
Cependant nous pouvons constater la particularité du
régime sénégalais en matière de droit de
propriété. En effet ces lois sénégalaises
citées plus haut contiennent des limitations à des principes non
édictés par le législateur sénégalais. En
effet les règles relatives à la propriété du
dessous sont régies au Sénégal par l'article 552 du code
civil français. Mais tout ceci démontre s'il en était
encore besoin de l'insuffisance dans l'application des dispositions du code
civil et plus généralement du droit de la propriété
au Sénégal. En effet malgré le fait que c'est la
législation française qui s'applique dans notre pays relativement
à ce domaine, les populations font le plus souvent usage de leur droit
coutumier dans l'exercice des droits de propriété. C'est pour
cette raison que des normes comme l'usufruit et la servitude instaurées
par le code civil français ne trouvent pas échos au niveau du
Sénégal. En effet malgré le fait que pendant la
colonisation on a voulu imposer aux africains une autre conception de la
propriété ceux-ci gardent toujours leur conception traditionnelle
du droit de propriété, surtout en ce qui concerne le droit de la
propriété immobilière où jusqu'à
présent cette tendance à la sacralisation de la terre est
toujours existante dans notre société.
Ainsi donc au regard de ces multiples problèmes
liés à l'application du code civil et plus
généralement au droit de propriété au
Sénégal, il nous ait semblé pertinent de
réfléchir sur les problèmes ainsi posés et
d'apporter des propositions de solutions.
|