II - Une jurisprudence en constante évolution par la
consécration des principes généraux du droit de
l'Union
49 O. Dubos, Les juridictions nationales, juge communautaire, op.
cit., p. 61
50 E. Dubout, Le « contentieux de la troisième
génération » ou l'incomplétude du système
juridictionnel communautaire, RTD Eur. 2007. 427
51 Brunessen Bertrand, La jurisprudence Simmenthal dans la force
de l'âge - RFDA 2011. 367
52 L'arrêt Costa contre ENEL est relatif au
droit de la concurrence et concernait le paiement d'une taxe
d'électricité à une société en situation de
monopole en Italie.
L'arrêt Van Gend & Loos concernait la
prohibition des droits de douanes déguisés ou non à
l'intérieur du marché commun
22/101
Outre le triptyque originel des grands principes fondateurs du
droit de l'Union, il existe également d'autres principes
généraux du droit de l'Union « découvert
»53 par la suite par le juge européen tels
que les principes de proportionnalité (A) et de sécurité
juridique (B).
A - Le principe de proportionnalité en
matière fiscale
« Le principe de proportionnalité est
également omniprésent dans la jurisprudence de la Cour, en
particulier lorsqu'après avoir reconnu une restriction à
l'exercice d'un droit ou d'une liberté, elle examine à quelles
conditions cette restriction pourrait être reconnue compatible : elle
doit être propre à atteindre l'objectif recherché et ne
doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire »
54.
L'arrêt Commission contre France de
200455 en est un bon exemple. Cet arrêt concernait l'article
522 bis du CGI56. Soumis au contrôle de la Cour par la voie du
recours en manquement, les juges apprécient dans un premier temps que la
norme en cause est une mesure d'effet équivalent à une
restriction quantitative57, car dans d'autres États membres
l'appellation « or » peut s'appliquer aux ouvrages dudit métal
titrant entre 375 et 585 millièmes, alors qu'en France cette appellation
est réservée uniquement aux ouvrages d'or titrant au moins 750
millièmes. Toutefois, la Cour apporte une nuance en jugeant que, bien
qu'il s'agisse effectivement d'une mesure d'effet équivalent à
une restriction quantitative, l'article 522 bis du CGI assure « la
loyauté des transactions commerciales et protège le consommateur
»58. Toutefois, et c'est là où la
Cour fait application du principe de proportionnalité, l'exception au
principe de la libre circulation des marchandises caractérisée
par la Cour n'est valable que s'il n'existe pas d'autres moyens pour parvenir
à l'objectif susmentionné. En ce sens, à travers un
contrôle maximum des normes, le juge ne
53
https://www.carrieres-publiques.com/actualite-fonction-publique-les-principes-generaux-du-droit-d-209
54 Pierre-François Racine, Olivier Fouquet, Cyrille
David, Bernard Plagnet, Les grands arrêts de la jurisprudence fiscale,
Edition : 07/09 - 5e édition
55 CJCE, 20 octobre 2005, Commission c/ France, C-166/
03
56 Article 522 bis du CGI « Seuls les ouvrages d'or dont
le titre est supérieur ou égal à 750 millièmes
peuvent bénéficier de l'appellation "or" lors de leur
commercialisation au stade du détail auprès des
particuliers.
Les ouvrages contenant de l'or aux titres de 585 ou 375
millièmes bénéficient de l'appellation "alliage d'or",
assortie de leur titre, lors de leur commercialisation au stade du
détail auprès des particuliers. »
57 Prohibé par l'article 28 CE
58 Pierre-François Racine, Olivier Fouquet, Cyrille
David, Bernard Plagnet, Les grands arrêts de la jurisprudence fiscale,
Edition : 07/09 - 5e édition
23/101
se limite pas seulement à apprécier la
légalité de la mesure en cause, mais il apprécie
également son opportunité et sa cohérence au sein des
systèmes fiscaux européens. C'est pourquoi, malgré
l'objectif de loyauté des transactions commerciales et de protection du
consommateur défendu par l'État français, la Cour a
statué en déclarant l'article 522 bis du CGI incompatible avec
l'article 28 CE car la mention du titre d'or en millième était
considérée comme une garantie suffisante pour les potentiels
acheteurs.
Ce contrôle maximum des normes nationales au regard des
normes de l'Union induit un véritable pourvoir d'appréciation de
la Cour qui recherchera la légalité du droit interne puis
procédera à des contrôles de nécessité et de
proportionnalité59 des mesures litigieuses. Cette
proportionnalité joue très souvent en la faveur de
l'harmonisation du droit de l'Union tandis que d'autres principes oeuvrent
davantage en la faveur du contribuable tel que le principe de
sécurité juridique.
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