2.3 Description de la
situation problématique
Au Burkina Faso, l'existence des écoles annexes dans
les Écoles Nationales des Enseignants du Primaire (ENEP) répond
entre autres au souci de favoriser la construction de compétences
professionnelles par ce va- et- vient indispensable entre les connaissances
théoriques et leur mise à l'épreuve dans la pratique en
situation réelle de classe.
Dans un contexte où la professionnalisation des
enseignants est en train de devenir une vision partagée (Tardif
&Borges, 2009), poser le problème de la contribution des
écoles annexes à la formation initiale des enseignants au sein
des structures investies de cette mission, revient fondamentalement à
s'interroger sur le rapport qu'entretient la pratique avec la théorie
dans le processus de formation et de qualification professionnelle des
enseignants.
La présence des écoles annexes dans les ENEP
n'est donc pas le fruit du hasard. En effet, selon le décret
n°2015-1625/PRES-TRANS/PM/MENA/MEF, portant approbation des Statuts des
Écoles Nationales des Enseignants du Primaire (ENEP),les
élèves-maîtres s'exercent à la pratique de
l'enseignement, à la gestion d'une classe et des activités
scolaires dans les écoles annexes ouvertes au sein des ENEP, dans les
écoles d'application ou à défaut, dans les autres
écoles primaires.
A la suite de ces prescriptions officielles, les écoles
annexes devraient offrir aux élèves-maîtres en
première année la possibilité d'observer et d'analyser des
leçons en situation réelle conduites par des enseignants
chevronnés. En outre, les élèves-maîtres devraient
pouvoir s'essayer à la pratique-classe dans ces écoles en mettant
à l'épreuve les théories pédagogiques et
didactiques développées en classe par les formateurs. Les visites
de classes devraient faire partie intégrante de la première phase
de la formation initiale des enseignants. D'ailleurs, le règlement
intérieur des ENEP stipule que les élèves-maîtres
ont l'obligation de participer aux visites de classes à l'école
annexe sous peine de sanction. Cela met encore en évidence toute
l'importance qui est accordée à la pratique pendant la phase dite
théorique de leur formation. En effet, le rapport entre les cours
théoriques reçus en classe et la mise en pratique de ces
connaissances est indispensable en matière de formation professionnelle.
Ce n'est que par cette liaison théorie-pratique que les
élèves-maîtres parviendront à asseoir les bases des
compétences professionnelles nécessaires qu'ils
développeront pendant la phase pratique de leur formation initiale sur
le terrain et plus tard au cours de leur carrière.
Face à ces attentes en vue d'une formation
professionnelle initiale efficace des enseignants, l'on peut se demander si
cette articulation théorie-pratique que devraient permettre les
écoles annexes est effective dans les ENEP.L'expérience que nous
avons vécue personnellement pendant trois années
académiques dans une ENEP en qualité de formateur permanent ainsi
que les témoignages de nos collègues formateurs d'autres ENEP sur
la réalité des écoles annexes nous interpellent à
réfléchir sur le rôle et la place de ces écoles dans
la formation initiale des enseignants du primaire. L'on peut se demander si les
formateurs, principalement ceux chargés de l'enseignement de la
didactique des disciplines arrivent à réaliser comme il se doit,
des visites de classes à l'école annexe au profit des
élèves-maîtres pendant la première année de
leur formation.
Les échanges exploratoires que nous avons eu avec
quelques collègues des ENEP de Loumbila, de Fada, de Ouahigouya nous
renseignent que l'exploitation des écoles annexes par les formateurs
dans le cadre de la formation initiale des enseignants du primaire ne semble
pas donner satisfaction. Ces échanges exploratoires ont consisté
en des entrevues avec des anciens élèves-maîtres et
quelques formateurs des ENEP de Fada N'Gourma, de Loumbila, de Dori. En outre,
nous avons pu joindre les Directeurs des Etudes et des Stages (DES) des ENEP de
Dori et de Fada.
Les Directeurs généraux n'ont pas
été en reste car, des échanges téléphoniques
avec ceux des ENEP de Dédougou et de Dori nous ont permis de recueillir
leurs avis sur la question.
Quant aux directeurs des écoles annexes, celui de Dori
et un ex-directeur de l'école annexe de Fada ont accepté de
prêté oreille attentive à nos questions exploratoires.Cette
enquête préliminaire a porté essentiellement sur
l'appréciation globale de la fonctionnalité des écoles
annexes par rapport à leur utilisation par les différents acteurs
pour la formation initiale des enseignants du primaire. Globalement, la
majorité des appréciations des acteurs de terrain sur
l'effectivité et l'efficacité de l'articulation
théorie-pratique dans la formation initiale des enseignants au sein des
ENEP à partir des écoles annexes sont mitigées. Ce qui
laisse entrevoir l'existence d'un certain nombre de difficultés. En
effet, l'existence d'un dispositif ne garantit pas forcément son
fonctionnement optimum ou son exploitation judicieuse par les différents
acteurs concernés. Les tendances de cette pré-enquête
fondent davantage notre préoccupation de recherche qui est celle de
questionner la fonctionnalité ou l'exploitation des écoles
annexes dans les ENEP pour apprécier leur contribution réelle
à la formation initiale des enseignants et d'identifier les obstacles
qui s'y dressent en vue de dégager des pistes d'amélioration.
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