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Les technologies de l'information géographie dans les collectivités territoriales : la géomatique intercommunale à travers l'exemple des Communautés d'Agglomérations du Muretain et du Sicoval

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par Boris Mericskay
Université de Toulouse le Mirail - Master 1 géographie 2007
  

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3.4.1.2 Les conflits sous-jacents liés à la possession de l'information

Nous reprenons ici des théories qui renvoient à la sociologie des organisations développées précédemment (Cf. partie 1.2.3.1). Nous pouvons nous interroger sur la façon dont les objectifs des individus peuvent s'articuler autour d'un projet SIG collectif.

M. Bonami évoque cette dualité entre objectifs d'acteurs et objectifs collectifs :

« Tout d'abord les agents de l'organisation participent aux objectifs de l'organisation. Mais ils poursuivent en même temps des buts et des besoins personnels. Ces derniers peuvent être parfois tellement prégnants que la mission de l 'organisation, c 'est-à -dire ce que lui donne sa raison d'être devient une préoccupation tout à fait secondaire pour les agents. »106

La géomaticienne en charge de l'observatoire de l'habitat explique :

« Il existe plusieurs bases Entreprises : une au service économie, une au service communication, et une au service fiscalité. On a trois chiffres diffé rents. D 'où l 'utilité du centre de ressources afin d'avoir une base Entreprise unique qui centraliserait les informations avec des données fiables et mises à jour. »

L'accès à l'information pour les géomaticiens est difficile, il ne faut pas oublier que l'information « c'est du pouvoir », et elle appartient aux agents qui la produisent. Cela renvoie à des idées comme « la captation de l'information » et le fait que les agents pensent être « dépossédés de leur travail ». Cette situation découle d'un problème de légitimité et de reconnaissances des services SIG au sein de leur organisation.

3.4.2 Le problème de légitimité et de reconnaissance

3.4.2.1 Reconnaissance et légitimité du géomaticien

Il est en premier lieu nécessaire de définir la notion de légitimité. Pour M. Bonetti, « la légitimité des acteurs peut être lié à leur fonction, à leur compétence, ou aux relations qu 'ils ont su développer avec les partenaires impliqués » 107 . Il est évident que le géomaticien tire sa légitimité au sein de collectivité par sa compétence technique en géomatique. Mais si les agents de l'organisation ne connaissent pas la géomatique et ce que le service SIG et les TIG

106 BONAMI M. dir, 1993, Management des systèmes complexes : pensées systémiques et intervention dans les organisations, Université De Boeck, 272 p.

107 BONETTI M., 1991, Développement social urbain, stratégie et méthodes, L'Harmattan, 269 p.

en général peuvent leur apporter, dès lors il n'y aura pas de légitimité car pas de connaissance et de reconnaissance.

Pour D. Delerba108 la condition essentielle pour réussir la mise en oeuvre d'un SIG est :

« La légitimité et la reconnaissance de la cellule SIG comme un service à part entière. Car, tôt ou tard, il faudra lui donner davantage de moyens, de compétences et de formations. Or, au contraire des services historiquement installés comme la voirie, le service SIG est encore peu reconnu. »109

C'est essentiellement l'idée d'un service SIG à part entière qui est importante, c'est-à-dire un service au service des autres services, un service qui peut apporter de nouvelles méthodes de travail, des appuis techniques en termes de TIG et de nouvelles solutions informatiques. C'est pour cela que le service SIG doit être connu et reconnu comme tel par tous les services et les agents de la collectivité. Reprenons une citation de H. Pornon qui résume bien ce que nous venons de décrire : « s'ils veulent contribuer à la transformation des organisations, les géomaticiens devront être de bons négociateurs, et se soucier de leur légitimité. ».110.

Au cours des entretiens auprès des acteurs du Sicoval, un terme est ressorti plusieurs fois, celui de technostructure. Dans sa typologie d'acteurs, H. Mintzberg la définit comme suit : « dans la technostructure, on trouve les analystes qui servent l 'organisation en agissant sur le travail des autres [...] Ce sont eux qui sont les moteurs de la standardisation »111. Dans le cadre des EPCI, on peut penser à des services en charge de l'informatique, des méthodes, des marchés et des SIG. Cette perception du service SIG comme une technostructure est essentiellement ressentie en commune par les élus et les techniciens.

A. Turlan explique cette situation :

« On voulu montrer tellement de choses avec le Sicoval auprès des communes que du coup, on a utilisé des outils de communication qui ne leur ont pas donné le vrai visage de l'intercommunalité. C'est le risque pour nous en tant que SIG, du coup on ne croit plus en ces données. »

108 Animateur national du groupe Topo SIG de l'Association des ingénieurs Territoriaux de France (ATTER) et responsable de la direction de l'information géographique de Nice.

109 D. DELARBA, 2006, in La Gazettes des Communes, N° 84/1854 du 25/09/2006, Dossier SIG p.26-31

110 PORNON H., 1998, Système d'information géographique, pouvoir et organisations, Ed. L'Harmattan, 255 p.

111 MINTZBERG H., 1986, Le pouvoir dans les organisations, Les éditions d'Organisation, 688 p.

Ce problème de confiance des données de la BDT du Sicoval est bien illustré par cet échange entre une conseillère municipale et le maire de Ramonville lors d'un conseil municipal :

« M.RIVALS demande s 'il existe un lien entre la base de données évoquée cidessus et celle du SICOVAL.

M. Le Maire explique que les bases de données de l'AUAT portent essentiellement sur l'emploi, le logement etc. alors que la BDT du SICOVAL n 'est qu 'une
cartographie du territoire du SICO VAL. »
112

Ces problèmes de légitimité et de reconnaissance sont également ressentis en interne, pour la géomaticienne en charge de l'observatoire, «on n 'est pas reconnu comme un service des autres services, pour les gens on est les techniciens SIG de l'aménagement. On nous connaît, mais les gens ne savent pas ce que l'on fait et ce que l'on peut faire pour eux ».

Pour une autre technicienne SIG « on n 'est vraiment identifié que comme éditeur de cartes et de plans, beaucoup de personnes ne savent pas ce que propose et peut faire la BDT pour eux, car ils pensent que nous travaillons uniquement pour le service Aménagement du territoire ».

De leur côté, les agents des différents services qui sont amenés à utiliser les TIG ont des conceptions qui peuvent diverger sur le problème de reconnaissance et d'identification. Un des aménageurs des espace ruraux déclare « le SIG est sous exploité, les autres services ne voient que le côté photo, communication alors que c 'est l 'aval qui est important ». De son côté, une urbaniste déclare, « la BDT, ils sont très bien identifiés, tout le monde les connaît ». Au regard de cette dernière citation, on comprend bien que les perceptions des agents communautaire sur la situation de la BDT sont très variables.

Pour C. Michel, la situation de la CAM est similaire : « les services de la collectivité ont du mal à bien identifier le rôle et les capacités de la cellule SIG. Par conséquent ce sont des services qui utilisaient déjà ces outils qui s 'investissent dans les projets comme le service Environnement et Service à la famille ».

Ces difficultés de reconnaissance du service SIG sont aussi liées au manque d'information des services SIG eux-mêmes sur ce qu'ils font et ce qu'ils peuvent apporter aux autres services.

112 Cf. Annexe Compte rendu du Conseil municipal de Ramonville du lundi 27 juin 2005 (p. 151).

Pour A. Turlan, « on perçoit le problème de légitimité complètement, ceci est dû a un manque d'information, on se remet aussi en cause. Les responsabilités sont partagées mais le problème est là ».

3.4.2.2 Une remise en cause des services SIG au niveau de la communication
interne

Pour les géomaticiens du Sicoval, ces problèmes de légitimité, de reconnaissance sont en partie liés à un manque de communication de leur part. Pour eux, il faut que la BDT trouve sa place au sein de la collectivité et pour cela il est nécessaire qu'ils communiquent plus largement au niveau de la collectivité. Ils parlent tous d'aller sur le terrain pour expliquer et montrer ce qu'ils font et ce qu'ils peuvent apporter.

A. Turlan déclare : « il faut communiquer mais on ne le fait pas [...] il faut que l 'on recommunique sur notre rôle, notre spécificités, nos moyens, nos missions ».

Une géomaticienne explique :

« Le SIG a été promu par le cadastre, il traîne ça comme une casserole. Ca lui a permis d'exister, mais ça l'a limité aussi dans son expansion, c'est à nous de changer ça, en communiquant, en expliquant ce que nous, nous faisons et ce que les autres peuvent lui apporter. Il faut l 'ouvrir, nous seuls on ne fait rien. Il faut changer sa perception. »

De leur côté, les techniciens qui s'intéressent au SIG font aussi la promotion du SIG auprès des autres services et de leur collègues, l'un d'entre eux déclare « à notre façon on essaye de montrer l 'intérêt de cet outil, ces capacités, ce qu 'il peut apporter, on fait passer le message aux services avec lesquels on travaille régulièrement », un autre rajoute « il est vrai qu 'il y a un véritable manque de communication et d'information de la part du service SIG ».

Pour A. Turlan, tout ceci renvoie à un problème d'identification, de visibilité :

« C 'est un travail de terrain, il faut aller expliquer, montrer des exemples. Mais c 'est aussi une visibilité, pour que l'on puisse communiquer, faire voir ce que l'on fait, il faut aussi qu 'on nous identifie. Il faut que dans un organigramme, un aspect fonctionnel on soit identifié ce qui n 'est pas le cas. »

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams