La problématique des marchés publics de travaux et l'approche du partenariat public privé au Bénin.( Télécharger le fichier original )par Souleymane ASSOUMA MAMA Université dà¢â‚¬â„¢Abomey Calavi - Dplôme dà¢â‚¬â„¢Etude Approfondie en Droit Public Fondamental 2014 |
B. Une renégociation des éléments organiques du contrat à envisagerAu Bénin, les autorités contractantes devront s'apercevoir que des changements pouvant affecter les parties aux contrats de partenariat public-privé au cours de leur exécution, et plus particulièrement l'opérateur économique titulaire, seront aussi importants que ceux qui concernent leur contenu. En effet, il faut reconnaître que le remboursement de la dette contractée par le « partenaire » de la personne publique auprès des prêteurs est le plus souvent garanti par le droit consenti à ces derniers d'exiger la substitution de l'opérateur défaillant par un débiteur solvable. Par ailleurs, il est possible qu'au cours de la longue durée de l'opération, l'opérateur titulaire du contrat connaisse certaines transformations internes. Ces transformations internes peuvent provenir de fréquentes restructurations et acquisitions d'entreprises335(*) ; d'où la cession du contrat à une autre entreprise filiale. Par exemple : « une société titulaire d'une concession de distribution d'eau ou d'un bail emphytéotique hospitalier peut, à la suite d'un mouvement de restructuration du groupe auquel elle appartient, souhaiter transférer le contrat à une de ses filiales. De même, le titulaire d'une concession ou d'un contrat de partenariat peut également faire l'objet d'un rachat par une entreprise non désireuse de poursuivre l'activité attachée à ce contrat et souhaitant donc le céder à une autre société 336(*)». Ainsi, des mandataires des acteurs financiers évaluent à moins d'une décennie la durée moyenne de la participation des investisseurs « sponsors »337(*), ayant pour rôle de renforcer par leurs contributions, les capitaux propres de la société de projet. Cependant, ce déséquilibre contractuel concerne surtout des actionnaires jouant un rôle opérationnel dans la réalisation de l'opération : ainsi, dans l'éventualité où la société de projet titulaire du contrat principal est formée par les membres d'un groupement d'opérateurs qui en est l'attributaire initial, il est possible que l'opérateur en charge de la construction, ne voulant pas jouer le rôle d'un investisseur, ne souhaite pas demeurer associé une fois l'ouvrage achevé, durant la phase d'entretien ou d'exploitation. Mais, il n'en est pas dans l'intérêt du bon déroulement des opérations de partenariat public-privé de faire obstacle à de telles évolutions. En effet, la participation prolongée d'un opérateur industriel dont le rôle opérationnel a pris fin « constitue [pour lui] un risque dont [il] voudra se garantir » ce qui se traduira par un coup supplémentaire338(*) ; une plus grande stabilité est certes attendue de la part des actionnaires investisseurs mais ceux-ci seront éventuellement réticents à s'engager dans l'opération s'ils sont privés de sortir du capital en cours d'exécution. En considérant l'ordre juridique interne, les conditions de cette modification organique pourraient sembler d'ores et déjà réunies. Sa fréquence en matière de concession de service public a fait de la cession de contrat une technique juridique reconnue plutôt en droit administratif qu'en droit privé339(*). Bien qu'elle ait été un temps confondue avec le sous-contrat conçu comme une concession partielle340(*), il est aujourd'hui communément admis qu'elle entretienne avec celui-ci une différence de nature, dans la mesure où la cession totale ou partielle opère une transmission des obligations nées du contrat en un tiers, et donc un transfert de la responsabilité de leur exécution341(*). Reprenant cette définition, un avis du Conseil d'Etat du 8 juin 2000342(*) a précisé que les opérations des restructurations de l'entreprise titulaire du contrat ne peuvent être considérées comme des cessions que lorsqu'elles emportent la création d'une personne morale nouvelle, à l'exclusion notamment du « changement de propriétaire des actions composant le capital social, même dans une proportion très largement majoritaire »343(*). Cependant, c'est au plan des conditions de la cession proprement dites que situe l'apport essentiel de cet avis : mettre un terme aux interrogations doctrinales344(*), le Conseil d'Etat juge que les procédures de publicité et de mise en concurrence applicables à la passation initiale du contrat cédé non pas à être mise en oeuvre préalablement à la cession, sous réserve que celle-ci ne s'accompagne pas d'une modification substantielle d'un élément essentiel du contrat comme le prix, la durée ou la nature des prestations et sauf l'hypothèse d'un détournement de pouvoir. En définitive, cette deuxième partie du mémoire permet d'affirmer que le Bénin a un intérêt à introduire les contrats de partenariat public-privé parmi les contrats de l'administration publique. Cet intérêt a été démontré à travers les objectifs du PPP, à travers ses avantages. Les avantages que l'on peut attendre du PPP sont : - l'accélération, par le préfinancement, de la réalisation des projets ; - une innovation qui bénéficie à la collectivité par le dynamisme et la créativité du privé ; - une approche en coût global ; - une garantie de performance dans le temps ; - une répartition du risque optimale entre secteur public et privé, chacun supportant les risques qu'il maîtrise le mieux ; - un programme mieux défini et plus stable grâce à une meilleure intégration des phases de conception, de construction et d'exploitation ; - l'assurance d'une préservation de la valeur patrimoniale de l'ouvrage par un entretien régulier et une maintenance préprogrammée ; - une incitation du privé à la performance commerciale dans le cas de recettes annexes ou d'intéressement à la fréquentation ; - la possibilité de recours aux contrats de crédit-bail puisque le prestataire (et non la collectivité) est titulaire du droit d'occupation du domaine public. Aussi certains paramètres comme l'organisation de l'évaluation préalable, l'organisation du dialogue compétitif ; le contrôle juridictionnel du recours au PPP, l'application du principe de transparence de la rémunération du partenaire privé, les modalités du contrôle d'exécution correcte du PPP, la renégociation de l'objet du contrat et des éléments organiques du contrat constituent-ils au tant de facteurs qui présentent d'intérêt de la décision de l'instauration d'un cadre juridique et réglementaire du partenariat public-privé au Bénin. * 335 Paul Lignères, op. cit., p.293. * 336 Idem, p.293. * 337 P. SORBETS (dir.), « Le financement des PPP en France », Rapport du groupe des banques et organismes financiers membres de l'I.G.D, Institut de la Gestion Déléguée (I.G.D), octobre 2006 pp.21-22. * 338 J.-F. SESTIER, « Exécution des contrats de partenariat public-privé », p. 162. * 339 R. NOGUELLOU, « La transmission des obligations en droit administratif », thèse, Paris II, dactyl., 2002, p. 80 ; Y. GAUDEMET, « La cession des concessions », LPA n° 211, 22 octobre 1999, pp. 5-9. * 340 A. DE LAUBADERE, F. MODERNE, P. DELVOLVE, « Traité des contrats administratifs » 2ème éd., p. 12. * 341 R. NOGUELLOU, « La transmission des obligations en droit administratif », thèse précitée, pp.144-148. * 342 Avis CE, (sect. Fin.) du 8 juin 2000 n° 364.803, EDCE n° 52, 2001, p. 230, BJCP 2001, p. 94, chron. E. Glaser, AJDA 2000, p. 758, note L. Richer, CJEG 2001 p. 103, comm. ch. Maugüe et L. Deruy. * 343Ch. MAUGÜE, L. DERUY, « Les cessions de marchés publics et de délégation de service public » BJCP 1999, p. 494-502 ; N. SYMCHOWICZ, « Contrat administratif et mise en concurrence : la question des cessions », AJDA 2000, pp. 104-114. * 344Y. GAUDEMET, « la cession des concessions », pp. 8-9 ; N. SYMCHOWICZ, « contrat administratif et mise en concurrence : la question des cessions », pp.104-114. |
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