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L’harmonisation des systèmes fiscaux des états membres par la cour de justice de l’union européenne.


par Dylan Viry
Université de Lorraine - Master II Procédures et fiscalité appliquée 2019
  

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B - Des apports jurisprudentiels parfois contestables : la décision Mark and Spencer

Les libertés économiques sont ainsi solidement encadrées par la jurisprudence. Une jurisprudence qui est parfois insensible à certaines considérations nationales comme dans le grand arrêt Mark and Spencer174. En 2003, la Cour reçoit une question préjudicielle de la High Court britannique dans un litige opposant la société Marks and Spencer à l'administration fiscale britannique. La société disposait de filiale qu'elle a liquidé en raison des pertes fiscales importantes desdites filiales. La société-mère a demandé la

169 Directive 77/ 799/ CEE

170 CJCE, 28 octobre 1999, Vestergaard, C-55/ 98 Ibid154

171 CJCE, 15 mai 1997, Futura Participations SA et Singer, C-250/ 95

Ibid154 « législation luxembourgeoise jugée compatible avec le droit communautaire en ce qu'elle exigeait

que la comptabilité d'une succursale luxembourgeoise soit tenue selon les normes luxembourgeoises »

172 CJCE, 28 avril 1998, Jessica Safir, C-118/ 96

173 CJCE, 28 janvier 1992, Bachmann, C-204/ 90

174 CJCE, 13 décembre 2005, Mark and Spencer, C-446/03

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censure du « group relief »175 qui permet le transfert de pertes fiscales reportables entre sociétés britanniques mais pas entre une société britannique et une société étrangère. L'argument de la société était que la règle britannique contrevenait au principe de la liberté d'établissement.

Dans un premier temps, l'avocat général Poiares Maduro estimait que la société avait le droit d'invoquer la différence de traitement en fonction de la localisation de la filiale. Cette problématique avait déjà été plus ou moins esquissé dans l'arrêt Futura participations et Singer176 dans lequel le Luxembourg autorisait, à bon droit, la possibilité de transférer les pertes reportables des établissements stables situés dans d'autres États membres que le Luxembourg à la condition que ces pertes aient un lien économique avec les revenus réalisés. Cependant l'avocat général s'est refusé d'effectuer un raisonnement par analogie de cette jurisprudence.

A ce titre, l'État britannique invoqua le principe de territorialité consistant dans le fait de ne pas troubler ses relations avec un autre État en matière fiscale. Toutefois, l'avocat général considéra que la justification par la territorialité n'était pas fondée, l'État britanniques ne souffrant pas d'une concurrence fiscale particulière avec d'autres États membres. En second lieu, la Grande-Bretagne invoqua le principe de cohérence du système fiscal. Là encore, l'avocat général balaie l'argument qui doit « être examiné au regard de l'objectif poursuivi par la réglementation fiscale en cause. La notion de cohérence fiscale vise à garantir que les ressortissants communautaires n'utilisent pas les dispositions communautaires pour en tirer des avantages qui ne sont pas liés à l'exercice de la liberté de circulation »177.

Le problème est que la liberté d'établissement pourrait être entravée dans cette situation si d'autres États membres permettraient le transfert des pertes fiscales entre la société mère et ses filiales non-résidentes. La Cour adopte en conséquence une démarche prudente : en admettant que l'entrave puisse être justifié par trois arguments. Le premier consiste dans le respect de la répartition du pouvoir d'imposition entre les États membres, les pertes

175 Ibid154

176 CJCE, 15 mai 1997, Futura participations et Singer, C- 250/ 95

177 Ibid154

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fiscales réalisées par une filiale ont un effet sur l'imposition de cette dernière dans l'État dans laquelle elle a son siège. La seconde justification peut être tirée d'un risque de double emploi des pertes en permettant à la filiale de ne pas payer d'impôt dans son État de résidence et en les transférant à sa société-mère afin d'écraser sa base imposable. En ce sens, le troisième moyen invocable réside dans le fait qu'une telle liberté de transfert des pertes fiscales pourrait inciter certaines entreprises à frauder fiscalement.

« Néanmoins la Cour juge, en vertu du principe de proportionnalité (l'entrave ne doit pas excéder les nécessités de l'objectif poursuivi) qu'une société mère britannique doit pouvoir imputer les pertes de sa filiale étrangère lorsque celle- ci a épuisé les possibilités, en avant et en arrière, de les prendre en compte dans son pays ou par un tiers »178.

En ce sens, la Cour garantie que les pertes fiscales doivent en premier lieu être reportées sur la base imposable de la filiale dans son État de résidence avant de pouvoir être transférées dans un second temps à la société-mère. Si cet arrêt semble avoir trouvé un juste milieu entre l'excès de liberté et l'entrave fiscale, il n'en demeure pas moins contestable dans le sens où la liberté est clairement privilégiée et où des montages fiscaux peuvent facilement s'immiscer dans les failles de cette consécration de la liberté d'établissement. Si l'harmonisation permet une liberté au sein de l'Union européenne, elle est aussi son propre piège, car les États sont ainsi impuissants pour contrecarrer les phénomènes de fraudes fiscales. En effet, une société-mère qui dispose de plusieurs filiales dans des États différents qui ne réalisent aucun bénéfice pourra amoindrir sa base imposable.

En ce sens, l'harmonisation de la Cour touche de nombreuses libertés et encadre strictement les entraves fiscales nationales. Dans cette lignée, la Cour prohibe également avec vigueur les traitements de faveurs envers certains contribuables à travers le dispositif de sanctions des aides d'État.

178 Ibid154

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