La problématique des marchés publics de travaux et l'approche du partenariat public privé au Bénin.( Télécharger le fichier original )par Souleymane ASSOUMA MAMA Université dà¢â‚¬â„¢Abomey Calavi - Dplôme dà¢â‚¬â„¢Etude Approfondie en Droit Public Fondamental 2014 |
CHAPITRE II : Le contenu et l'exécution des contrats de partenariats public-privéLa soumission des différents types de contrats ayant l'objet des opérations de partenariats public-privé à un régime juridique commun et spécifique est possible et nécessaire en ce qui concerne les aspects relatifs au contenu (SECTION I) et à l'exécution (SECTION II) de ces contrats de partenariat public-privé. SECTION I : Le contenu des contrats de partenariat public-privéLe contenu des contrats de partenariat public-privé obéit à un régime juridique commun, spécifique et s'apprécie surtout sur la durée (Paragraphe I) et la rémunération (Paragraphe II) des titulaires de ces contrats. PARAGRAPHE I : La durée des contrats de partenariat public-privéLa durée très longue des contrats de partenariat public-privé obéit à des règles spécifiques. Mais l'absence de stipulations relatives à cette durée n'est pas de nature à entraîner la nullité du contrat, dans la mesure où celui-ci peut être résilié par l'autorité contractante248(*)ou le juge administratif249(*). Ainsi il est important d'aborder l'inadéquation entre la durée normale d'amortissement de l'investissement et la durée limitée des contrats de partenariat public-privé (A) puis la relativité de la durée limitée des contrats de partenariat public-privé (B) A. Une inadéquation entre la durée normale d'amortissement de l'investissement et la durée limitée des contrats de PPPLes Autorités contractantes du Bénin devront accorder une attention particulière à la durée de l'amortissement de l'investissement en envisageant une durée normale d'amortissement de l'investissement et la durée limitée des contrats de partenariat public-privé. Tout d'abord, le principe d'une durée limitée des contrats de PPP pourrait sembler inhérent au mode d'organisation des activités publiques dont relèvent les partenariats public-privé, et découler plus précisément de l'impératif de la réversibilité du recours à l'externalisation globale. Une telle idée pourrait se réclamer de la position explicitement adoptée par certains auteurs selon laquelle les concessions des services publiques non seulement ne peuvent en principe être perpétuelles, mais encore devraient être toujours à durée déterminée250(*). Ainsi, Gaston Jèze n'était pas loin de considérer que la limitation de la durée des concessions de service public constituait un impératif au regard de principe de mutabilité251(*). Cette opinion n'a cependant pas emporté la conviction du Conseil d'Etat. Reniant une solution parfois adoptée par les juges du fonds252(*), la juridiction suprême a, en effet, jugé « qu'aucun principe régissant le fonctionnement du service public n'imposait qu'une convention portant sur son organisation comporte un terme déterminé » dès lors qu'elle peut faire l'objet d'une résiliation253(*). Il semble donc que, aux yeux du juge administratif, la préservation de la maîtrise de l'activité par l'administration soit « suffisamment garantie par le pourvoir de résiliation du contrat »254(*). Le dépassement de la durée dans un contrat de partenariat public-privé constitue une atteinte injustifiée à la libre concurrence. Dans ces conclusions sur l'arrêt Million et Marais, le Commissaire du gouvernement Jacques-Henri Stahl estimait déjà que les clauses des conventions de délégation de service public relatives à la durée étaient particulièrement sensibles au regard de cet impératif255(*). Cela se comprend aisément s'agissant des délégations et autres concessions, qui ne peuvent être justifiées que dans la mesure où il s'avère nécessaire au bon accomplissement de la mission d'intérêt général concernée. Cette solution s'impose tant en application du principe interne de libre concurrence qu'en vertu de la règle, posée à l'article 106, § 2 du TFUE (ex article 86, du Traité CE), de limitation au strict nécessaire des dérogations au droit commun de la concurrence consentis aux entreprises chargées de services d'intérêt économique général256(*). La Commission européenne souligne ainsi qu'une durée excessive serait susceptible d'être censurée aussi bien « sur la base des principes régissant le marché intérieur » que sur celle « des dispositions du Traité en matière de concurrence »257(*). C'est en faisant application du principe que « la durée de la concession (devait) être fixée de manière à ne pas restreindre ou limiter la libre concurrence au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer l'amortissement des investissements et une rémunération raisonnable des capitaux investis »258(*). De la même manière, le Conseil d'Etat a jugé que les dispositions de la loi du 29 janvier 1993 relatives à la durée des conventions de délégation de service public répondaient « à un impératif d'ordre public qui est de garantir, par une remise en concurrence périodique, la liberté d'accès des opérateurs économiques aux contrats de délégation de service public et la transparence des procédures de passation »259(*). Il est à remarquer que le code des marchés publics lui-même impose qu'il soit tenu compte, dans la fixation de la durée des marchés, « de la nécessité d'une remise en concurrence périodique »260(*). Si le principe général est que la durée du contrat doit être définie compte tenu de la nature des prestations, c'est-à-dire limitée à ce qui est nécessaire pour garantir l'efficience de l'échange261(*), la déclinaison de ce principe pour les partenariats public-privé consiste dans la règle de limitation de la durée à ce qui nécessite de l'amortissement des investissements à laquelle il convient d'ajouter le délai de la réalisation de l'investissement, dans la mesure où l'amortissement ne commence qu'à la date d'achèvement de celui-ci262(*). C'est d'ailleurs la position adoptée par la commission européenne dans son livre vert relatif aux partenariats public-privé263(*), et que semble reprendre également la cour de justice de l'Union Européenne264(*). L'extension de cette règle générale à toute opération de partenariat public-privé quel qu'en soit l'instrument juridique apporterait une heureuse clarification à l'Etat du droit positif. Pour l'heure, seules les dispositions relatives aux délégations de service public265(*) et aux contrats de partenariat266(*) l'énoncent expressément. Celles-ci concernent les baux emphytéotiques et les autorisations d'occupation temporaire constitutives de droits réels qui énoncent de manière beaucoup plus floue que la durée de la convention doit être fixée en fonction de l'objet du contrat267(*) ou de la nature de l'activité exercée ou des ouvrages réalisés268(*), et fixent des durées maximales en valeur absolue qui dépasseront dans de nombreuses hypothèses la durée normale d'amortissement des investissements269(*). * 248CE, 5 février 2009, Association Société centrale d'agriculture, d'horticulture et d'acclimatation de Nice et des Alpes-Maritimes, req. n° 305021 et 309116, contrats marchés publ. 2009, comm. n° 98, note G. Eckert, DA 2009, comm. n° 53, note F. Melleray, AJDA 2009, p.704, note J.-D.Dreyfus. * 249CE, 24 novembre 2008, Syndicat mixte d'assainissement de la région du Pic Saint-Loup, req. n° 290540, BJCP 2009, p. 151, concl. B. Dacosta, DA 2009, comm. n° 19, note F. Melleray, contrats marchés publ. 2009, comm. n° 7, note G. Eckert. * 250Voir : A. DE LAUBADERE, F. MODERNE, P. DELVOLVE, Traité des contrats administratifs, 2ème éd., t. 2, Paris, LGDJ, 1984, §1440, p.678. * 251 G. JEZE, Théorie générale des contrats de l'administration, 3ème éd., t. 3, Paris, LGDJ, 1936, p.1142. * 252 CAA Marseille, 5 décembre 2005, Ville de Montpellier, n°03MA00232). * 253 CE, 24 novembre 2008, Syndicat mixte d'assainissement de la région du Pic Saint-Loup. * 254 G. Eckert, note sous CE, 24 novembre 2008, Syndicat mixte d'assainissement de la région du Pic Saint-Loup, Contrats-marchés publ., 2009, comm. 7, p. 22. * 255 J.-H. STAHL, conclusions sur CE Sect., 3 novembre 1997, Million et Marais, RFDA 1997, p.1228. * 256CJCE, 19 mai 1993, Paul Corbeau, aff. C-320/91, point 16, Rec. I, p.2533. * 257 Commission européenne, 30 avril 2004, Livre vert sur les partenariats public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions, COM (2004) 327 final, pt.46. * 258 Commission européenne, Communication interprétative sur les concessions en droit communautaire, (2000/C/12/02), pt. 3. 1. 3, p. 8. * 259 CE, Ass., 8 avril 2009, Compagnie générale des eaux, req. n° 211737 et 271782, (à paraître au Recueil Lebon), DA n°6, 2009, p. 23 note F. Melleray, AJDA 2009, p.1090, chon. S.-J. Liéber, D. Botteghi, JCP A n°27, 2009, p.35, note B. Baptiste. * 260 Art 16, al.1 du code français des marchés publics. * 261Article 16 du code français des marchés publics ; art 40, al.1 de la loi n°92-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence des procédures publiques ; art L. 1411-1, al.1 CGCT.0 * 262 CE, 8 février 2010, Comme de Chartes, req. n°323158 (sera mentionné aux tables du recueil Lebon), BJCP 2010, pp.208-212, concl. B. Dacosta, obs. R.S. * 263 Commission européenne, 30 avril 2004, livre vert sur les partenariats public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions, COM(2004) 327 final, pt. 46. * 264 CJUE, 9 sept. 2010, Ernest Engelmann, aff. C664/08, Contrats-Marchés publ. 2010, comm. 388, note W. Zimmer. * 265 L'article 40, al.1 de la loi n°93-122du 29 janvier 1993, (article L. 1411-2 CGCT). * 266Voir article 1er, I de l'ordonnance du 17 juin 2004, précitée. * 267 C'est le cas des BEA pour les besoins du service public hospitalier (article L. 6148-1-3 du code de la santé publique). * 268 C'est le cas des AOT constitutives de droits réels (article L. 2122-2 CGPPP ; article L. 1311-5, al. 3 CGCT). * 269 C'est-à-dire 99 ans pour les BEA (par renvoi à l'article L. 451-1 du code rural) et 70 ans pour les AOT constitutives de droits réels (article L. 2122-2 CGPPP ; article L. 1311-5, al. 3 CGCT). |
|