Culture et football au Cameroun. le cas du canon sportif de Yaoundé dans la région du centre; une contribution à l'anthropologie du football( Télécharger le fichier original )par Mouafo Nopi ARNOUX Université de Yaoundé I - Master en Anthropologie 2014 |
II.1.6 Les supporteurs dans le footballLe match de football en dehors des adversaires, a pour juge les arbitres et pour adjuvants-force les supporteurs. L'objet-valeur ici est le but par l'envoi du ballon au fond des filets adverses ou tout simplement la victoire. Un match n'est jamais gagné à l'avance puisque pour Jérôme BUREAU (2002) dans Le football, « il n'y a plus de petites équipes » car il existe des rivalités entre supporteurs via des comportements agressifs et machistes. Ce « supportérisme » de Nicolas HOURCADE (2002) se présente sous quatre types : - le consommateur (public): celui-ci indique si le produit lui convient ou non. Il boycotte les matchs s'il n'est pas satisfait ; - l'associé au club (chercheur): il est très proche des joueurs et des dirigeants et conçoit le club de manière consensuelle ; - le défendeur d'une vision conflictuelle du club (élite et décideur) : il se positionne comme un des acteurs du club, ayant un point de vue propre ; - le hooligan (supporteur engagé) : il se met délibérément hors jeu et c'est ce qui amène Christian BROMBERGER (1998) dans La bagatelle la plus sérieuse du monde, à dire au supporteur « Paie !-Assieds-toi ! Tais-toi ». Par conséquent, il demande à ce public fanatisé et considéré comme douzième homme de l'équipe, de fixer des limites et de rester fair-play. Pour Marc AUGE5(*) Ils observeraient aisément que ces rassemblements populaires s'accompagnent paradoxalement d'une intensification du culte domestique, et découvriraient avec intérêt que le drame célébré en un lieu central par vingt-trois officiants et quelques comparses devant une foule de fidèles d'importance variable mais pouvant atteindre cinquante mille individus est suivi avec la même foi à domicile par des millions de pratiquants si au fait des détails de la liturgie que, sans apparemment s'être donné le mot, ils se lèvent, s'exclament, rugissent ou se rassoient au même rythme que la foule rassemblée. On constate donc que la professionnalisation du football au Cameroun creuse une distance entre eux, les dirigeants et les joueurs. De diverses manières, ces supporters tentent de se construire une nouvelle place mais compte tenue de l'attitude des dirigeants, qui les relèguent à la seule fonction de soutien au stade, ils se peinent à se reconstruire en acteurs à part entière. II.1.7 Le football : le revers d'une médailleLe football pour certains auteurs est un facteur unificateur mais pour d'autres en l'occurrence Nkou MVONDO, c'est une médaille à deux face dont la première, faite de victoires, cache la seconde, jouxtée des réalités négatives vécues. C'est ce qu'il appelle l'« arbre qui cache la forêt ». Jean Lambert NANG (2009) dans Desperate football house. Six mois dans l'enfer de la Fécafoot, voit en le football, un désespoir due au cercle vicieux des « prédateurs » et de l' « impunité » des membres. Le refus de débat au sein des organisations et le poids de l'argent en milieu sportif rendent hypnagogique le succès du football (Jean Bruno TAGNE, 2010). C'est fort de cela qu'il parle de « planification de l'échec » où il prend pour cadre événementiel le cas des « Lions Indomptables » en 2010. Pour abonder dans le même sens, Charles ATEBA EYENE signale que le football est une « menace pour la paix et l'unité nationale » car d'après l'illustre auteur, « les hommes politiques pour maintenir la paix et la stabilité du Cameroun, font feu de tout bois ». Franz FANON (1961) avait déjà mentionné dans Les damnés de la terre que L'homme politique africain ne doit pas se préoccuper de faire des sportifs mais des hommes conscients qui, par ailleurs, sont sportifs. Si le sport n'est pas intégré dans la vie nationale, c'est-à-dire dans la construction nationale, si l'on construit des sportifs nationaux et non des hommes conscients alors rapidement on assistera au pourrissement du sport par le professionnalisme, le commercialisme. Le football est devenu le socle et l'instrument de l'unité et de l'intégration nationale dont le revers est encore mal conçu. Charles ATEBA EYENE (2011) prend pour référence, le penalty raté de Samuel ETO'O et son opposition au remplacement de Choupo MOTING, la défaite du Cameroun en Juin 2011 au quartier Nfandena, terre mère, synonyme d'élimination à la CAN 2012. En additif, les joueurs évoluant dans les championnats locaux sont méprisés à l'exception de quelques joueurs tels que Roger MILLA, Thomas NKONO et Théophile ABEGA (de regretté mémoire) du Canon, Abouna NDJANA des Astres de Douala, au profit de ceux livrant leurs talents à l'étranger. C'est dire qu'il existe un hiatus dans la crédibilité non seulement des joueurs, mais aussi dans la pertinence et l'efficacité du championnat, et dans la technique de placement de ces derniers. Cependant, les clubs qui ont réussi localement et au niveau national constituent un renforcement de l'identité. Selon Charles ATEBA EYENE (2011), ils sont peu nombreux et sont des clubs tels que Coton Sport de Garoua (Cameroun), Al Ahly (Egypte), Tout Puissant Mazembe (RDC) qui pour ce dernier, a disputé un match avec le club italien Inter de Milan en 2010. * 5 Idib |
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