Chapitre 2. La question de la fédération
traditionnelle héritée du passée juridique andorran dans
le processus de réforme.
Nous allons tenter d'aborder la question de la réforme
Constitutionnelle. En effet, au- delà d'une analyse intrinsèque
du Processus Constituant (Procés Constituent), la question
centrale à laquelle nous allons essayer de répondre
considérera le processus dans son ensemble, et la problématique
de la continuité dans institutions antérieures: quelle sera la
place faite aux intéractions des deux entités de base du
découpage administratif andorran? Quelles compétences seront
octroyées aux paroisses?
Dans un premier temps, sera développée la
question du découpage insitutionnel dans le processus de réforme
andorran, puis, dans une deuxième partie, seront abordées les
développements constitutionnels issus des Lleis
Qualificades63 de 1993.
Le processus de réforme constitutionnel, et notamment
les négociations qui ont eu lieu entre 1990 et 1992, mérite une
étude exhasutive que nous ne produirons pas ici, étant entendu
qu'il ne s'agit pas du but de notre étude. En effet, cette étude
de cas peut être appréciée par le travail de Laura Roman
Martin, en catalan, dans son ouvrage précité, et qui se
présente sous la forme du chapitre 3: « el procés
constituent ».
En ce qui nous concerne, nous nous baserons à la fois
sur son travail, mais aussi sur l'étude d'un double volume
éditée en 2006 par le M.I. Consell General,
intitulé « El Procés Constitucional ». Cette
édition regroupe, en fait, toutes les retranscriptions écrites
des négociations tripartites. Elle constituera, plus que le premier
ouvrage cité, notre base argumentaire.
63 Lleis qualificades: principe juridique
dirèctement influencée par le droit constitutionnel espagnol.
Peut être considéré comme l'équivalent
français des « Lois organiques ».
Section 1. Exposé du déroulement du
processus
La résolution 946 du Conseil de l'Europe du 11 mai 1
99064 constitue le point d'ancrage le plus significatif pour parler
du début du processus constituant.
En effet, par ces recommandations, le Conseil de l'Europe ne
fait que confirmer les attentes de la classe politique andorrane. Attentes
d'ailleurs avouées ou non. Le fait le plus marquant dans cette
résolution, outre l'ouverture de négociations de rattachement
d'Andorre au Conseil de l'Europe, ou en tout cas, une première approche,
ce même Conseil lance un crit d'alarme au Conseil Général
et appelle celui-ci, au même titre que les Coprinces, à entamer
des négociations quant à la rédaction d'une future
constitution.
Nous avons déjà fait part de l'existance de
cette résolution, sans pour autant la détailler. De plus, il est
intéressant de rappeler notre théorie, selon laquelle l'Andorre,
dans les années 80, a vu son ordre juridique s'essoufler par, tout
d'abord, une inclusion du droit international, et, d'autre part, un
dysfonctionnement des réformes entamées avec le contexte
international et les évolutions nécessaires.
Ainsi, donc, le droit international, pour la première
fois, a fait son entrée dans l'ordre juridique andorran. On peut citer
par exemple l'addition, par décret des Coprinces, de la
Déclaration universelle des droits de l'homme de l'Organisation des
Nations Unies, ou bien, les accords commerciaux avec la Communauté
Economique Européenne en décembre 1989.
Cette inclusion du droit international, écrit, dut
faire face à la persistance du droit coutûmier andorran, et par
delà, à un droit qui s'est toujours « auto-alimentait
», de type endogène. Ainsi, ceci provoque nénamoins la
nécessité d'adapter le droit interne, ou en tant cas son
ordonnement aux réalités internationales, pour que ecelui-ci soit
plus efficace. Une Constitution apparaissait comme la meilleure des
solutions.
Enfin, les dysfonctionnement internes ont joué un grand
rôle dans l'activation du
64 « El nous estat andorrà: un estudi juridic
», op.cit. p.59-60
processus constituant. Les Coprinces eux-même en avaient
appelé au Conseil Général pour, lors du décret
conjoint de 1981 portant création du gouvernement élu, entamer un
ensemble de réformes institutionnelles permettant la concordance des
institutions andorranes avec le reste du monde.
Des élections ont lieu en décembre 1989.
D'ailleurs, il faut noter que l'on commence déjà à parler
de Constitution dans les rangs des élus parroissiaux
d'Escaldes-Engordany. Une décision du Conseil Général de
juin 1990 demande aux Coprinces, téhoriquement garant de la
souveraineté puisque situés à la tête de la pyramide
juridique eandorrane, d'entamer des négociations. Le retour se fera
attendre un an après et les premières négociations
tripartites commenceront dans le grenier65 de la Maison des
Vallées le 12 avril 1991.
Une première question surgit: qui portera à bien
les négociations? Ainsi, il s'agit de déterminer qui
possède la souveraineté. Comme nous l'avons dit, les
négociations seront tripartites: Le Conseil Général, la
délégation épiscopale et la délégation
française. Ceci pour respecter la tradition séculaire de partage
de souveraineté, et malgré la légitimation populaire
croissante de l'assemblée andorrane. Cependant, il faut noter deux faits
importants qui viendront justifier la place prépondérante de la
délégation du legislatif andorran.
Tout d'abord, dans la décision du Conseil de l'Europe
de 1990, il est clairement demandé à l'Andorre (Coprinces et
représentants du peuple), de mettre fin au doublon de
souveraineté, une jugée de droit, celle des Coprinces, et l'autre
de fait, celle du Conseil Général.
Enfin, le deuxième élèment put être
dégager d'une décision du Conseil des Vallées qui se
proclame, en juin 1992, « assemblée constituante ». Ainsi, de
manière endogène, il se considérera comme portant la voix
du Peuple Andorran.
Un exemple intéressant: lors des négociations,
la délégation épiscopale a joué la politique de la
« chaise vide »66 durant quelques mois, mais les
discussions, par conséquent bilatérales, ont tout de même
suivi, en partie cependant, leur chemin.
La deuxième question qui surgit lors de ces
négociations porte sur le découpage
65 Anédocte relevée lors de la visite que j'ai
effectué à la Casa de la Vall en janvier 2007.
66 Expression tirée du comportement du
Général de Gaulle, alors Président de la République
française, lors des négociations d'entrée du Royaume-Uni
dans les années soixante. Ceci pour montrer son opposition.
interne et institutionnel de l'Andorre. C'est bien entendu
cette question qui nous intéresse, car les discussions porteront
principalement sur le rapport entre les paroisses (et les Comuns,
organes administratifs), et l'Etat andorran.
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