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Les institutions juridictionnelles dans l'espace communautaire ouest africain

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par Sally Mamadou THIAM
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - DEA Droit de l'intégration et de l'OMC 2005
  

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Paragraphe I : L'application du droit communautaire

L'espace intégré de l'UEMOA et de l'OHADA n'est en réalité qu'un ensemble d'Etats qui se sont regroupés afin de favoriser le rapprochement de leurs différents peuples par le biais de la règle de droit.

Par conséquent, les règles communautaires ne sont destinées qu'aux seuls Etats et aux particuliers. Justement, étant donné que dans l'ordre interne des Etats, il appartient aux juridictions nationales d'appliquer la règle de droit, c'est à ces mêmes juridictions d'assurer l'effectivité de la réglementation communautaire par son application sur le territoire de chaque Etat. Mais à coté de cette compétence reconnue aux juridictions nationales, il faut relever que les juridictions communautaires aussi jouent un grand rôle dans l'application du droit commun. Si les juridictions communautaires partagent ce privilège d'application du droit commun avec les juridictions nationales, il existe des matières par rapport aux quelles le règne des premières est sans partage. Il en est d'abord ainsi du contentieux de la légalité mais aussi pour certaines matières spécifiques dans le contentieux de pleine juridiction Il faut tout de suite signaler que ce type de contentieux propre aux juridictions communautaires fait l'objet d'une consécration beaucoup plus élaborée au sein de l'UEMOA que dans l'OHADA. Il comprend trois éléments le recours en appréciation de légalité, le recours en exception de l'illégalité et le recours préjudiciel en interprétation de la légalité.

Pour ce qui est du premier type de recours, il s'agit du recours en annulation prévu expressément dans les textes de l'UEMOA, particulièrement le chapitre II du règlement de procédure de la cour de justice. Au termes de l'article 15 de ce chapitre la cour est compétente pour connaître du recours en appréciation de légalité, l'alinéa 2 dispose que : « ... Le recours en appréciation de légalité est dirigé contre les actes communautaires obligatoires  les règlements, les directives ainsi que les décisions individuelles prises par le conseil et la commission... ». Le recours en appréciation de légalité peut être conçu comme étant la transposition à l'échelle régionale du recours pour excès de pouvoir applicable dans l'ordre interne des Etats. Comme tout recours la cour est saisie au moyen d'une requête signée généralement par un avocat, elle est signifiée à la partie adverse accompagnée d'un cautionnement.

La requête peut être introduite conformément au même alinéa second de l'article 15 par toute personne physique ou morale, contre tout acte d'un organe de l'Union lui faisant grief.

En outre il s'y ajoute que le recours est même ouvert aux organes de l'Union, tels que la commission, le conseil, ou encore les Etats membres contre les règlements, les directives et décisions. Ainsi considéré ce recours s'exerce contre les actes unilatéraux de l'Union, notamment les directives, les règlements, les décisions, à l'exclusion des actes additionnels. Et lorsque la cour statue, son office consistera à confronter les actes en questions avec le Traité de base et les autres conventions. Comme en droit interne les actes en cause doivent faire grief, c'est-à-dire modifier l'ordonnancement juridique, par conséquent les avis et recommandations ne peuvent faire l'objet du recours. Par ailleurs ce recours peut donner lieu à des cas d'annulation d'un acte communautaire, lorsqu'il y a eu vice de forme et de procédure 42(*)par exemple l'absence de motivation ou la violation de la procédure contradictoire. Il en est ainsi également en cas d'incompétence ou de détournement de pouvoir car les autorités communautaires ont des compétences d'attribution. Mais surtout l'annulation est retenue lorsqu'il y a violation du traité de base et des textes subséquents.

A l'heure actuelle l'affaire qui défraie la chronique en cette matière c'est sans nul doute le licenciement abusif du commissaire ivoirien Eugène Yaï. Dans cette Arrêt rendu le 05 avril 200543(*), la cour de justice de l'Union a déclaré nul et de nul effet l'acte additionnel n°01/2005 du 11 mai 2005 nommant monsieur Jérôme Bro Grebe en qualité de membre de la commission de l'UEMOA pour remplacer monsieur Yaï.

Mais le curieux dans cette affaire, c'est que sous les pressions de la Côte d'Ivoire la conférence des chefs d'Etats et de gouvernement va encore adopter l'Acte additionnel n°04/2006 pour réaffirmer la nomination de monsieur Jérôme Bro, ce qui est aujourd'hui synonyme de licenciement pour monsieur Eugène Yaï. Ce remplacement conformément au premier arrêt de la CJU sera encore jugé illégal par la cour communautaire, qui convient toutefois de l'entrée en vigueur de l'acte additionnel dans le but de donner une base légale à la nomination du nouveau membre de la commission, bien que illégalement effectuée. Dans cette affaire il se pose une question très cruciale, celle de la crédibilité de la cour de justice. Est-ce que les chefs d'Etats de l'Union dans le seul but de satisfaire les désires d'un Etat membre, vont en tant que animateur de l'organe suprême de l'UEMOA, faire totalement fi de la décision de justice de la cour ? Lequel organe de contrôle a été justement créé pour servir l'effectivité du droit communautaire. Même si la conférence n'en juge pas encore la portée, la suite qu'elle donnera à cette affaire sera très décisive pour l'avenir de l'UEMOA. Car si l'organe suprême viole le droit communautaire, c'est dire que l'Union risque d'être une zone de non droit dans l'avenir.

Après ce premier recours il existe un autre type dont les juridictions communautaires sont les seules compétentes.

Le recours en exception d'illégalité est prévu au sein des deux cours communautaires de l'UEMOA et de l'OHADA, mais comme pour le recours sus évoqué il fait l'objet d'une réglementation plus stricte dans la Cour de justice de l'Union. En effet il est permis à toute personne partie à un litige de soulever une exception à l'encontre d'un acte d'un organe de l'organisation. Mais l'exception d'illégalité ne vise pas à faire annuler un acte, mais à le déclarer inapplicable en l'espèce même après l'expiration du recours en annulation. Lorsque c'est des requérants ordinaires, l'exception d'illégalité aura pour intérêt de corriger les restrictions auxquelles le traité subordonnait le recours en annulation des particuliers contre les décisions et règlements.

Mais quand c'est des Etats ou des institutions qui saisissent le juge, l'exception d'illégalité devra servir à empêcher l'application d'actes illégaux qu'ils auraient pu attaquer, mais qu'ils n'ont pas pu faire dans le cadre du délai du recours en annulation. Dans ce cas de figure le juge est saisi par la voie de la question préalable, à la quelle il devra répondre. Comme autre catégorie de contentieux par rapport au quel la compétence est réservée aux juges communautaires, on peut relativement citer le contentieux de l'interprétation44(*) .Mais le contentieux de la légalité n'est pas la seule matière de compétence des juridictions communautaires, celles-ci peuvent aussi connaître des litiges de pleine juridiction. Si l'on considère la réglementation de l'UEMOA et de l'OHADA s'agissant du contentieux de pleine juridiction, leurs juridictions sont compétentes à deux niveaux différents. En effet il y a des matières de première saisine, c'est-à-dire lorsque la question est obligatoirement portée en premier lieu devant le juge communautaire. Mais également comme tout contentieux de pleine juridiction les cours communautaires sont compétentes par la voie de la cassation

Les juridictions communautaires ne sauraient avoir des compétences bornées au seul contentieux de la légalité. C'est la raison pour la quelle la CCJA et l'OHADA sous peine de voire leur rôle trop réduit ou inexistant sont compétentes en matière de responsabilité, de contentieux de la concurrence, ou de la fonction publique. Pour la responsabilité il faut dire qu'elle fait naturellement l'objet d'une consécration dans tous les textes régissant les juridictions africaines. Dans l'UEMOA le paragraphe 5 de l'article 15 du règlement de procédure de la cour dispose que : « la cour de justice est seule compétente pour déclarer ou engager la responsabilité non contractuelle et condamner l'Union à la réparation du préjudice causé par des agissements matériels, soit par des actes normatifs des organes ou de ses agents dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leur fonction... ».

L'action en responsabilité quelque soit le cas peut être intentée par les particuliers contre l'Union, cette dernière peut également engager la responsabilité des particuliers.

Il y a aussi le contentieux individuel de la fonction publique, qui peut être porté devant les juridictions communautaires. En effet il existe un ensemble de règles régissant les personnels de l'UEMOA et de l'OHADA, il en est ainsi par exemple du règlement 1/98 du 30 janvier 1998 relatif au régime applicable au personnel de l'OHADA. Ces règles constituent le statut de ces personnels qui fixe les droits et obligations du personnel qui peut être fonctionnaire ou non fonctionnaire. Cependant comme dans tout rapport humain, il peut survenir des litiges entre l'organisation et les agents. C'est la raison pour laquelle les textes qui régissent les cours communautaires donnent compétence à celles-ci pour connaître de ces litiges. C'est le cas du règlement de procédure de la CJU qui à l'alinéa 4 de son article 15 habilite la cour à statuer sur tout litige entre les organes de l'union et leurs agents dans les conditions déterminées au statut du personnel.

Comme autres contentieux exclusifs aux juridictions communautaires, il faut noter celui qui est relatif à la concurrence, aux litiges financiers et aux recours en manquement contre les Etats. Mais ces contentieux ne sont prévus à l'heure actuelle que dans le cadre de l'UEMOA. Cela peut aisément se comprendre, d'une part par la nature des normes de l'UEMOA qui visent dans leur majorité expressément les Etats et d'autre part il n'existe à l'heure actuelle aucun Acte Uniforme devant portant sur ces matières. Ainsi, lorsqu'elle est saisie, la CJU peut être amenée à se prononcer sur les décisions et sanctions que la commission a pu prendre contre les entreprises qui n'ont pas respecté le principe de la libre concurrence ou bien celles qui ont abusé de leur position dominante sur le marché de l'UEMOA. Quant au recours en manquement il est également prévu par l'alinéa 1er de l'article 15 du règlement de procédure de la CJU.

En effet, selon la réglementation la cour de justice connaît des recours de la commission ou de tout Etat membre pour tous manquements que les Etats accusent par rapport aux obligations communautaires qui les incombent. Enfin concernant le recours financier il ne fait pas l'objet d'une consécration expresse par l'UEMOA, contrairement à la convention de la cour de justice de la CEMAC mais il s'agit essentiellement du contentieux bancaire. Au demeurant il faut dire que les juridictions communautaires de l'UEMOA et de l'OHADA disposent d'une compétence générale, elles peuvent être saisies par les juridictions nationales dans le cadre du recours préjudiciel ou consultatif pour un éclairage sur le droit communautaire. Mais elles peuvent être saisies également par toutes personnes physiques ou morales pour des matières qu'elles sont seules à pouvoir connaître.

En plus de la compétence en matière d'application du droit commentaire, les juridictions communautaires ont également en commun l'interprétation du droit commun.

* 42 La jurisprudence de la cour de justice l'UEMOA s'est prononcée à deux reprises sur le vice de forme dans des décisions rendues le même jour. Le 29 mai 1998 Sakho Abdurahmane c/ commission de l'UEMOA 

* 43 Arrêt n° 01/2006 du 05 avril 2006

* 44 Voir supra, paragraphe II

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld