II. UNE CRISE QUI A IMPACTE LES STRATEGIES DE
COMMUNICATION DES BANQUES FRANÇAISES
Dans un premier temps, nous avons abordé le contexte
dans lequel se déroule notre problématique. Nous avons
défini les principaux concepts scientifiques et démontré
que la confiance des consommateurs avait été impactée
d'une manière assez précise : la confiance institutionnelle.
L'objectif de cette seconde partie sera de comprendre si les stratégies
de communication ont été modifiées. Nous tenterons de
comprendre dans quel sens a évolué la communication du secteur
bancaire et comment les consommateurs réagissent face à ces
nouvelles stratégies de communication.
a. LES STRATEGIES DE COMMUNICATION BANCAIRE EN FRANCE
AVANT LA CRISE FINANCIERE
1. SPECIFICITES DE LA COMMUNICATION BANCAIRE
La communication permet d'atteindre le positionnement
stratégique désiré par une marque. On entend par
positionnement, la place qu'une entreprise souhaite occuper dans l'esprit des
clients et prospects. De manière générale, une entreprise
souhaite en priorité se démarquer de ses concurrents. Pour
atteindre le positionnement voulu, une entreprise peut s'appuyer sur son
identité, qui a une logique de long terme (histoire de l'entreprise,
stratégie, ressources humaines...). La communication peut ainsi
influencer l'image que les consommateurs ont d'une entreprise. Cette image de
marque est plus instable, puisque sujette à tous les stimuli
reçus par les consommateurs. L'une des spécificités du
secteur bancaire est en effet que l'image de marque est très
exposée aux crises. Cela implique un repositionnement fréquent
des stratégies de communication de la part des marques bancaires. Nous
verrons dans l'analyse historique des campagnes de publicités que peu de
groupes ont réussi à garder une cohérence de
positionnement sur le long terme. Il est en effet difficile de bâtir une
stratégie de communication stable dans un environnement aussi mouvant.
L'enjeu pour les marques est alors de réussir à bâtir une
communication qui puisse s'adapter aux aléas économiques et
médiatiques.
Nous pouvons compléter le propos en parlant de
l'identité des marques bancaires. Bien que beaucoup d'entre elles aient
une histoire ancienne avec les Français, les stratégies de
communication sont peu basées sur l'utilisation de cette grande force.
Alors que beaucoup d'entreprises communiquent aujourd'hui sur leur date de
fondation (secteur alimentaire par exemple), le secteur bancaire n'utilise pas
ce vecteur de discours commercial.
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La législation sur les produits bancaires est
très forte en France. Les banques se voient donc contraintes de proposer
des produits tout à fait similaires. C'est donc un secteur très
particulier puisque il faut réussir à communiquer
différemment pour vendre les mêmes produits. Les taux peuvent
être mis en avant afin d'attirer de nouveaux clients mais cette
stratégie reste marginale. Nous pouvons par exemple citer la loi sur le
crédit à la consommation de 2010 dite « loi Lagarde ».
Cette loi régit notamment la manière dont les banques doivent
communiquer sur les crédits à la consommation. Ainsi la
législation contrôle le « format, contenu, terminologie
»42 et va jusqu'à interdire par exemple, les cadeaux
offerts aux clients. Nous comprenons facilement pourquoi les banques se
retrouvent confrontées à un problème de
différenciation, puisque la législation laisse peu de place
à une offre hétérogène. Les banques peuvent
communiquer sur la vision institutionnelle de leur métier afin de se
différencier. Le rôle primordial de la communication dans le
secteur bancaire justifie les sommes importantes investies dans la
communication publicitaire. Avec le secteur agroalimentaire et automobile,
c'est l'un des secteurs qui dépense le plus pour dans les
médias.
Il faut aussi rappeler que la communication bancaire se
déroule dans le cadre de la servuction. Les attributs physiques sont
donc inexistants et il faut réussir à les créer en misant
sur des stratégies publicitaires créatives. Le consommateur ne
peut pas comparer des services intangibles. Le travail fondamental est donc de
faire passer au consommateur la « proposition de valeur établie par
l'entreprise »43. Ce travail est encore plus important dans
l'économie tertiaire par rapport à la vente de biens tangibles.
Or pour bâtir une réelle reconnaissance de marque, il est
nécessaire de créer une identité visuelle forte. Celle-ci
passe tout d'abord par la couleur, le logo et la charte de communication. Au
travers de ces outils, la marque bancaire doit réussir à rendre
réelle sa proposition de valeur. La communication doit donc permettre de
surmonter l'intangibilité du service. L'ouvrage « Marketing des
services » aux Editions Dunod (2014) propose quelques conseils comme par
exemple focaliser le message sur l'expérience d'utilisation du service.
Pour outrepasser le caractère général et homogène
des messages, il faut trouver des arguments qui différencient et
valorisent par rapport à la concurrence. Une solution est donc de
communiquer sur les éléments du service (contacte client, point
de vente...), ou de mettre le client au centre de la stratégie de
communication. Des associations extrinsèques peuvent aussi être
réalisées comme par exemple une mascotte (Cetelem) ou des
célébrités (Gad Elmaleh) qui permettent de tangibiliser la
marque.
Les banques ne sont pas nées dans contexte
concurrentiel. Elles étaient à l'époque cantonnées
à une zone géographique ou alors à un secteur
d'activité précis. Il existait des frontières assez
étanches entre les banques qui ne se faisaient donc que peu d'ombre. Les
stratégies de communication sont ainsi peu tournées vers les
concurrents. Ce n'est que très récemment que le secteur a
été décloisonné, ouvert à la concurrence
géographique et de marché, amenant les banques à investir
fortement dans la publicité.
42 Extrait de l'ordonnance du 21 janvier 2010 - articles L311-4
et L311-5 CC
43 Marketing de la banque et de l'assurance - Edition DUNOS
(2012)
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Lorsque le CA a commencé à se tourner vers les
CSP+ urbains, cela a par exemple été une menace pour le LCL.
Une des particularités de la communication dans le
secteur bancaire français est l'intensité et l'importance du
sponsorship d'équipes de sports. Paviot 44 (1995)
récapitule dans son article les principaux partenariats entre sports et
banques qui existent à l'époque. Nous pouvons voir aujourd'hui
que ces partenariats sont toujours existants et de long terme. Les banques ont
en effet réussi à partager des valeurs en parrainant des
équipes ou en organisant des tournois (Master de Bercy. Les exemples
sont nombreux et les retombés importantes pour l'image de marque.
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