B - Les apports jurisprudentiels limités par la
Cour à la directive intérêts231 et redevances232
L'objectif de la directive est la non-imposition à la
source des revenus tirés des intérêts et des redevances. En
conséquence, ces revenus particuliers de capitaux mobiliers ne seront
imposables que dans l'État de résidence du
bénéficiaire effectif. Toutefois la lecture de la directive
intérêts et redevances au regard de la jurisprudence est bien
différente de celle de la directive mère-fille. En effet, la
directive intérêt redevance a mis de nombreuses années
à être créé. En effet, cette dernière pouvait
être beaucoup plus sujette à des tentatives de fraudes de la part
des contribuables européens. La particularité des
intérêts était le problème majeur de
l'implémentation de la directive en droit de l'Union. En effet, il
fallait prévoir des mesures anti-abus pour contrecarrer les potentielles
mauvaises intentions des contribuables européens.
C'est d'ailleurs pour cela que la doctrine a observé
dans la directive que la durée de détention de la participation
dans la filiale par la société-mère devait être
obligatoirement d'au moins deux ans. Il n'y pas de possibilité en
l'espèce de déroger par l'engagement de détenir ladite
participation pendant le temps requis. En effet, cette interprétation
est tirée de la différence des temps employés dans la
directive233 par rapport au temps employé234 dans
la jurisprudence Denkavit235.
Le risque de fraude étant particulièrement
élevé en matière d'intérêts et de redevances.
En effet, dans plusieurs affaires d'importance dénommée «
Danish cases »236, la Cour a eu à
231 Article 2 de la directive : « les revenus des
créances de toute nature, assorties ou non de garanties
hypothécaires ou d'une clause de participation aux
bénéfices du débiteur, et notamment les revenus
d'obligations ou d'emprunts, y compris les primes et lots attachés
à ces obligations ou emprunts. Les pénalités pour paiement
tardif ne sont pas considérées comme des intérêts
»
232 Article 2 de la directive : « les paiements de toute
nature reçus à titre de rémunération pour l'usage
ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une oeuvre
littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films
cinématographiques et les logiciels informatiques, d'un brevet, d'une
marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle, d'un
plan, d'une formule ou d'un procédé secret, ainsi que pour des
informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine
industriel, commercial ou scientifique. Les paiements reçus pour l'usage
ou la concession de l'usage d'un droit concernant des équipements
industriels, commerciaux ou scientifiques sont considérés comme
des redevances. »
233 En l'espèce le passé composé
234 Bien que concernant les distributions de dividendes le temps
utilisé était le présent
235 Ibid225
236 CJUE, 26 février 2019, N Luxembourg 1, X
Denmark A/S, C Danmark I et Z Denmark ApS, C-115/16, C118/16, C-199/16 et
C-299/16
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débattre de la notion de bénéficiaire
effectif pour préciser le texte afin d'empêcher les potentielles
fraudes. A ce titre la Cour juge que « l'article 1er, paragraphe 1, de
la directive 2003/49/CE du Conseil, du 3 juin 2003, concernant un régime
fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances
effectués entre des sociétés associées
d'États membres différents, lu conjointement avec l'article 1er,
paragraphe 4, de cette directive, doit être interprété en
ce sens que l'exonération de toute imposition des paiements
d'intérêts qu'il prévoit est réservée aux
seuls bénéficiaires effectifs de tels intérêts,
à savoir aux entités qui bénéficient
réellement de ces intérêts sur le plan économique et
qui disposent dès lors du pouvoir d'en déterminer librement
l'affectation »237 .
Si les développements jurisprudentiels paraissent moins
nombreux concernant la directive intérêts et redevances, cela ne
signifie pas que la directive ne fait pas l'objet d'un large contentieux. Bien
au contraire, elle est sujette à un contentieux se plaçant
davantage sur le terrain de la fraude fiscale et de l'abus de droit. Toutefois,
dividendes, intérêts et redevances ne sont pas les seuls domaines
ayant connu une harmonisation par le biais d'une directive, le régime
des fusions, scission, apport partiel d'actifs en est également
sujet.
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