B - Une soumission au regard de l'autorité de la
chose interprétée des décisions renduees à la suite
d'un recours préjudiciel
« Le renvoi préjudiciel est une
procédure permettant à une juridiction d'un État membre
d'interroger la Cour de justice de l'Union européenne sur
l'interprétation ou la validité du droit de l'Union dans le cadre
d'un litige dont elle est saisie
»144.
Les juridictions des États membres sont tenues, par
principe, de saisir la Cour d'un recours préjudiciel, ou
également appelé question préjudicielle, lorsqu'à
l'occasion d'un litige un doute subsiste quant à la conformité
d'une norme de droit interne par rapport à une norme de l'Union.
Seules les juridictions nationales disposent du pouvoir
d'engager un recours préjudiciel devant la Cour. Dans le cadre d'un
recours préjudiciel, la Cour ne peut apprécier la validité
des traités de droit primaire, car ils sont l'oeuvre des États
membres. Au contraire, le rôle de la Cour consiste à
protéger ce droit primaire. Toutefois, concernant le droit
dérivé, la Cour dispose d'une certaine latitude pour
apprécier sa validité.
Cependant, le recours préjudiciel est un atout
particulièrement utile, car la Cour peut se permettre de reformuler les
questions posées à son prétoire. En effet, la Cour dispose
d'une large marge de manoeuvre pour interpréter la question qui lui est
posée, et peut y répondre en y ajoutant des
éléments. Cette démarche peut être critiquable et
attentatoire à la souveraineté des États membres dans le
sens selon lequel la Cour peut adopter une posture ultra petita. Cette
faculté dont dispose la Cour lui permet de se saisir de
problématiques que le juge national n'avait pas évoqué. De
plus, à travers les « remarques liminaires » qu'elle
peut placer avant de répondre à la question préjudicielle,
la Cour s'arroge le droit de donner son point de vue sur le sujet du litige
pour le replacer dans son contexte ou introduire une interprétation sur
un sujet connexe audit litige.
144 Fiche d'orientation - Renvoi préjudiciel (Droit de
l'Union européenne) - Septembre 2018 Dalloz
« L'arrêt rendu sur renvoi en
interprétation est revêtu de l'autorité
générale de chose interprétée. Il s'impose à
la juridiction nationale à l'initiative du renvoi, mais aussi à
toutes les juridictions nationales des États membres qui rencontreraient
une question identique ou similaire »145.
Concernant le cas plus rare des questions en
appréciation de validité, lorsqu'un acte est
déclaré non conforme au droit de l'Union, le juge national est
tenu d'écarter l'acte litigieux. En outre, lors de réponses
obscures ou équivoques rendues par la Cour à une question
préjudicielle, le juge national dispose de la faculté de saisir
de nouveau le juge de Luxembourg afin qu'il puisse clarifier sa
jurisprudence.
En matière fiscale, l'autorité de la chose
interprétée revêt un caractère fondamental car elle
permet une harmonisation des législations fiscales des États
membres. Comme vu précédemment, le juge national se plie et se
soumet aux principes du droit de l'Union et à l'interprétation de
la Cour. Cette hiérarchie d'un ordre juridique de l'Union
supérieur à l'ordre juridique national est la conséquence
directe de l'application des grands principes du droit de l'Union. La
souveraineté des États membres se voit réduite en
matière fiscale à travers une pénétration du droit
de l'Union dans le droit fiscal national. Telle est la conséquence de
cette harmonisation négative qui pose le cadre de ce qui est interdit,
ainsi que du sens qui doit être compris par les États. La
jurisprudence de la Cour est mouvante et flexible, prétorienne diront
certains, bien focalisée sur les objectifs découlant des
traités.
49/101
145 Ibid31
50/101
|