Pour une loi cadre sur l'eau en Haiti( Télécharger le fichier original )par Montes Charles Universite d'Etat d'Haiti, Faculte de Droit et des Sciences Economiques - Licence en Droit 1986 |
Section 2- NECESSITE D'UNE REFORME DE LA LEGISLATION SUR LE REGIME DES EAUX1 Inadéquation de la législation existante En fait, déterminer si les mécanismes de la législation existante sont inadéquats pour protéger suffisamment la ressource en eau relève certainement d'un choix de société. Nous croyons cependant qu'il était de mise, dans le cadre de ce mémoire, de rétablir certains faits quant à la réalité juridique de l'eau en Haïti. Dans leur ensemble, comme nous l'avons constaté au chapitre deuxième, les textes essentiels relatifs à l'eau remontent donc aux dernières décennies du siècle dernier. Ils ont été élaborés en fonction des besoins et des circonstances, de telle façon que la législation haïtienne actuelle relative à l'eau se présente sous forme d'un ensemble de textes épars, mis à jour par étapes à des dates différentes (Collot, 1997). Cette législation n'est plus aujourd'hui adaptée à l'organisation moderne du pays et ne répond plus aux besoins de son développement socioéconomique. Les nécessités du développement social et économique imposent de recourir à l'aménagement de l'eau pour satisfaire les besoins des populations. Ces besoins sont eux-mêmes en continuelle croissance, souvent concurrentiels, voire contradictoires, ce qui rend le processus de gestion de l'eau fort complexe et de mise en oeuvre difficile. De notre avis la législation actuelle de l'eau n'est pas tout à fait adéquate pour assurer la protection et la gestion intégrée de nos ressources hydriques. En effet, les conditions actuelles de l'utilisation de l'eau ne sont plus celles qui prévalaient au début du siècle dernier où les ressources en eau étaient beaucoup moins sollicitées que de nos jours, en raison de la faiblesse de la demande en eau et des techniques de mobilisation peu performantes. C'est pour toutes ces raisons que la refonte de la législation actuelle des eaux et son unification en une seule loi s'avèrent nécessaire. Dans le cadre de cette refonte, cette loi ne se limitera pas à la refonte de la législation en vigueur, mais s'attachera également et surtout, d'une part, à la compléter par des dispositions relatives à des domaines qu'elle ne couvrait pas auparavant et, d'autre part, à apurer le régime juridique des ressources en eau. 2 Justifications pour la révision de la législation actuelle Cette législation devrait être révisée pour, au moins, trois motifs principaux : a) La première justification de la révision de la législation sur le régime des eaux a trait à la clarification des rôles et des fonctions des deux ministères qui interviennent dans son application, à savoir le ministère de l'Agriculture et le ministère des Travaux Publics L'étendue des pouvoirs détenus par les deux ministères, la séquence de leurs interventions ainsi que leurs responsabilités respectives devraient être clarifiées. Actuellement, explique Collot : 'Le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications impliqué dans la distribution d'eau potable alors que le Ministère de l'Agriculture assure le contrôle de l'usage de l'eau en général. Dans le même domaine de la distribution de l'eau potable interviennent également le Service National d'Eau Potable (SNEP) à l'échelle nationale, la Centrale Autonome Métropolitaine de l'Eau Potable (CAMEP) et le POCHEP, ce dernier étant placé sous la tutelle du Ministère de la Santé Publique. Les deux premiers développent la politique de l'eau potable du Ministère des Travaux Publics et de ce fait participent concurremment avec le Ministère de l'Agriculture à la protection et au contrôle de l'usage des eaux superficielles et souterraines, des sources, des rivières et des bassins hydrauliques dans un système de distribution d'eau".28(*) b) Le deuxième élément de justification de la révision de la législation sur le régime des eaux est le besoin de simplification du langage afin de mieux exprimer les réalités juridiques qui sont en cause et d'éliminer les aspects qui ne correspondent plus au contexte actuel. c) Enfin, la population désire de plus en plus avoir accès aux cours et plans d'eau à des fins récréatives. Le propriétaire riverain détient alors pratiquement une occupation exclusive de cette partie de terrain limitant ainsi, dans plusieurs cas, l'accès aux cours d'eau. La solution à ce problème n'est pas facile. Certaines pistes de réflexion doivent être envisagées. L'une d'entre elles serait d"établir des normes et conditions d'utilisation des terrains que les riverains possèdent près des cours ou plans d'eau. Les citoyens non riverains pourraient ainsi avoir accès aux cours ou plans d'eau. En somme, la principale réponse attendue de cette analyse, c'est l'instauration d'un véritable droit haïtien de l'eau. Cette réforme suppose : § la mise en place d'une loi-cadre sur l'eau et les milieux aquatiques établissant les principes de la protection et de la pérennité de la ressource, de la légitimité des usages, de l'accès du public à l'eau, de la gestion intégrée et assurant l'harmonisation du corpus juridique déjà en place sur l'eau; § la réforme du cadre administratif afin d'assurer une meilleure concertation des divers ministères concernés afin d'assurer la mise en oeuvre de la gestion à l'échelle du bassin versant et afin de permettre un débat démocratique sur la gestion de l'eau. * 28 Gelin Collot, Diagnostic de la législation de l'eau en Haiti. MDE, décembre 1997 |
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