1.2 Définition du construit de compétences
politiques
Malgré le caractère récent de ce
construit, les compétences politiques ont déjà fait
l'objet de nombreuses recherches du fait de l'intérêt qu'elles
représentent pour les entreprises. En effet, dans le contexte
économique actuel qui demande de plus en plus de flexibilité et
d'adaptabilité des sujets, ce type de compétences devient un
atout fondamental pour toute personne désirant réussir sa
carrière. Le champ de recherche sur les compétences politiques se
base en effet sur la conception de toute organisation comme une arène
politique, dans laquelle le potentiel d'évolution de chacun ne repose
plus uniquement sur la performance objective mais également la
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capacité à comprendre et utiliser les enjeux de
pouvoirs et d'influence qui s'y jouent (Crozier et Friedberg, 1981).
Mintzberg (1983) avance ainsi dans ses travaux que le
construit de compétences politiques fait référence
à l'exercice d'influence à travers la persuasion, la manipulation
et la négociation, et Pfeffer (1991) est le premier à amener les
compétences politiques dans le contexte professionnel. Dans cette
perspective, réussir au sein de toute organisation nécessite
d'accéder à des informations critiques ou rares. Les personnes
ayant un haut niveau de compétences politiques sont donc
avantagées pour obtenir ce type d'informations car elles dédient
beaucoup de temps à entretenir leur réseau professionnel et
à développer leurs connexions avec des personnes influentes et
potentiellement utiles (Ferris et al, 2005, publié dans la presse).
Elles sont par conséquent plus à même d'obtenir et de
sécuriser les ressources dont elles ont besoin pour leur travail en
s'appuyant sur leur réseau et leur capacité à
convaincre.
Les compétences politiques peuvent être
résumées comme « l'aptitude à comprendre les autres
au travail, et à utiliser ces connaissances pour influencer autrui
à agir de manière à renforcer ses propres objectifs ou
ceux de l'organisation. » (Ahearn, Ferris, Hochwarter, Douglas et Ammeter,
2004). Elles sont caractérisées par une fine perception sociale
et la capacité pour un individu d'ajuster son comportement aux personnes
et situations changeantes et variées de l'environnement professionnel
(Ferris et al, 1999, 2005). On peut donc parler d'une intelligence sociale et
situationnelle appliquée au contexte professionnel, qui permet de savoir
non seulement quoi dire mais également à qui le dire et à
quel moment, d'une façon qui ne paraisse pas intéressée et
qui inspire confiance (Ferris et al., 2000).
On observe une évolution de la définition de ce
construit dans les recherches. Les premières études concevaient
en effet le socle des compétences politiques comme une variable
indivisible (Ferris et al., 1999) tandis que les travaux plus récents
s'accordent à distinguer plusieurs dimensions constitutives de ce
modèle (Ferris et al., 2005).
Les auteurs identifient un modèle multifactoriel des
compétences politiques à quatre dimensions : l'intuition sociale,
la sincérité apparente, l'adaptation interindividuelle et la
capacité à entretenir des liens de réseaux.
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L'intuition sociale désigne la finesse de perception et
de compréhension des situations et des interlocuteurs rencontrés.
Parce qu'elle représente une « clé de lecture » de leur
environnement, les sujets ayant une intuition sociale élevée ont
plus de facilité à s'identifier aux autres et à comprendre
les situations, ce qui leur permet d'interpréter justement les relations
interpersonnelles et leurs enjeux.
La sincérité affichée est une dimension
à part entière, et renvoie au fait que les personnes ayant un
haut niveau de compétences politiques sont perçues par leurs
interlocuteurs comme étant honnêtes, authentiques et
sincères. Or, la perception des individus comme non
intéressés ou motivés par des intérêts
personnels est un prérequis à toute tentative d'influence (Jones,
1990), qui repose sur le besoin d'établir en premier lieu la
confiance.
L'adaptation interindividuelle est la dimension des
compétences politiques qui fait référence à la
capacité pour l'individu d'ajuster son comportement et son discours au
style de son interlocuteur, de façon à exercer son influence et
convaincre sans pour autant que cet objectif soit explicite.
La capacité à entretenir des liens de
réseaux, quatrième dimension du construit de compétences
politiques, caractérise la propension de l'individu à
créer de nouvelles connexions et à développer les
relations sociales avec les différentes personnes de son environnement,
et principalement celles qui peuvent lui être utiles pour atteindre ses
objectifs personnels et/ou organisationnels. Les relations, les amitiés,
la création de réseaux, d'alliances et de coalitions sont en
effet essentielles dans les arènes politiques que sont les organisations
(Bacharach et Lawler, 1998; Pfeffer, 1992), et permettent aux sujet ayant de
fortes compétences politiques non seulement de se constituer un socle de
soutien social fort mais également de créer et de profiter de
nouvelles opportunités grâce à la visibilité
procurée par ces réseaux socio-professionnels (Pfeffer, 1992).
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