4.3.11. LE NATUREL
La traduction d'une chanson doit se faire dans un langage
naturel pour que le chanteur puisse l'exécuter sans difficulté et
que l'audience puisse comprendre le texte pendant que celui-ci est
chanté. Comme l'affirme Low, «A song-text must communicate
effectively on first encounter. (&) Unnaturalness demands from the audience
additional and superfluous effort. The Target text is not worth making unless
it can be understood while the song is sung.» Les aspects les plus
importants pour ce critère sont le registre et l'ordre des mots; l'ordre
des mots doit être grammaticalement correct et le registre doit
être ad hoc. L'inversion des sujets et des compléments est chose
courante en poésie française. Mais en shüpamom, par contre,
il est naturel de parler sans inverser les mots. Une traduction de la strophe
suivante mérite que l'on replace les mots dans leurs positions
réelles.
Réjouissez-vous devant lui!
Il est des orphelins l'appui,
Le défenseur, le Père;
Il est des veuves le recours
Et de son peuple, tous les jours
Il entend la prière.
Ce Dieu puissant, par sa bonté
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Ramène la prospérité, La paix et
l'allégresse; Du captif Il brise les fers, Du juste, dans tout l'univers
Son Sil voit la détresse.
De même, dans les phrases interrogatives en
français, le mot interrogatif vient au début de la phrase tandis
qu'en shüpamom il vient à la fin.
Que ferais-je sans toi?
&&&&&&&& U pe ndi'u, n'do' ngét
kùe?
Pour que le chant soit exécuté facilement, les
paroles doivent être aisées. Par conséquent, il est
nécessaire de réfléchir sur le choix des mots. C'est
à ce niveau que le génie de la langue d'arrivée, les
figures de style et les procédés de traductions sont les plus
sollicités.
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Ce chapitre portait sur une analyse quantitative et
qualitative des constituants spécifiques de la traduction dans les
chants que nous avons sélectionnés. Il en ressort que le choix
des mots est primordial dans la traduction des chants entre deux langues
hétérogènes. En terme de rythme, le shüpamom utilise
des mots relativement plus courts que le français. Nous avons aussi
constaté que la traduction littérale a été
très peu utilisée, et que l'addition dans le texte cible et
l'omission dans le texte source sont des phénomènes rares.
Toutefois, il nous a été donné de constater une forte
utilisation d'expressions imagées, dans la langue source. Pour traduire
ces métaphores, il a fallu utiliser plusieurs stratégies,
à savoir: la traduction littérale, la paraphrase explicative,
l'innovation créative, l'équivalence culturelle, et
l'élision totale. En ce qui concerne la rime, nous avons remarqué
que c'est le critère le plus difficile à respecter. Le traducteur
n'en a pas fait une priorité. Dans la traduction en shüpamom, les
rimes sont apparues de façon sporadique dans le respect du génie
de la langue. Le but était d'arriver à une musicalité
naturelle. Les cas où le traducteur a déplacé des vers
sont assez rares. Mais les chants ont presque été récrits
en respectant le sens de l'original, et pour permettre une exécution
assez naturelle. Enfin, le pourcentage d'adaptation est élevé. Le
sens varie peu, mais ce phénomène n'est pas perceptible dans la
majorité des chants.
CHAPITRE 5 :
TRADUCTION ET ANALYSE DE DEUX CHANTS EN SHÜPAMOM
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La traduction des chants religieux en shüpamom est un
exercice qui demande une démarche et une méthode scientifique
pour parvenir à d'excellents résultats. Le traducteur doit donc
s'assurer que sa traduction réunit les critères de sens, rythme,
naturel, et chantabilité. De plus, il doit avoir un esprit
créatif pour pallier les problèmes d'intraduisibilité. Il
doit de manière générale viser la fonction de la
traduction et l'audience cible. Aussi, doit-il tenir compte des facteurs
théoriques, poétiques, linguistiques, culturels et religieux qui
influencent sa traduction.
Dans le présent chapitre, nous appliquerons à
deux cantiques tirés de Sur les ailes de la foi, les
stratégies et les théories présentées dans notre
guide méthodologique ainsi que les conclusions auxquelles nous sommes
parvenus après l'analyse de la traduction dans Yùopnké
pùen kristo. Notre traduction se fera en deux phases. Nous
présenterons d'abord une traduction non chantable des textes. Cette
phase ne prend en compte ni le rythme ni la métrique du texte source.
C'est la version qui se rapproche plus du texte source en terme de
fidélité. Ensuite, nous produirons une version chantable sur
laquelle nous étudierons les critères de sens, rime, naturel,
rythme et chantabilité.
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