CHAPITRE II. CONTOURS DE LA GRATUITE DE JUSTICE
EN DROIT CONGOLAIS
Section 1. Du principe de la gratuite de la justice
La gratuité de la justice étant une garantie
démocratique qui permet aux plus humbles d'obtenir le respect de leurs
droits. C'est le corollaire de l'égalité devant la justice. Le
système de la gratuité s'oppose au système
d'épices, qui existe là où les justiciables doivent payer
leurs juges. C'était le régime en vigueur en France jusqu'en
1790, c'était également le même système que
connaissait bon nombre de coutumes congolaises, aujourd'hui, les parties payent
encore leurs arbitres (juges privés) ; mais les magistrats et les
greffiers sont payés par l'Etat, il en est de même pour les
huissiers.
La gratuité de la justice n'exclut pas le payement des
honoraires des Avocats ou des Défenseurs Judiciaires ni le payement des
frais de justice. C'est cela qui fait dire que la justice est gratuite mais
onéreux, de sorte que la conduite d'un procès peut être
très couteuse, même pour la partie qui a gagné le
procès ; car tous les frais ne sont pas compris dans les
dépenses, lesquelles se récupèrent sur la partie perdante.
Une telle situation est de nature à empêcher les indigents de
faire valoir leurs droits en justice. C'est pour écarter ce danger et
assurer le respect absolu de ce principe que la loi a organisé
l'assistance judiciaire gratuite.
Signalons une fois de plus que les services rendus par les
cours et tribunaux sont en principe gratuits. Les justiciables ne sont pas
soumis au paiement du juge ni de l'officier du ministère public,
auxquels ils recourent. Les parties succombâtes paient cependant des
frais et des droits qui revêtent un caractère fiscal et qui sont
perçu au seul profit du trésor public. Juges, officiers du
ministère public et officiers ministériels sont tous payés
par l'Etat (34). Mais, pour certains auteurs, ce principe de
gratuité est un rêve.
Les déplacements de l'huissier de justice, qui, au
Congo, est un fonctionnaire public, sont payés par les justiciables sans
qu'il y ait décharge du montant payé.
34 MATADI NENGA GAMANDA, la question du pouvoir
judiciaire en République Démocratique du Congo : contribution
à une théorie de reforme ; éd. Droit et idées
nouvelles, 2001, P395
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1. De l'assistance judiciaire gratuite
L'assistance judiciaire peut se présenter sous quatre
aspects :
- elle peut consister au bénéfice gratuit d'un
conseil (avocat ou
défenseur judiciaire). En matière de droit
privé, le bénéfice gratuit d'un conseil est prévu
par l'article 8 du code de l'organisation et de compétence judiciaire,
qui dispose, en son alinéa 3, que « les officiers du
ministère public peuvent, par voie de requête écrite,
demander au président de la juridiction la désignation d'un
conseil chargé d'assister les personnes physiques lésées
qui seraient inaptes à ester en justice, à assurer leur
défense ou à y pouvoir » (35).
La loi a voulu venir en aide non seulement aux personnes
dépourvues de moyens financiers mais aussi aux personnes inaptes
à agir en justice ou à assurer leur défense
c'est-à-dire des personnes qui, culturellement parlant, ne maitrisent
pas les organes du fonctionnement de l'appareil judiciaire.
En matière répressive, la désignation
d'office d'un conseil en faveur des inculpés ou des prévenus
indigents ne trouve, à l'heure actuelle, aucune base légale. Le
statut du barreau de 1968 (ordonnance loi n°68/247 du 10 juillet 1968) a
rendu compétent le président du tribunal de grande instance pour
requérir les avocats et les stagiaires afin d'assister gratuitement les
indigents ; la loi n°76/026 du 23 décembre 1976 a étendu ce
bénéfice au « PRODEO » d'un conseil aux
inculpés. Malheureusement, le statut du barreau du 29 septembre 1979 ne
contient aucune disposition réglementant l'assistance judiciaire
gratuite d'un conseil. Mais les présidents des juridictions ce sont
attribués, au plan pratiques, le pouvoir de designer d'office un conseil
en faveur des indigents.
- Elle peut aussi consister dans le bénéfice de
la dispense de
consignation des frais : lorsqu'une partie veut agir en
justice, elle se présente devant le greffier. Ce dernier, avant
d'effectuer tout acte quelconque que la partie veut faire accomplir (recevoir
une assignation, acter une déclaration d'appel, d'opposition ou du
pouvoir en cassation etc....), peut exiger que la partie consigne les frais :
il s'agit en quelque sorte de payer à l'Etat une somme d'argent à
titre d'acompte sur les frais judiciaires.
35 Article 8 alinéa 3 du code de l'organisation
et de la compétence judiciaire.
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Lorsque la partie est indigente, elle peut être
dispensée de la consignation par une ordonnance du président.
L'indigence est constatée par le juge ou le président de la
juridiction devant laquelle l'action est intentée. Ceci est valable en
matière civile, et même devant la cour suprême de justice
(36).
- Elle peut ensuite consister dans la délivrance en
débet des pièces de
procédure. Normalement, le greffier ne peut pas
délivrer sauf au ministère public, grosse, expédition,
extrait ou copie d'un jugement portant condamnation à des
dommages-intérêts avant que le droit proportionnel n'ait
été paye(37).
Mais, en cas d'indigent constatée par le juge ou par le
président de la juridiction qui a rendu le jugement, la grosse,
l'expédition, l'extrait ou la copie peut être
délivrée en débet ; c'est-à-dire que les frais sont
supportés par le trésor public ; la partie indigente
bénéficiaire ne de bourse aucune somme d'argent
(38).
- Elle peut enfin revêtir la forme de consultations
gratuite. A l'heure
actuelle, l'article 43 de l'ordonnance loi n°79/08 du 29
septembre 1979 portant organisation du barreau du corps des défenseurs
judiciaires et du corps des mandataires de l'Etat à confier au conseil
de l'ordre le soin d'organiser un bureau des consultations gratuites en faveur
des indigents en déterminant les conditions de fonctionnement. On peut
déplorer, qu'une matière aussi importante soit laissée
à la discrétion du conseil de l'ordre. La solution idéale
serait de voir la loi elle-même organiser entièrement le
fonctionnement du bureau des consultations gratuites en faveur des
indigents.
En France, le décret N°2001 - 512 du 14 juin 2001
avait institué l'aide judiciaire expression qui a été
remplacée par l'aide juridique (39), il s'agit de permettre
aux plaideurs dont les revenus ne dépassent pas une certaine somme de
bénéficier du concours gratuit des avocats et des officiers
ministériels et de l'avance par l'Etat des frais occasionnés par
les mesures d'instruction. Il faut cependant préciser qu'au delà
de l'aide juridictionnelle, l'aide juridique porte également sur la
consultation, l'assistance au cours de procédure non juridictionnelle
(juridiction gracieuse) et les procédures d'exécution
(40).
36 Article 123 du code de procédure
pénale.
37 Idem
38 ibidem
39 Décret n°2001-512, in J.O,
numéro 137 du 14 juin 2001.
40 J. Vincent, S. Guichard, Gabriel MONTAGNIER, la
justice et les institutions, paris, 3eme éd Dalloz 1991,
N°69
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