Le rôle du ministère public dans un procès pénal.( Télécharger le fichier original )par Maitre Edmond MBOKOLO ELIMA Université de Mbandaka - Graduat 2012 |
2.2. DROIT D'APPRECIATION DU MINISTERE PUBLICComme nous l'avons souligné plus haut, après la clôture de l'instruction préparatoire, « le Ministère Public apprécie si le dossier est suffisamment instruit »94(*). Et lorsqu'il s'avère qu'il en est effectivement ainsi, il décidera de saisir le Tribunal compétent dans l'éventualité où l'infraction se cristalliserait. En effet, le Magistrat instructeur peut proposer la saisine de la juridiction compétente, le classement sans suite ou le paiement d'une amende transactionnelle. Au demeurant, « le chef hiérarchique peut choisir l'une des solutions qui lui sont proposées mais peut aussi renvoyer pour complément d'information »95(*). A. LE CLASSEMENT SANS SUITE On appelle classement sans suite, la décision que prend un magistrat du Parquet de ne pas donner suite à une affaire. Cette décision n'a aucun caractère définitif, elle peut être révisée à tout moment, et ce, jusqu'à ce que la prescription soit acquise. Cependant, le Ministère Public, agissant au nom de la société, ne peut normalement pas renoncer à exercer l'action publique. Par ce fait, « une fois qu'il a terminé l'instruction préparatoire, il possède un pouvoir d'appréciation qui lui permet de s'abstenir ou de poursuivre et de classer ainsi sans suite. C'est le principe de l'inopportunité des poursuites »96(*). D'après le Professeur LUZOLO, « il ne suffit pas qu'il y ait violation de la volonté populaire qui est la loi (pénale), c'est-à-dire la naissance de l'action publique, mais il peut ainsi que le fait décrier constitue une infraction c'est-à-dire que tous les éléments constitutifs de l'infraction soient réunis, car si le dossier est entaché de l'un des éléments causant l'extinction de l'action publique aussi le fait a un caractère bénin le Parquet peut classer l'affaire sans suite »97(*). Diverses raisons peuvent être les motifs de classement sans suite. Il y a tout d'abord l'inopportunité des poursuites. C'est le cas généralement lorsque l'abstention est dictée par des considérations d'ordre politique, social ou économique. « Il y a aussi le classement sans suite pour absence d'un des éléments constitutifs de l'infraction »98(*). L'équité peut aussi dicter au classement sans suite lorsque l'infraction est de peu de gravité. Le classement sans suite, est une mesure administrative et non juridictionnelle en ce sens que le Parquet peut toujours revenir sur un classement sans suite et mettre l'action publique en mouvement, par exemple lorsque les éléments nouveaux aggravent le caractère délictuel d'un fait. Enfin que, la base légale du classement sans suite, les articles 137 et 138 du règlement intérieur des Cours, Tribunaux et Parquets. B. L'AMENDE TRANSACTIONNELLE En établissant cette procédure, le législateur veut d'abord désencombrer les Tribunaux, ensuite éviter aux justiciables des ennuis et des frais hors de proportion avec la gravité de l'infraction commise, enfin de diminuer les charges publiques. Par conséquent, l'article 5 du Code Pénal Congolais prévoit l'amende comme peine aux infractions, « cette sanction pénale intervient avant qu'un jugement sur le fond ne soit prononcé, elle peut être proposée soit pas l'Officier de Police Judiciaire, soit par l'Officier du Ministère Public, lesquels estiment en lieu et place d'une juridiction »99(*). Lorsque l'inculpé a accepté une proposition d'amende transactionnelle qu'ensuite le magistrat instructeur décide de poursuivre croyant à refus d'accepter, alors que le paiement est effectué dans le délai imparti, les poursuites sont irrévocables, sauf décision du magistrat degré supérieur du Ministère Public. La base légale de l'amende transactionnelle est l'article 9 du Code de Procédure Pénale qui stipule dans son alinéa 1èr que « pour toute infraction de sa compétence, l'Officier de Police Judiciaire peut s'il estime qu'à raison des circonstances, la juridiction se bornerait à prononcer une amende et éventuellement de la confiscation, inviter l'auteur de l'infraction de verser au trésor public une somme dont il détermine le montant sans qu'elle puisse dépasser le maximum de l'amende encourue augmentée éventuellement des décimaux légaux »100(*). L'article sous examen dispose que le paiement de la somme demandée par l'application de l'alinéa 1èr n'implique reconnaissance de la culpabilité. Cependant, « en cas de non-paiement, le magistrat instructeur peut poursuivre l'inculpé sans devoir se référer à nouveau au chef d'office autant dire proposer un classement par amende transactionnelle, le Procureur de la République qui a marqué accord, l'autorisera, en cas de non-paiement de l'amende, à poursuivre sans lui en référer à nouveau »101(*). Par ailleurs, il n'est indispensable que l'Officier de Police Judiciaire fasse comprendre au justiciable qu'il n'est pas obligé de payer l'amende, mais qu'il risque, dans le cas où il n'accepterait pas de payer d'être poursuivi devant les Tribunaux répressifs où, par contre, il aura l'occasion d'exposer à nouveau ses moyens de défense. Par contre, l'article 158 du Règlement intérieur des Cours, Tribunaux et Parquets dispose que, « le magistrat instructeur est tenu d'informer au plaignant de la suite réservée à la plainte, il avise celui-ci du classement sans suite, du paiement d'une amende transactionnelle ou de la décision»102(*). Le Professeur BAYONA BAMEYA estime que, «l'amende transactionnelle est exclue la où une peine de servitude pénale principale est prévue : elle est également exclue là où la loi prévoit une peine de prison et une peine d'amende ; elle n'est possible que là où, seule une peine d'amende est prévue »103(*). Il préconise en outre que, « si l'infraction est punissable à la fois d'une peine d'emprisonnement et d'une amende ou d'une de ces peines seulement, l'amende transactionnelle est possible si l'Officier verbalisateur estime qu'en raison des circonstances, les Tribunaux n'appliquerait pas la peine d'emprisonnement »104(*). En effet, le fait pour l'inculpé de payer l'amende n'implique pas sa part aveu de culpabilité. Ce dernier pourrait même après avoir accepté de payer, rétracter son accord en ce cas, les poursuites judiciaires peuvent avoir lieu. Lorsque l'inculpé a satisfait aux invitations, un certain nombre d'effets juridiques se produisent : - L'Officier du Ministère Public qui a formulé la proposition ne pourra plus disposer de l'action, il en est de même des magistrats de même rang ; - La citation ne sera pas recevable si les invitations faites ont été approuvées par le supérieur hiérarchique, car, alors il y a normalement extinction de l'action publique ; - L'inculpé ne peut plus récupérer la somme versée soit à titre d'amende soit à titre de dommage-intérêt, il ne peut non plus récupérer les objets abandonnés, sauf lorsque le Ministère Public a décidé de poursuivre; - L'action publique s'éteint sauf si le Ministère Public décide de poursuivre. Lorsque le Ministère Public décide les poursuites, il doit y avoir restitution de l'amende et dommage-intérêt. Tandis que les objets abandonnés, le Ministère Public procède à leur saisi. * 94 E.J. LUZOLO BAMBI LESSA, Op.cit., p.36. * 95 Idem. * 96 BAYONA BAMEYA, Cours de Procédure pénale, inédit, p.39. * 97 E.J. LUZOLO BAMBI LESSA, Op.cit., p.44. * 98 Ibidem. * 99 Ibidem, p.49. * 100 Article 9 alinéa 1èr du Code de Procédure Pénale. * 101 Article 141 du Règlement intérieur des Cours, Tribunaux et Parquets. * 102 Article 58 du Règlement intérieur des Cours, Tribunaux et Parquets. * 103 BAYONA BAMEYA, Op.cit. p.41. * 104 Idem. |
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