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De la neutralité du service public de média en temps de crise de légitimité. Cas de la radio télévision congolais.


par Jonathan KENDWA
Université Libre des Pays des Grands Lacs/ULPGL Goma - Licence en Droit Public 2018
  

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II. Problématique

L'actualité congolaise est caractérisée par les enjeux du processus électoral et la crise du professionnalisme dans l'administration publique. Ces deux questions troublent actuellement la quiétude de la population congolaise qui demeure jusqu'à présent dans une incertitude faisant perdre milliers de vie humaine. Le rôle des associations et mouvement civiques, des ONG et Asbl, des groupes de pression et des partis politiques, des entreprises de presse privées et publiques accroit davantage.

Il ne fait nul doute que beaucoup d'études et de textes législatifs se réfèrent au Service Public, mais si la mention est très fréquente, dans la loi, jamais la notion qu'elle recouvre n'est vraiment définie.8 Pour certains juristes, il s'agit d'un simple label appliqué aux activités d'intérêt général qui permettent au juge de déterminer sa compétence dans certains arrêts. Nombreux sont les auteurs qui s'accordent en tout cas sur la difficulté de dessiner les contours précis de la notion. Dès lors, définir le concept service public devient une forte difficulté puisque la notion elle-même en soi est bien complexe quand bien même les grands précurseurs du droit administratif ont fini par éprouver la même pénurie.

Mais au-delà de toutes ces difficultés, la doctrine a tenté d'apporter quelques éléments de définition en tenant compte de deux grands critères fondamentaux :

? D'un côté le service public est une fonction à remplir et une mission à assurer ;

? De l'autre côté, le service public est aussi une activité concrète et l'organisme qui la prend en charge.

Il convient donc de comprendre le service public à la fois comme une prestation offerte et comme un organisme qui se charge de l'accomplir.

7 Article 193 de la constitution de République Démocratique du Congo du 18 février 2006 telle que modifiée par la n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de de certains articles de la constitution, in Journal Officiel RDC, Cabinet du président de la République, n° spécial, 52eme Année, Kinshasa 5 février 2011.

8 G. ANNE, La notion de service public, France, ENSSIBI, 2010.p.9

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Dans ces conditions, RIVERO Jean pense que le service public est une forme d'action administrative dans laquelle une personne publique prend en charge ou délègue sous son contrôle une mission de besoin d'intérêt général.9 Cette définition serait apparemment trop savante car, elle fait allusion aux deux critères de définition susmentionnés. Elle conçoit le service public comme activité et comme autorité publique. Classiquement, le service public suppose l'existence d'un lien suffisant entre l'activité et une personne publique. Toute activité conçue en service public qu'elle soit d'initiative privée ou publique, dès lors que ses prestations comblent l'intérêt général, constituent ce qu'on appelle service public.

Pour FOILLARD Philippe seul l'activité administrative doit avoir pour but l'intérêt général, peu importe la personne qui s'en charge car l'intérêt général demeure une condition sine qua non librement apprécié par le gouvernant de la création du service public.10

A la lumière de toutes ces définitions nous pouvons noter que, l'intérêt général est le ciment du service public ; il relève du criterium essentiel justifiant la nature de tout service public. Le fondement du service public est que, certaines activités sociales considérées cruciales, nécessaires et stratégiques pour la société doivent être gérées dans des conditions plus spécifiques pour permettre un accès à tous et contribuer à la solidarité et à la cohésion sociales, culturelles et économiques de la collectivité. Ces activités doivent donc échapper à la logique du marché et à la recherche du profit. C'est sur base de cette conception que les règles administratives notamment la neutralité se doivent d'application ferme.

Par ailleurs, la République Démocratique du Congo est dotée d'une gamme incomptable et incontournable d'institutions chargées de remplir les missions de service public. À l'issue de la réforme administrative et institutionnelle qui a intervenu en 2008, plusieurs entreprises publiques ont été transformées, les unes en Service public ou en Etablissement Public, les autres en Société Commerciale et certaines autres ont été liquidées et dissoutes11.

Pour illustrer, la Radio-Télévision Nationale Congolaise est l'une des entreprises publiques qui se sont dès lors vues confiées les missions de service public. Pour ce faire, elle doit oeuvrer en guise de l'intérêt collectif.

Anciennement dénommée Office Zaïrois de Radiodiffusion et de Télévision, (OZRT en sigle), la Radio-Télévision Nationale Congolaise a été instituée et créée par l'Ordonnance présidentielle n°81-050 du 02 Avril 1981. Cet instrument juridique lui attribue sans complexe le statut d'un Etablissement Public. Ainsi, en dépit des multiples crises qui ont dû menacer le fonctionnement et les activités de certaines entreprises publiques congolaises, le législateur a édictée quelques textes légaux qui viseront à assurer le toilettage desdites entreprises. Il s'agit pour ce :

9J. RIVERO et Alli, Droit administratif, 17eme Ed, Paris, Dalloz, p.433.

10 P. FOILLARD, Droit administratif, Paris, CPU, 2002-2003, p 223.

11 La loi n° 08/007 du 07 juillet 2008 portant dispositions générales relatives à la transformation des entreprises publiques, in Journal Officiel de la République Démocratique du Congo, Cabinet du Président de la République, n° spécial, 49eme année, Kinshasa juillet 2008.

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- La loi n° 08/007 du 07 juillet 2008 portant dispositions générales relatives à la transformation des entreprises publiques ;

- La loi n°08/008 du 07 juillet 2008 portant dispositions générales relatives au désengagement de l'Etat des entreprises du portefeuille ;

- La loi n°08/009 du 07 juillet 2008 portant dispositions générales applicables aux Etablissements publics et ;

- La loi n°08/010 du 07 juillet 2008 fixant les règles relatives à l'organisation et à la gestion du portefeuille de l'Etat.

Pour le législateur, cette réforme qui s'amène par les nouveaux instruments juridiques consiste à offrir aux entreprises publiques la possibilité d'accomplir intégralement et suffisamment les objectifs économiques et sociaux qui leurs ont été assignés par la loi cadre du 06 janvier 1978.12

Ainsi fondé et en concert avec la loi n°08/009 applicable aux Etablissements publics, la Radio-Télévision Nationale Congolaise est actuellement régie par le décret n°09/62 du 03 décembre 2009 qui lui fixe le statut d'un Etablissement public à caractère socio-culturel et doté de la personnalité juridique.13Elle a entre autre pour objet d'assurer le service public de radiodiffusion et de télévision. À cet effet, elle est chargée notamment de réaliser la couverture des activités politiques et sociales, de réaliser la production nationale des programmes artistiques et éducatifs, de vulgariser les activités et les programmes d'action des institutions de la République.14Et donc la RTNC intervient désormais dans le domaine de la presse et du média, c'est un service public qui vise à promouvoir l'information et la culture du pluralisme d'opinions.

La constitution de la République Démocratique du Congo garantit à tout individu le droit à l'expression et à l'information. Elle définit en son article 23 que tout individu a droit à la liberté d'expression, ce droit implique la volonté d'exprimer ses opinions et de manifester ses convictions notamment par la parole, l'écrit ou l'image.15Et dans son article 24, le législateur garantit ensuite la liberté de la presse. La même disposition prévoit la liberté d'émission par la radio, la télévision, la presse écrite ou tout autre support de communication. L'article continue à préciser que les médias audiovisuels et ou écrit d'Etat sont des services publics dont l'accès est garanti de manière équitable à tous les courants politiques et sociaux et le statut de ces medias d'Etat est établi par une loi qui en garantit l'objectivité, l'impartialité et le pluralisme d'opinions dans le traitement et dans la diffusion de l'information.16

La Loi congolaise sur la liberté de presse explique que le droit à la presse, à la liberté d'opinions et d'expression est un droit pour tous. Par là on sous-entend, le droit d'informer et

12 Exposé de motif de la loi n° 08/007 du 07 juillet 2008, idem.

13 Article 1 du Décret n°09/62 du 03 décembre 2009 fixant les statuts d'un Etablissement Public dénommé Radio-Télévision Nationale Congolaise, in journal officiel de la RDC, Cabinet du Président de la République, n°12, 51eme année Kinshasa juin 2010.

14 Article 4, idem.

15 Article 23 de la constitution de la RDC citée supra. 16Article 24, idem.

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d'être informé, d'avoir des opinions, des sentiments et de les communiquer sans aucune entrave illégale quel que soit le support utilisé.17Au surplus, l'Etat a l'obligation d'assurer et de rendre effectif le droit à l'information et par conséquent, les moyens de l'information et de la communication appartenant à l'Etat sont des services publics dont le fonctionnement est régi par une structure légale et indépendante du ministère de l'information et de média.18

Sur la sphère internationale, la RDC a adhéré à une gamme très raffinée de traités, conventions, déclarations et accords ayant été instrumentalisés pour promouvoir le droit à l'information et au pluralisme d'opinions. La Déclaration Universelle des Droits de l'homme nous rappelle dans son article 19 qu'on ne peut s'inquiéter de ses opinions peu importe où se trouve. Ce qui signifie que le droit à l'expression s'exerce jour et nuit dans des espaces privés et publics.19

C'est pour dire que, le droit à l'expression et à l'information sont désormais inscrits comme préoccupation majeur du pouvoir public en RDC. Ce sont des droits intrinsèquement liés à tout être humain et avec l'évolution progressive de la notion de l'état de droit et de la démocratie participative, ces droits permettent de promouvoir l'efficacité d'une société démocratiquement stable.

Dans ce cas notre étude trouve ici sa portée en effet, la RTNC est un service public du pays, elle est l'unique et la plus grande entreprise de l'audiovisuelle congolaise. Encore, elle est sous contrôle du ministère de media et de la communication qui y exerce une censure permanente et elle est entièrement financée par l'Etat. La grande partie des journalistes et du personnel administratif de la RTNC est constituée des fonctionnaires de l'Etat, régis par le statut de la fonction publique et sont payés comme tels. Aussi, la RTNC gère deux chaines de télévision (RTNC 1 et RTNC 2) et est l'unique société audiovisuelle de l'Etat couvrant toute l'étendue du territoire congolais. Donc la RTNC est un véritable média public avec une apparence de service public de l'audiovisuel.

Or, face aux enjeux électoraux auxquels les citoyens veulent apporter des réponses, la Radio-Télévision Nationale Congolaise semble être loin de remplir cette mission d'autant plus que, l'ingérence et l'alignement systématique a atteint son paroxysme dans cette chaine publique qui ploie sous l'emprise du pouvoir politique en place au lieu d'être au service de toutes les tendances qui représentent le souverain primaire dans sa diversité. Ce media public passe

17Article 8 de la loi n° 96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l'exercice de la liberté de presse, in Journal Officiel de RDC, Cabinet du Président de la République, n° spéciale, 42eme année, Kinshasa 2001.

18Article 13, la loi du 22 juin 1996, précédemment citée.

19 Le cas de de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948 qui dispose en son article 19 que « toute personne a droit à la liberté d'opinions et d'expression ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

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depuis un temps pour porte-voix de seule majorité au pouvoir. Elle est devenue un instrument de propagande qui, instaurant la pensée unique et cultivant le culte de la personnalité.20

On nous a toujours cassé d'oreilles que RTNC est une église au milieu du village pour ainsi s'allusionner au rôle de l'église parmi les hommes. Une église qui vise la justice, qui oeuvre pour la promotion de la transparence et des bonnes valeurs basées sur l'humanisme et qui vient remettre les valeurs établies après qu'on les ait transgressées ou bafouées.

Alors qu'elle se veut d'une église au milieu du village et du tam-tam de l'Afrique, la RTNC se tient dans un chemin longuement dévié, un chemin de la perversion morale et éthique. Elle s'offre le pouvoir de semer la haine, la violence et l'intolérance vis-à-vis de tous les opposants politiques et de tous ceux qui ne partagent pas les mêmes options et la politique du gouvernement congolais. Au lieu donc de remplir le rôle éducatif, informatif et formatif, la RTNC par contre désinforme et déforme l'opinion publique.

Dans un communiqué publié le 22 juin 2018 à l'occasion de la célébration du 22ème anniversaire de la loi de 1996 relative à la liberté de la presse en République Démocratique du Congo, l'ONG Freedom For Journalist (FFJ en sigle) a fait savoir que « les différentes dispositions de cette loi ont été écornées durant les deux dernières décennies »21 Selon cette organisation militant pour la défense et la promotion des droits et libertés de la presse, cet instrument juridique a été systématiquement et intentionnellement violé par ceux qui incarnent la puissance de l'Etat et cette violation est bien souvent régulière dans des medias écrits et audiovisuel de l'Etat.

Au de-là de tout, il apparait vrai d'affirmer que la RTNC n'est jamais neutre, elle est par contre politisée et pourtant les missions que lui assigne la loi sont apparemment celles de l'intérêt général. Dans ce cas, il y a nécessité qu'on lui applique un régime juridique le plus spécifique attaché au droit de service public pour lui permettre de s'engager davantage dans sa fonction primaire et répondre à ce à quoi la société attend d'elle.

Eu égard à cette inquiétude et afin de bien mener cette étude, nous nous sommes posés les questions suivantes :

1. La Radio-Télévision Nationale Congolaise serait-elle un Service Public ? Si oui, pourquoi n'est-elle pas neutre ?

2. N'est-il pas possible d'entreprendre une réforme pour défaut de neutralité ?

Nous tenterons, d'après des approches théoriques et déterminatives d'un service public, d'apporter des réponses assez concrètes à ces questions afin de bien expliciter l'intérêt qui découle de cette analyse.

20 Voir, En s'attaquant systématiquement aux opposants, la RTNC, est une Eglise au coin du village, Article publié le 18 avril 2016. Disponible sur internet in https://7sur7.cd . Consulté le 15 décembre 2018.

21Freedom For Jurnalist (FFJ), l'Etat congolais accusé d'avoir liquidé l'essentiel de la liberté de la

presse, Article publié le 23 juin 2018. Disponible sur internet in www.adiac-congo.com. , consulté le 16 novembre 2018.

22 Voir Medias publics : étatiques, gouvernementaux et radiotélévision publique. Disponible sur internet in https://aceproject.org, consulté le 11 décembre 2018.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984