La responsabilité civile des organisateurs de loteries commerciales( Télécharger le fichier original )par Roger LANOU Université de Ouagadougou - Maà®trise en droit des affaires 2003 |
TITRE I LES FONDEMENTS DE LA RESPONSABILITE DE L'ORGANISATEUR DE LOTERIES COMMERCIALESLa responsabilité civile de l'organisateur de loteries commerciales peut avoir plusieurs fondements. Elle peut d'abord, être fondée sur la faute telle que prévue par l'article 1382 du Code civil, premier fondement retenu par la Cour de cassation française le 3 mars 198818(*). Elle peut ensuite, être fondée sur le contrat, fondement retenu par la Cour de cassation française dans deux arrêts respectivement du 11 février 1998 et du 12 juin 200119(*). A coté du contrat, il y a l'engagement unilatéral de volonté qui, malgré les réticences dont il fait l'objet dans le droit positif français, a été retenu par la Cour de cassation française dans un arrêt du 28 mars 1995 et dans un autre arrêt de la Cour d'appel de Toulouse du 14 février 199620(*). Elle peut aussi être fondée sur le contrat apparent, proposé par certains auteurs dont le professeur BENABENT. Elle peut enfin avoir pour fondement le quasi-contrat, qui a été préféré par la chambre mixte de la Cour de cassation française dans deux arrêts du 06 septembre 200221(*). Nous aborderons cette étude par le fondement délictuel, la faute civile délictuelle (chapitre I) avant de l'achever par une analyse des autres fondements possibles (chapitre II).
CHAPITRE 1 LE FONDEMENT DELICTUEL DE L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL« Véritable clé juridique universelle » selon MM. GAVALDA et LEYSSAC de LUCAS22(*), l'article 1382 du Code civil fait de la faute le fondement classique de la responsabilité civile. L'étude de la faute en tant que fondement de la responsabilité de l'organisateur de loterie commerciale soulève de nombreuses questions notamment celle de la consistance exacte de cette faute et des conditions de sa réalisation (Section 1), et celle de l'appréciation de celle-ci par les juges (Section 2).
SECTION 1 LA FAUTE DE L'ORGANISATEUR DE LOTERIES COMMERCIALESL'article 1382 du Code civil, tout en faisant de la faute le fondement de la responsabilité, ne la définit pas. Mais de façon classique, il est exigé la réunion de deux éléments à savoir l'élément matériel et l'élément moral autour desquels s'articulera notre étude. §1 Une faute intentionnelleLa faute, c'est le fait dommageable, celui qui a causé un préjudice23(*). Encore faut-il que l'auteur ait volontairement agi avec une idée sur les conséquences qui pourraient en découler. Il sera étudié dans un premier temps l'intention dans la rédaction des documents publicitaires (A), et dans un second temps le caractère ambigu de ceux-ci (B). A. L'intention dans la rédaction des documentsGénéralement pratiquées par les sociétés de vente par correspondance, les loteries publicitaires visent à inciter le prospect24(*) à commander des produits en créant chez lui l'espoir que ces commandes augmenteront ses chances de gain à la loterie proposée. Les loteries sont un élément de la politique publicitaire mise en place par le service publicité de la direction commerciale de la société25(*). En effet, la rédaction des documents publicitaires, loin d'être hasardeuse, fait l'objet d'études minutieuses de services spécialisés ayant de très grandes compétences rédactionnelles. Il n'est alors pas une phrase sur le document publicitaire qui n'ait été vue et revue. Nous pouvons affirmer avec la Cour d'appel de Paris qu'il y a présentation frauduleuse « volontairement » trompeuse des documents publicitaires26(*). Leur style de rédaction est volontaire et leurs contenus délibérément rendus ambigus pour obtenir un résultat donné sur le prospect. * 18 Civ. 2ème, 3 mars 1988, JCP 1989, II, 21313, note de G. VIRASSAMY. * 19 Civ. 2ème, 11 février 1998, JCP 1998, II, 10156, note de G. CARDUCCI ; Civ. 1ère, 12 juin 2001, JCP 2002, II, 10104, note de D. HOUTCIEFF. * 20 Civ. 1ère, 28 mars 1995, D. 1996, Jur. p. 180, note de J.-L. MOURALIS ; CA Toulouse, 14 février 1996, RTDciv. 1996, 397, obs. J. MESTRE. * 21 Cass. Ch. mixte, 6 septembre 2002, Petites Affiches du 24 octobre 2002, n°213, note D. HOUTCIEFF. * 22 Civ. 2ème,3 mars 1988, D. 1990, Somm. , p.105, obs. Ch. GAVALDA et Cl. LUCAS de LEYSSAC. * 23 F.TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, les obligations, Précis Dalloz, 5ème éd. 1993, n°584. * 24 Ce terme est utilisé par la doctrine analysant les loteries publicitaires, il désigne la personne à qui l'annonceur, aussi appelé le prospecteur, envoie ses propositions de participer à une loterie ou ses annonces de gros lot ; voir note de HENRY H., Les loteries dans les contrats par correspondance, JCP 86, I, n°3264. * 25 R. MAURY et J.GUIN, Economie politique, cours élémentaires, droit-économie, Sirey, 7ème éd., 1984, p.232. * 26 CA Paris, 23 octobre 1998 cité par M. GRIDEL Conclusions ss. arrêts 6 septembre 2002, www.courdecassation.fr. |
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