II - L'harmonisation par la Cour de la coopération
administrative
En effet, la Cour insère également sa
jurisprudence en matière de coopération administrative en vue de
lutter contre les phénomènes transfrontaliers de fraude fiscale.
Au soutien des nombreuses directives de coopération
administrative285, elle apporte une vision neuve et protectrice des
intérêts des contribuables (A). Cette vision amène en ce
sens à s'interroger sur les potentiels apports de sa jurisprudence
concernant la toute nouvelle directive de coopération administrative
entre États membres, également connues sous le nom de «
DAC 6 »286 (B).
284 Ibid284
285 Dont la dernière version est la directive 2011/16/UE
du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération
administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE
286 Directive 2018/822 du 25 mai 2018
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A - Les apports jurisprudentiels protecteur du
contribuable en matière de coopération administrative
La directive de coopération administrative impose que
les Etats membres peuvent demander à un contribuable résident
fiscal toutes informations jugées utiles pour préserver
l'objectif de lutte contre la fraude fiscale. A l'occasion d'un arrêt
Berlioz, des sociétés requérantes se sont vues
exigées de la part de l'administration fiscale luxembourgeoise certaines
informations. Refusant de transmettre ces informations à
l'administration, les sociétés requérantes
s'étaient vues appliquées une amende d'un montant de 250.000
euros. La loi luxembourgeoise refusait en outre tout recours contre une telle
sanction. Les sociétés requérantes se sont donc
prévalues de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de
l'Union287 qui implique le droit à un recours effectif
à l'encontre des décisions administratives prononcées par
un État membre. La Cour juge dans cet arrêt de principe qu'il st
de droit pour un administré d'exercer un recours à l'encontre
d'une décision administrative qu'il estime illégale au sens de
l'article 47 de ladite Charte. La Cour juge en outre qu'il appartient
légitimement à l'État au titre de l'article 51 de la
Charte de mettre en oeuvre le droit de l'Union et in fine la directive
2011/2016. En ce sens, la sanction adressée par l'État membres
aux sociétés requérantes apparaît donc comme
conforme au droit de l'Union car elle met en oeuvre la directive.
Toutefois, la Cour ne méconnaît pas le droit aux
administrés de se prévaloir des dispositions de l'article 47 de
la Charte. La Charte s'applique en conséquence à toutes les
situations régies par le droit de l'Union288. Les
juridictions nationales sont en ce sens tenues d'appliquer la Charte y compris
le droit au recours effectif présent à l'article 47 de ladite
Charte bien que le contrôle par voie d'exception de la sanction de
l'administration ne fût pas permis dans le cas d'espèce par le
droit luxembourgeois. Il résultait en ce sens une potentielle atteinte
au droit de traitement des données à caractère personnel
garantie à l'article 7 de la Charte289.
287 Ci-après la Charte
288 CJUE, 26 février 2013, Aklagaren c/ Hans Akerberg
Fransson, C-617/10
289 CJUE, 17 octobre 2013, Michael Schwartz c/ Stadt
Bochum, C-291/12
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La Cour agit ainsi en protégeant tant la vie
privée des particuliers soumis à une demande d'information mais
surtout assure leur droit à un recours effectif. En ce sens, la
directive administrative de coopération, bien qu'elle protège les
intérêts économiques des États membres, ne doit pas
être lues comme n'octroyant aucunes garanties aux particuliers. La Cour
harmonise ainsi le système procédural de demande d'information
assurant un juste équilibre entre les droits de l'État membre et
les droits du particulier.
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