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Potentiel des friches industrielles des secteurs de gare pour un développement urbain durable

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par Marianne Thomann
Université de Lausanne - Licence ès Lettres 2005
  

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4. Conclusions de la première partie et

hypothèses de travail

1. L'étalement urbain qui caractérise le développement des agglomérations n'est pas durable. De ce constat sont issues de nombreuses recherches qui ont tenté de déterminer si une autre forme pouvait atteindre de meilleurs résultat en termes de consommation de ressources, de qualité de vie et de viabilité économique. Un certain consensus a commencé à émerger récemment sur une forme polycentrique en réseau, ou déconcentration concentrée, dense, mixte et structurée par les transports en commun. Pour orienter le développement urbain vers ce type de forme, la densification du tissu urbain par la régénération urbaine s'avère être une stratégie judicieuse. Les friches industrielles des secteurs de gare, en offrant des opportunités de régénération et de densification du tissu urbain à proximité de noeuds de transports publics, constituent donc un potentiel en terme de développement urbain durable. Cependant, sans la volonté de créer une bonne qualité de vie lors de projets de reconversion des friches industrielles, la densification du tissu urbain par la reprise des friches et par l'utilisation des potentiels existants en zone à bâtir pourrait mener à augmenter les nuisances urbaines et à détériorer les conditions de vie en ville, ce qui aurait pour effet de repousser les habitants et les activités en périphérie, accélérant ainsi le processus d'étalement urbain.

Nous posons comme première hypothèse que:

1) La reconversion des friches industrielles des secteurs de gare peut participer à

freiner l'étalement urbain à condition de créer des aménagements d'une certaine densité, ainsi que fonctionnellement et socialement mixtes

2. L'apparition généralisée de friches industrielles et leur perduration sont des phénomènes relatifs au mouvement de désindustrialisation qui touche nos territoires depuis la seconde moitié du 20ème siècle. La perception des friches, le discours tenu sur ces terrains ainsi que la manière d'y intervenir ont évolué au gré des préoccupations alors dominantes à chaque moment donné. Les sites industriels des secteurs de gare en particulier, fortement touchés par la désindustrialisation et le déclin du trafic marchandise par rail, ont fait l'objet d'un regain d'intérêt avec l'émergence de préoccupations liées à l'explosion de la mobilité routière, au réchauffement climatique et plus largement au développement durable. Les gares et leurs places, symboles de la modernité à la fin du 19ème siècle, puis délaissées architecturalement dans les années 1930, et fonctionnellement depuis des années 1950, sont aujourd'hui systématiquement mises en valeur, assumant un rôle non plus seulement de transport, mais aussi commercial et convivial. Les friches industrielles des secteurs de gare, participant à l'image de ces lieux, font elles aussi l'objet de réflexions et de projets nombreux, bien que complexes à concrétiser en raison d'un certain nombre d'obstacles.

Cette évolution des discours et des pratiques concernant les gares et leur environnement est prometteur pour une régénération urbaine dense à proximité des noeuds de transport public. Seulement, les processus visant à reconstruire la ville sur elle-même ne doivent pas mener à faire table rase du passé. Les friches industrielles des secteurs de gare ne doivent pas être considérées comme des espaces vides, mais bien comme des lieux à part

entière dont le patrimoine conservé jusqu'ici raconte l'histoire. Pour que la reprise de friches mène à un développement urbain durable, il est essentiel que l'identité des lieux qui sont reconvertis à d'autres usages soit préservée, gage du sens et de la pérennité du site.

Nous posons donc comme deuxième hypothèse que:

2) La mise en valeur du patrimoine industriel et ferroviaire qui fait l'histoire de

ces sites participe à la qualité des reconversions de friches industrielles des secteurs de gare.

3. Nous avons vu que les stratégies de développement territorial en Suisse

reposaient sur un modèle polynucléaire de villes reliées par le rail, sur des agglomérations structurées par les transports publics où l'urbanisation se fait linéairement plutôt que de manière diffuse, ainsi que sur la contention de l'urbanisation par la densification du tissu bâti, en particulier des espaces bien desservis par les transports publics. Le potentiel offert par les aires industrielles en friche dans l'ensemble des agglomérations montre que les opportunités de construire à l'intérieur du tissu bâti sont importantes. Dans ce contexte, la reconversion des friches industrielles, et plus spécifiquement des secteurs de gare, représente un objectif national en terme de développement urbain durable. Les CFF participent activement à la valorisation de ces sites par la reconversion de leur patrimoine foncier qui constitue une part non négligeable des terrains en friches dans les secteurs de gare. Bénéfique pour la régénération de ces espaces, la mise en valeur des terrains de gares par les CFF tend cependant à produire des quartiers gentrifiés qui, bien que mixtes fonctionnellement, ne le sont pas forcément socialement. De manière plus globale, la gestion de tels projets par des acteurs privés ne permet pas de garantir la prise en compte d'objectifs issus des politiques nationales de développement territorial ou d'objectifs issus des politiques urbaines des collectivités publiques, que ce soit en termes de transport, de logement, d'emploi, de qualité des espaces et de gestion du patrimoine.

De ce constat découle notre troisième hypothèse:

3) La qualité des projets de reconversion des friches industrielles des secteurs de

gare dépend de la capacité des pouvoirs publics à garantir la concrétisation des objectifs d'un développement urbain durable

4. Toute une série d'obstacles bloquent la réutilisation immédiate de ces terrains:

pour l'instant, le stock de friches urbaines en Suisse n'est que très partiellement disponible. Des obstacles liés à la contamination des sites, à la complexité de réaliser des projets en milieu urbain, ou encore à la volonté de certains propriétaires de ne pas construire sur leur parcelle rendent les terrains de la périphérie plus attractifs et plus rapidement disponibles pour la construction. Le double constat d'un potentiel important de densification du tissu urbain et de sa difficile utilisation nous amène à nous interroger sur les moyens d'action qui permettraient une utilisation plus systématique des friches industrielles des secteurs de gare. En effet, la complexité inhérente à la reconversion de friches industrielles, tant pour des raisons techniques que légale ou encore liées à la multiplicité des acteurs, rend la résolution des problèmes et des conflits difficilement gérable. La participation financière des pouvoirs publics et la mise en oeuvre d'outils de

gestion et de négociation appropriés donnent une plus grande chance de succès à la reprise de ces terrains.

Nous posons comme quatrième et dernière hypothèse que:

4) La concrétisation d'un projet sur les friches industrielles des secteurs de gare

dépend de la capacité des pouvoirs publics à contourner les obstacles inhérents à ce type de terrains

Afin de vérifier ces hypothèses et de déterminer s'il est possible de densifier le tissu urbain en concrétisant des projets de qualité sur des terrains à priori non-disponibles et complexes à gérer, nous nous sommes penchés sur trois situations de friches industrielles de secteurs de gares en Suisse romande: le secteur Gare/Crêt-Taconnet à Neuchâtel, le plateau industriel de Pérolles à Fribourg et la friche industrielle et ferroviaire du quartier des Eaux-Vives. L'étude de ces sites dans leurs contextes cantonal et communal, celle des structures et des outils mis en place pour l'élaboration et la concrétisation de projets de reconversion, ainsi que l'analyse de la qualité urbaine de ces projets vont nous permettre de tirer des enseignements utiles pour la mise en oeuvre de la reconversion des friches industrielles des secteurs de gare.

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