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Le régime juridique de l'insurrection. Une étude à  partir des cas libyen et syrien.

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par Joseph Marcel II MBAHEA
Université de Yaoundé II - Master II  2013
  

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CHAPITRE II :

LA REPRESSION EN DROIT INTERNE DES INSURRECTIONS EN LIBYE ET EN SYRIE

Le régime juridique de l'insurrection: une étude à partir des cas libyen et syrien

Mémoire présenté et soutenu par MBAHEA JOSEPH MARCEL II Page 47

Mémoire présenté et soutenu par MBAHEA JOSEPH MARCEL II Page 48

Le régime juridique de l'insurrection: une étude à partir des cas libyen et syrien

Historiquement, le soulèvement armé du peuple contre ses dirigeants dans l'optique de les évincer a toujours existé. C'est également avec une surenchère de violence que le pouvoir réprime ce comportement. Aujourd'hui encore, cette réalité demeure. Le temps n'a pas érodé cette pratique. La réponse que les autorités au pouvoir dans un Etat donnent à toute insurrection reste la répression. Plusieurs exemples de part le monde corroborent à suffisance ce point de vue. L'on peut évoquer ici les évènements actuels en Ukraine, ou encore les M23 en RDC, les Séléka en RCA, et les évènements de 2011 en Egypte, et en Tunisie. La Libye et la Syrie, cas de notre étude, en sont de patentes illustrations. Ces deux Etats ont connu en 2011, des insurrections, lesquelles ont conduit les autorités gouvernementales à les réprimer.

La répression de l'insurrection revêt deux aspects : elle peut consister en recours à la force (Section I), ou en une répression juridictionnelle (Section II)

SECTION I : LA REPRESSION DES INSURRECTIONS PAR LE

RECOURS A LA FORCE

Par recours à la force, il faut comprendre ici le déploiement des forces de défense et de sécurité contre les insurgés sur le territoire qu'ils contrôlent. L'insurrection est un fléau. « En droit interne ou dans le langage des autorités publiques, leurs membres ne sont que des individus insoumis à la loi, des `'bandits» de droit commun, des terroristes, des `'apatrides» punissables du seul fait d'avoir pris les armes »104. Afin de dissoudre ce soulèvement, dissuader et d'obvier de telles initiatives pour l'avenir, les pouvoirs de Damas et de Tripoli ont recouru à la force et réprimé dans le sang ces insurrections.

Le recours à la force est d'abord le fait des autorités gouvernementales (Paragraphe I). Si ces dernières s'en trouvent débordées, elles peuvent solliciter le concours de leurs partenaires étrangers (Paragraphe II)

104 ZAKARIA (D) « les groupés dans un système de droit international centré sur l'Etat » in RICR, vol93, Genève, No 882, juin 2011, op.cit., p. 87.

Mémoire présenté et soutenu par MBAHEA JOSEPH MARCEL II Page 49

Le régime juridique de l'insurrection: une étude à partir des cas libyen et syrien

PARAGRAPHE I : LE RECOURS A LA FORCE PAR LES AUTORITES GOUVERNEMENTALES

Il est du devoir des autorités gouvernementales, de préserver l'unité et la stabilité du territoire, et de protéger les droits et les libertés fondamentaux face aux insurgés qui travaillent à renverser l'ordre établi. A cet effet, elles recourent à la force, car elles disposent d'un droit de légitime défense contre les insurgés (A). Ce qui induit conséquemment la négation du droit à la paix à ces derniers (B)

A - DROIT DE LEGITIME DEFENSE DES AUTORITES GOUVERNEMENTALES LIBYENNES ET SYRIENNES CONTRE LES INSURGES

Les autorités gouvernementales libyennes et syriennes ont eu recours à la force pour réprimer les insurrections qui les ont frappées, ceci dans le cadre de l'exercice du droit de légitime défense. Pour cerner ce recours à la force, il est tout d'abord important de déblayer premièrement la notion de légitime défense (1), afin de comprendre l'action des forces de défense et de sécurité (2)

1 - La notion de légitime défense

»106.

La légitime défense peut se concevoir comme le pouvoir reconnu à tout sujet de droit, de faire proportionnellement usage de la force, afin de défendre son intégrité physique, ses intérêts ou ceux d'un parent contre tout acte hostile, toute atteinte illégitime causée volontairement, directement, ou indirectement par un autre sujet de droit. Elle est bien connue en droit interne notamment dans les rapports interpersonnels. C'est un principe général de droit. Son domaine de prédilection est le droit pénal. Il permet en effet, à tout individu de répondre énergiquement contre toute attaque illégitime, menaçant sa personne ou celle d'un proche. La légitime défense est une cause d'exonération, de non imputabilité de la responsabilité pénale. C'est « un concept auquel il est souvent fait référence pour justifier l'emploi de la force en droit international »105. Elle est consacrée par l'article 51 de la Charte des nations unies qui parle d'un « ... droit naturel de légitime défense (...)

105 SIERPINSKI (B), « La légitime défense en droit international : quelques observations sur un concept juridique ambigu », R.Q.D.I, vol 19, no 1, 2006, p.79.

106 Art 51, Charte des nations unies, op.cit.

Mémoire présenté et soutenu par MBAHEA JOSEPH MARCEL II Page 50

Le régime juridique de l'insurrection: une étude à partir des cas libyen et syrien

L'exercice de la légitime défense obéit donc à des critères bien établis. Elle doit découler d'une attaque illégitime. C'est dire que l'on ne peut l'évoquer si l'on s'est tout d'abord rendu coupable d'actes répréhensibles. D'où la maxime latine, « Nemo auditur propriam turpitudinem allegans »107. On parle aussi de la théorie des « mains propres ». La légitime défense doit être proportionnelle à l'attaque illégitime. Elle doit être instantanée. C'est le lieu de préciser ici que le recours à la force contre un mouvement de libération nationale, bien que constituant un groupe armé est strictement interdit en droit international. Il est admis que les forces de libération nationale agissent ici conformément à l'exercice de leur droit à l'auto détermination. Par voie de conséquence, elles peuvent prétendre à la légitime défense.

Ce principe est bien établi en droit international. Du fait de l'étatisme qui règne dans cet ordre juridique. Il réserve ainsi l'exercice de ce droit uniquement aux Etats. Le droit international est silencieux en ce qui concerne le recours à la force en droit interne. Il ne précise pas si en interne, les autorités gouvernementales disposent d'un droit de légitime défense face à individus qui s'opposent à elles. Si elles peuvent légitimement et légalement exercer la répression à l'encontre des insurgés. C'est toute la difficulté d'une transposition de ce principe dans juridique interne s'agissant du rapport entre le pouvoir et les insurgés.

Mais à l'analyse, l'on peut reconnaitre un certain droit à la légitime défense aux autorités gouvernementales, dans la mesure où l'on assimile les insurgés à des « agresseurs » qui s'attaquent à l'intégrité territoriale de l'Etat. En réponse, les autorités gouvernementales sont en droit d'actionner les forces de défense et de sécurité.

2 - L'action des forces de défense et de sécurité

Les forces de sécurité, forces de première catégorie sont constituées des forces de police et de gendarmerie. Elles assurent la paix et le maintien de l'ordre à l'intérieur du territoire. Les forces de défense ont pour principale mission, la défense et la protection de l'Etat contre toute forme d'agression, ou toute autre forme d'atteinte à l'intégrité territoriale. Ce sont les forces de seconde catégorie, et veillent sur les frontières. Les forces de défense intègrent trois composantes principales à savoir : l'armée de terre, l'armée marine, et l'armée de l'air.

L'armée de terre est constituée des combattants de l'infanterie. L'armée marine protège les eaux territoriales et la façade maritime. L'armée de l'air quant à elle, est en charge de la

107 Maxime latine qui signifie que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Mémoire présenté et soutenu par MBAHEA JOSEPH MARCEL II Page 51

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sécurité de l'espace aérien. Il faut souligner que ces différentes forces travaillent en synergie dans la conduite de leur mission.

Dans un contexte insurrectionnel comme en Libye et en Syrie, les forces de défense et de sécurité sont mobilisées de manière graduelle. Au tout début de l'insurrection, ce sont les forces de sécurité qui interviennent afin de rétablir l'ordre public. Mais devant l'escalade de la violence et la détermination de la population, les autorités ont changé de stratégie. Les forces de défense sont entrées en scène. En Libye par exemple, Le gouvernement a usé de la force de façon excessive quand les manifestations se sont propagées dans les villes de l'ouest, à Tripoli, la capitale, à Misrata, Zaouïa, Zouara, et Zintan. L'on note les tirs à balles réelles contre des manifestants pacifiques, ainsi que les arrestations et la disparition de centaines de personnes soupçonnées d'être impliquées dans des manifestations anti-gouvernementales. Le gouvernement a posé des milliers, voire peut-être des dizaines de milliers de mines anti-véhicules et antipersonnel dans différentes régions de Libye, notamment à Ajdabiya, Brega, Misrata et dans les montagnes de l'ouest. L'utilisation de mines terrestres dans six lieux différents. Celles-ci représenteront à coup sûr, une menace pour les civils pendant de nombreuses années. Les mines antipersonnel, semblent avoir été les plus utilisées; ce type de mines contient peu de métal, ce qui les rend difficilement détectable et neutralisa ble.

Le scénario est sensiblement le même en Syrie. Les forces gouvernementales exercent une violence excessive contre les insurgés. Le pouvoir de Damas déploie l'ensemble de ses capacités militaires comme dans un conflit armé international classique. Ceci témoigne à suffisance, tout le sérieux avec lequel les autorités prennent la menace insurrectionnelle. L'on relève l'utilisation des armes lourdes. Les combats sont intenses en Syrie. Les insurgés parviennent à ternir face aux forces loyalistes car non seulement parce qu'ils sont bien équipés militairement, mais aussi parce qu'ils sont fortement appuyés par le groupe armé dénommé daesh.

Au-delà de l'exercice d'un droit de légitime défense, les autorités gouvernementales libyennes et syriennes recourent également à la force parce qu'elles nient tout droit à la paix aux insurgés.

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